Christian Feugnet
19/10/2015
Ce texte est extrémemement riche , presque chaque phrase incite à une réflexion approfondie .
Une thése cependant m'incite à la perplexité , c'est le commune entre langue Russe et Français , parce que je juge qu'elles sont à l'opposé , mais peut étre est ce par là qu'elles se rejoignent . Le Russe est confondant , considéré comme langue Indo-Européenne restée archaique , par la multitudes des cas qu'elle essaie de saisir , le nombre de déclinaisons , tout d'abord , bien plus élévés qu'en Latin ou Allemand ., mais aussi par la syntaxe , on peut placer les mots selon leurs fonctions selon pratiquement toutes les combinaisons possibles , selon la connotation qu'on veut donner à la phrase .
Je dirais que c'est une langue qui s'efforce d'étre synthétique , formellement en essayant de rendre compte , de toutes les situations possibles pour le sujet .
Au contraire le Français se dépouille , à mon avis pour , inventer et placer au centre le Je , ( prétention chauvine , je pense que c'est en France qu'est né le Je ) , quite à faire des phrases de plus en plus longues et complexes , l'approche est analytique , sans espoir d'épuiser le sujet .
Christian Feugnet
19/10/2015
Pour faire bien sentir la question . César , dit en franchissant le Rubicon , tous César qu'il est et qui a décidé , Veni , vedi , vici . Litteralement c'est il est venu , il a vu , il a vaincu . Qu'est ce qui se passe , là ?
Tout empereur qu'il projette d'étre , de forcer le destin du monde , comme dernier Aristocrate représentant la plébe , Romaine de chez Romaine , il parle de lui à la troisiéme personne . Il se vit comme un membre des Cornélius , derniers rescapés , des purs Aristocrates Romains , épargnés , par miracle ou faiblesse par Sylla , incarnation de la vulgarité , déchainement de la matiére . ( je pense aux Bush (s) là ) . Pas comme Personne , comme membre d'une tribu , famille au sens large .
Les Normands , ex -vikings , çà voud fait le méme effet , quand vous les abordez , qui vous connaissent pas et qu'ils vous disent 'Qu'est ce qu'il veut,? ' , slors que vous n'étes pas 'il' , vous étes 'moi' , face à un autre 'moi' . Ben ! çà je dis que c'est la culture Occidentale , qui est née dans le Nord de la France , à l'interface avec les Flamands , Saxons , élite Saxonne exilée là par Charlemagne ,( méme les Belges le savent pas) , et Vikings . Premiére libération du Serf , qui dit enfin : 'Je ' . Je vois çà comme çà , la situation du Serf a changé , il choisit son épouse et sa terre , c'est le fait qui modifie l'esprit et la langue .
jc
21/02/2021
Je suis retombé sur cet article en lisant https://www.dedefensa.org/article/shakespeare-moliere-en-un-acte-metaphysique. Je l'avais déjà parcouru sans y rien trouver à commenter. Mais aujourd'hui, derrière les métaphores cuirassier et chevau-léger ("Le chevau-léger tourne, le cuirassier charge. Sans doute sont-ils tous les deux nécessaires…"), je devine les concepts de structure et de fonction du langage, ce qui me fournit un point d'entrée pour commenter ici (Il suffit d'un mot, d'une phrase, d'une métaphore…).
Thom (who else en ce qui me concerne) fait de l'opposition structure/fonction la colonne vertébrale de son essai de théorisation de la biologie (1); ce qui incite à tenter de faire de cette même opposition la colonne vertébrale de la théorisation de la linguistique, puisqu'il y a pour lui une profonde analogie "sémantiquement acceptable" entre biologie et linguistique (2).
Thom est convaincu que "le langage, ce dépositaire du savoir ancestral de notre espèce, contient dans sa structure les clés de l'éternelle structure de l'Être" et que la structure du langage a une origine géométrique. Il associe ainsi des singularités instables (catastrophes élémentaires) à certains verbes "fondamentaux", singularités qui se stabilisent en se déployant, ce déploiement se manifestant en linguistique par l'adjonction de substantifs (4) : c'est le verbe qui se fait chair… (5)
En ce qui concerne la fonction du langage, Thom considère qu'elle est liée à un double contrainte (6) : "La première contrainte répond au besoin de virtualiser la prédation. L'homme en éveil ne peut, comme le nourrisson de neuf mois, passer son existence à saisir les objets pour les mettre en bouche. Il a mieux à faire: aussi va-t-il "penser" c'est-à-dire saisir des êtres intermédiaires entre les objets extérieurs et les formes génétiques: les concepts. La seconde contrainte exprime la nécessité pour le groupe social de transmettre rapidement les informations nécessaires à sa survie (présence au voisinage de proies, d'ennemis, etc.)."
