Flumserberg
30/12/2009
On assiste, depuis le début des années Bush, au procès systématique de l’interventionnisme US.
Si la démarche est fondée (le chaos étant la résultante de toutes les campagnes US), en revanche il y a méprise sur l’analyse des objectifs et intentions des administrations américaines successives : car contrairement aux apparences, les Américains NE SONT PAS “des ignorants des régions où ils s’engagent, avec des conceptions à courte vue”. Au risque de surprendre ici, on peut affirmer que la politique US n’a jamais cessé d’être cohérente -et est restée fidèle “à son esprit”.
En effet, depuis 1977, la politique étrangère US n’a pas varié d’un pouce : il s’agit, depuis Carter, de dé-structurer les systèmes régionaux et de casser les équilibres entre puissances pour mieux contrôler l’environnement géopolitique. Cette stratégie a été conçue par Brzezinski (théorie de “l’Arc de crise” = conflit+balkanisation+réorganisation (ultérieure) sous contrôle US ) et a été recyclée fidèlement depuis.
Quelques rappels (outre l’Afghanistan, évoqué par le maître lui-même) :
- les Etats-Unis sont à l’origine du succès de la révolution islamique en Iran. Pour faire bref : en 1978, l’Iran est une super-puissance régionale en dévenir, bastion de stabilité, à la pointe de la technologie (rafineries), co-fondatrice de l’Opep, et qui refuse le sur-armement proposé par Washington. Rien qui ne convienne aux stratèges US.
(Le résultat est malgré tout un désastre pour les Etats-Unis, les islamo-progressistes (soutenus par Washington) étant finalement éjectés du processus révolutionnaire par les mollahs)
- Plus récemment : sous couvert de projet de “moyen-orient démocratique”, les Etats-Unis ont imposé des élections libres en Palestine. Les médias n’ont cessé de tourner en ridicule les Américains, pour leur incapacité à prévoir la montée en puissance du Hamas.
Mais qui peut croire un instant que les stratèges US n’aient pas su qu’un processus électoral offert à un peuple de réfugiés victime des pires conditions de vie depuis un demi-siècle n’aboutirait pas à la victoire de la faction la plus radicale de ses représentants ?
- Les mêmes médias ont continué de tourner en ridicule les Américains pour leur contribution à l’émergence des Chiites en Irak. Or, la situation politique en Irak aujourd’hui (un fédéralisme qui n’est rien d’autre qu’une balkanisation, avec un Kurdistan producteur de pétrole échappant à l’Opep) est un schéma qui convient parfaitement aux Etats-Unis. Ces derniers s’opposent de longue date à la main-mise sunnite sur le monde arabe et l’Opep (voir les réactions de Riyad à la politique iranienne des Etats-Unis depuis 2003)
...d’autres exemples pourraient encore être évoqués (Pakistan et le “lâchage” de Musharraf ; Iran et la recherche d’un “deal” politique avec les mollahs).
En ce sens donc, et uniquement en celui-ci, la “...politique US est manipulatrice et agressive” (Ph.Grasset). On pourrait ajouter calculatrice et machiavelique. Ce constat n’a jamais été aussi vrai depuis le retour en force de la Russie en Asie centrale.
Contrairement aux apparences, il n’est question ici ni d’anti-américanisme, ni d’une nouvelle déclinaison de la théorie du complot -mais d’analyse des faits tels qu’ils sont.
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