Léon Chibolet
27/02/2012
La conférence des “amis de la Syrie” en Tunisie était une foire crépusculaire et abjecte car l’affaire était “pliée”: pas question pour les américains de livrer des armes et de permettre des interventions étrangères. Opportunément, on s’est rappelé que l’armée syrienne est la deuxième puissance militaire arabe après celle de l’Egypte et que 90% des officiers sont alaouites, donc pas de défections massives à attendre. En tout cas, face à
une tentative redoutable de déstabilisation, elle a maintenu sa cohésion.
Mais malgré le caractère ubuesque de cette démonstration “amicale”, quelques événements importants ont eu lieu; ils concernent des alliances fortes bien que relevant en apparence des hybridations entre les carpes et les lapins.
Voici l’affaire qui commence par quelques rappels sur un acteur discret, l’émir du Qatar à propos duquel on a vu se préciser ses engagements, non pas grâce à ses propres confidences mais à cause de celles de ses obligés.
Il est en effet multimilliardaire, par la grâce de son père…
Il a du reste organisé un coup d’état contre lui en 2005; le Qatar est donc dirigé par cet émir, Hamad bin Khalifa Al Thani, qui a pris les commandes du pays en renversant son papa, Khalifa bin Hamad Al Thani, en 1995, alors que celui-ci était en vacances en Suisse.
Le nouveau président de la Tunisie, Moncef Marzouki, qui a été mis en place par le responsable du parti des frères musulmans Ennahda a tenu à remercier chaleureusement le Qatar et son émir pour l’aide apportée aux événements en Tunisie et à son parti.. Il a fait cette annonce au cours de la conférence « des amis de la Syrie », le vendredi 24 février 2012, conférence organisée par la Tunisie avec l’argent de l’émir.
Retenons au passage que le responsable “charismatique” du parti Ennadha s’appelle Rached Ghannouchi, militant reconnu depuis longtemps mais qui a pris depuis peu un certain nombre de virages, surtout depuis sa visite aux USA au cours de laquelle il a rencontré longuement des diri- geants de l’AIPAC, la grande organisation sioniste améri- caine dont l’impact politique dans le système américain est considérable.
Les remerciements chaleureux du président Marzouki viennent conforter quelques analyses qui restaient encore confidentielles mais qui se dévoilent peu à peu grâce aux engagements et confidences de Marzouki. L’aide financière et logistique du Qatar a certes permis une victoire écrasante d’Ennahda en Tunisie mais aussi et surtout la victoire des insurgés de Benghazi sur le pouvoir tenu par Kadhafi.
C’est en effet avec l’aide militaire de l’OTAN et des troupes mercenaires payées par le Qatar (5 à 8000 hommes?!), que cette prise de pouvoir a pu se mettre en place; d’autant plus que les USA entretiennent une base à el-Oudeid, proche de Doha, leur principale base aérienne dans la région sur laquelle se trouve prépositionnés quelques 120 chasseurs bombardiers F-16 et divers autres aéronefs de combat.Cest à partir dEl Oudeid que les E-U ont en mars 2003bombardé lIrak. “Le Qatar est donc, à ce titre et de toute évidence, un État de première ligne dans la stratégie de conquête et
suprématie holistique conduite depuis 1991 par les USA”.
Il est clair qu’il existe une fraternité importante entre la Lybie du CNL, Ennhada,le parti tunisien au pouvoir et le Qatar.Faut-il ajouter que cette offensive qatari au Maghreb ne s’arrête pas là et que l’Algérie est maintenant aux premières loges. En tout cas, Abassi Madani, le fondateur du FIS vit depuis 2003 à Doha et est reçu souvent au palais.
C’est dans ce contexte que l’on commence à comprendre l’engagement de Marzouki et surtout de son marionnettiste, Rached Ghannouchi, en faveur des rebelles syriens sunnites et l’insolence de sa proposition moqueuse proposant d’envoyer la famille Assad, une fois amnistiée, en Russie; quelle assurance chez lui, ce tout petit bonhomme venant d’arriver au pouvoir.
Faut-il ajouter qu’en quelques mois, ce parti et son président se sont mis à dos le plus grand syndicat tunisien, l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) ainsi que beaucoup, beaucoup d’autres citoyens tunisiens.
Ces prises de position arrogantes cachent en réalité, non seulement le soutien de l’émir mais aussi le soutien des USA. Tout cela implique la présence d’alliances de plus en plus évidentes entre les frères musulmans et les nouvelles
politiques US, grâce à l’entregent de l’émir et surtout, grâce à son argent.
Ces liens ne sont du reste pas nouveaux et les soutiens américains à al Qaïda n’ont jamais manqué.
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