Il me semble que le nominalisme (cf. la célèbre querelle des universaux initiée par Porphyre) suffit pour réaliser la seconde contrainte, alors que le réalisme est nécessaire pour la première. Pour moi l'abandon moderne du réalisme logocratique au profit du seul nominalisme -je préfère le terme de conventionnalisme- est une rupture catastrophique (au sens usuel du terme) qui conduit tout droit au matérialisme mécaniste du XIXème siècle (et à celui naissant dans la seconde moitié du XXème siècle, les langages informatiques ne pouvant être que conventionnels). Cette rupture catastrophique m'apparaît nettement dans la citation de Kara Morza, via Vladimir Volkoff.
La théorie thomienne, qui nécessite de revenir au réalisme platonicien des idées, permet, je crois, d'envisager un matérialisme du XXIème siècle qui serait vitaliste, voire animiste (Et la chair s'est faite verbe…); car les singularités qui donnent naissance aux verbes ne naissent pas spontanément, elles apparaissent comme des défauts d'un continu cherchant à s'invaginer dans lui-même (en 1D seuls les points pli, en 2D les lignes de pli, les points croisement de deux lignes de pli et les points fronce, en 3D…) : "Hydre absolue, ivre de ta chair bleue, qui te remords l'étincelante queue".
"Et le verbe s'est fait chair ou "Et la chair s'est faite verbe" ? Dans "La Grâce de l'Histoire" PhG cite Daniel Rops à plusieurs reprises (à propos du "Balzac" de Rodin) : "Dans cette lutte prodigieuse entre la matière rétive et la volonté créatrice". Il y en a, je crois, pour tous les goûts…
(1) Cf. "Structure et fonction en biologie aristotélicienne" (AL), article à propos duquel il écrit dans le "chapeau" (1990) : "C'est probablement l'un des exposés les plus complets du programme de constitution d'une biologie théorique."
(2) Par exemple typique l'analogie endoderme-mésoderme-ectoderme/sujet-verbe-objet.
(3) Cf. la vidéo-testament "La théorie des catastrophes" avec Émile Noël de 28'40 à 32'30.
(4) SSM, 2ème ed., p.312.
(5) "La mitose cellulaire, la procréation qui réalisent le projet peuvent être vues comme des projections du sémantique dans le spatial: Et le verbe s'est fait chair!" (SSM, 2ème ed., p.295.
(6) SSM, 2ème ed., p.309.
jc
05/10/2021
Je poste ici à la suite d'une interview parue dans Front populaire de Michel Onfray et Stéphane Simon intitulée "Alain de Benoist: "C'est la notion même de vérité qui s'efface". Je poste ici après une recherche de l'occurence vérité et réalité via le moteur de recherche du site, et m'arrête à cet article parce que le "situation" de "vérité de situation" renvoie pour moi à "situs" puis à "analysis situs" qui anciennement désignait en mathématiques ce qu'on désigne maintenant par topologie. Car ce qui m'intéresse ici c'est le rapport de la vérité à la réalité.
Depuis plus de cinq ans que je fréquente ce site (sans me lasser) je crois que le nombre de fois où PhG débusque la réalité -la vérité de situation- derrière la narrative -la vérité selon une logique humaine pervertie- est presque innombrable tellement il est grand.
Dans ce qui suit mon propos est d'argumenter la modification du titre en "Dorénavant la notion de vérité s'efface -sans disparaître- au second plan, laissant apparaître au premier plan la réalité". Sans être certain d'avoir bien compris la métaphore des chevaux (léger et cuirassiers), j'associe spontanément le topos de topologie à cuirassier et le logos à léger. C'est comme ça, au flair, que j'interprète le dernier paragraphe :
"Le chevau-léger s’en tire toujours par une pirouette tandis que le cuirassier poursuit sa course effrénée. Le chevau-léger tourne, le cuirassier charge. Sans doute sont-ils tous les deux nécessaires, et un peu fous bien entendu. (C’est la pirouette dont je parlais.)"
