GEO
18/06/2011
http://www.binghamton.edu/fbc/commentaries/archive-2011/306fr.htm
Commentaire n° 306, 1er juin 2011
« Barack Obama est politiquement coincé »
Le président des Etats-Unis est tenu pour être la personne la plus puissante du monde moderne. Ce que Barack Obama découvre à son vif regret, cest quil dispose toujours dun énorme pouvoir pour faire du mal. Mais il ne dispose pratiquement plus de pouvoir pour faire le bien. Je pense quil sen rend compte et quil ne sait pas comment y remédier. Le fait est quil ne peut pas y faire grand chose.
Prenons par exemple son plus gros dossier du moment, la deuxième révolte arabe : ce nest pas lui quil la lancée ; elle la pris par surprise, comme presque tout le monde ; sa réponse immédiate fut de penser, à juste titre, quelle mettait grandement en péril lordre géopolitique déjà instable de la région. Les Etats-Unis cherchèrent autant quils le purent à limiter les dégâts, à maintenir leur propre position et à rétablir l« ordre ». On ne peut pas dire quils y aient vraiment réussi. Chaque jour qui passe démontre de toutes les façons possibles que la situation devient plus désordonnée et échappe à leur contrôle.
Barack Obama est par conviction et par caractère le centriste par excellence. Il recherche le dialogue et le compromis entre les « extrêmes ». Il agit après mûre réflexion et ne prend ses grandes décisions quavec prudence. Il est favorable à un changement lent et ordonné, un changement qui ne menace pas les fondements dun système dont il fait non seulement partie mais dont il est la figure centrale consacrée et le joueur individuel le plus puissant.
On le pousse de toutes parts à sortir de ce rôle. Il continue néanmoins à vouloir le jouer. Il se dit évidemment en son for intérieur : que puis-je faire dautre ? Le résultat est que dautres joueurs (y compris ceux qui furent jadis ses alliés obéissants) le défient ouvertement, sans vergogne et sans risquer de sanction, diminuant ce faisant encore son pouvoir.
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Barack Obama se concentre sur sa réélection. Il a de bonnes chances dy parvenir. Les Républicains dérivent de plus en plus à droite et, politiquement, il ne fait plus guère de doute quils vont trop loin. Mais une fois réélu, le président des Etats-Unis aura encore moins de pouvoir quaujourdhui. Le monde avance dun pas rapide. Dans un monde caractérisé par autant dincertitudes et dacteurs imprévisibles, l« élément incontrôlable » (« loose gun »] le plus dangereux se révèle être les Etats-Unis.
Immanuel Wallerstein
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