Christian Steiner
04/04/2010
Tout dabord merci pour votre initiative de dialogue et douverture, qui me semble ne pouvoir être que salutaire aujourdhui, dans une perspective de réflexion et de salut commun (dans la perspective aussi de ce quaucun ne nommait « lintellectuel collectif »? et dont le dialogue entre Philippe Grasset et Jean-Paul Baquiast est la base dun noyau possible).
Merci pour le texte de P.G., où il prend une fois encore la peine de présenter sa « thèse », son intuition, sa démarche de manière rigoureuse et claire, élégante et plaisante (malgré la gravité du sujet ou à cause ?) et, je trouve, entraînante.
Mais au but. Bien que vous suivant sur lessentiel, jai néanmoins envie de réagir à la logique de lavant avant dernier paragraphe (« Mais le processus est à double sens »).
La question est :
Comment la psychologie pervertie et/ou influencée par le système, comment cette psychologie que vous décrivez et jy souscrit comme touchée dans son intégrité même jusquà ce que « la pensée favorable au système ( ) lui apparaisse à lui-même, comme un produit naturel de sa propre réflexion entièrement autonome et nourrie à une connaissance quil maîtrise », comment cette psychologie-là, touchée dans ce qui fait sa perception, ce qui fait sa personnalité, peut-elle « retrouver les composantes de ce qui peut devenir une pensée de résistance et de révolte » ?
Votre argument est que, perméable au formidable flux dinformation daujourdhui, elle peut en arriver au constat quelle est sous influence et agressée. Mais cela répond-t-il à la question de savoir comment une psychologie sous influence en arrive soudain à se former un jugement lautorisant à se percevoir comme sous influence et, plus crucial encore, à ressentir la nécessité de réagir à cela ? (linterpréter comme une agression insupportable) ?
Je pense et là jen appellerai aussi à ma subjectivité, à mon expérience personnelle, à lobservation de mon vécu et de celui de mes proches , que pour passer du constat de cette influence, de « cette usurpation » de notre psychologie par le système, à « la pensée de résistance » (et laction, et le comportement qui en sont la preuve), il faut un choc profond, un choc psychologique (affectif, existentiel), quelque chose comme une crise existentielle, une crise tellement grave quelle menace lindividu « dans sa substance » pour le dire rapidement, dans son identité, dans son image de soi, dans ce qui a fait sa vie jusqualors, et loblige à parer au plus pressé, écarter laccessoire et aller directement à lessentiel, au vital, et trancher.
Il serait donc pour moi moins question de constat que de choc, de crise personnelle forçant à la guérison, au sauvetage de soi, et de la recomposition du regard en profondeur que cela nécessite (donc de recomposition des priorités). Moins question daccès à linformation ou de constat quà ce que nous faisons avec ce dont nous disposons (constat, expérience) et pour quoi, dans quel but, à quel fin
jc
14/01/2017
"On sait que vers l'âge de dix-huit mois, le nouveau-né commence son babillage; il prend conscience de ses possibilités articulatoires et -disent les spécialistes- forme à cette époque les phonèmes de toutes les langues du monde. Les parents lui répondent dans leur propre langue, et, peu de temps après, le bébé n'émet plus que les phonèmes de cette langue, dont quelques mois plus tard, il maîtrisera le vocabulaire et la syntaxe. Je verrais volontiers dans le mathématicien un perpétuel nouveau-né qui babille devant la nature; seuls ceux qui savent écouter la réponse de Mère Nature arriveront plus tard à ouvrir le dialogue avec elle, et à maîtriser une nouvelle langue. Les autres ne feront que babiller, bourdonner dans le vide -bombinans in vacuo."
René Thom
Modèles mathématiques de la morphogénèse, 10-18 (1974)
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