C'est pour moi un bouleversement considérable dans la façon de penser occidentale depuis Aristote car la rationalité "logique" des Lumières s'efface devant une nouvelle rationalité topo-logique. Les philosophes belges Dominique Lambert et Bertrand Hespel ont annoncé depuis quelques temps déjà ce bouleversement dans un article paru en 2012 intitulé "De la logique de la contradiction à la topologie de la conciliation" (*), dont l'introduction et la conclusion sont lisibles par les non scientifiques. Ils montrent comment surmonter l'abandon du principe de non contradiction, principe qui semble devoir être abandonné si on veut, parmi bien d'autres, comprendre le comportement du chat de Schrödinger et du chat de Thom. (DL et BH ne parlent pas de Thom. Thom qui, lui va encore plus loin que la topo-logique, à savoir la morpho-logique et l'embryo-logique, et ce depuis beaucoup plus longtemps que DL et BH, puisque ça remonte au milieu des années 1960.)
J'ai rappelé plus haut que le pape François a édicté pour l'Église catholique le nouveau principe "La réalité est supérieure à l'idée" qui, selon moi, s'oppose presque frontalement à "Et le Verbe s'est fait chair" (**), nouveau principe que, dans le cadre ci-dessus je reformule: "La réalité topo-logique (voire embryo-logique) est supérieure à la vérité logique". Pour moi, de quoi lire ou relire l'encyclique "Laudato si" avec ça en tête, ou plancher sur une encyclique Fides et ratio.1.
En reparcourant les commentaires de cet article je constate que ce principe franciscain me taraude depuis un certain temps. En fait tout ce que j'ai écrit ci-dessus je le ressasse depuis longtemps et ai fait ici de nombreux commentaires souvent décousus à ce sujet. Celui-ci me paraît moins décousu, plus achevé et, le dernier mais pas le moindre, dans le droit fil du sujet qui intéresse ici Alain de Benoist.
(*) https://www.qwant.com/?q=laLambert+hespel+topologie+conciliation+logique+contradiction&t=w/
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ENTRETIEN paru dans le e-journal de Front Populaire.
L’essayiste Alain de Benoist fait le pari du temps long, de la mise en perspective, du contexte et du recul critique. Autant de rouages salutaires pour espérer gripper la grande lessiveuse de l’information instantanée. Nous l’avons interrogé pour son livre d’entretiens avec Nicolas Gauthier, Survivre à la désinformation (éd. La Nouvelle librairie).
Alain de Benoist : "C’est la notion même de vérité qui s’efface"
Front populaire : La constatation de fond qui préside à votre livre est que « trop d’information tue l’information ». Pouvez-vous nous expliquer ce paradoxe ?
Alain de Benoist : Cela n’a rien de paradoxal. Trop d’images banalise l’image, trop d’informations tue l’information. On est là devant un exemple typique de contre-productivité telle qu’Ivan Illich a pu la décrire : la voiture est censée permettre de nous déplacer plus vite, mais quand il y a trop de voitures personne n’avance plus dans les embouteillages. Dans une optique voisine, rappelez-vous de ce qu’Alexandre Soljénitsyne disait à sa sortie d’Union soviétique dans son célèbre discours de Harvard : « Je viens d’un pays où on ne pouvait rien dire, et j’arrive dans un pays où on peut tout dire – mais où ça ne sert à rien ».
La profusion d’informations nuit à la compréhension. On en a un exemple frappant avec l’actuelle crise sanitaire : nous avons entendu depuis deux ans des milliers d’informations et d’opinions, généralement contradictoires (y compris entre spécialistes), et en fin de compte personne n’y comprend plus rien. Au trop plein s’ajoute encore l’impossibilité de hiérarchiser les informations selon leur importance. Dans la presse écrite, on peut encore présumer qu’un événement rapporté en première page est plus important qu’un événement signalé en page 23 (mais même là il y a des exceptions). La télévision, elle, hiérarchise selon les critères qui lui sont propres : elle préfère toujours mettre en vedette des informations à fort contenu émotionnel, lacrymal ou spectaculaire, même si leur importance réelle est à peu près nulle. Enfin, sur Internet et sur les réseaux sociaux, c’est le brouillage total.
FP : Vous expliquez que le métier de journaliste demande l’humilité alors qu’il y règne plutôt un surcroît de prétention. Comment définiriez-vous le rôle d’un journaliste ?
ADB : J’ai bien conscience que répondre à cette question relèverait avant tout du wishful thinking. La plupart des journalistes sont des gens qui ont entendu parler de tout, mais qui ne connaissent rien. Ils forment une caste tournée vers elle-même, à qui l’esprit critique fait défaut parce qu’ils sont sous l’influence de l’idéologie dominante (qui est toujours l’idéologie de la classe dominante). De surcroît, ils vivent dans l’immédiateté : la nécessité d’« informer » au plus vite leur interdit le recul nécessaire à la réflexion. C’est pour cela que les esprits libres sont extrêmement rares parmi eux et qu’ils pratiquent abondamment l’autocensure.
La grande nouveauté en matière de censure est que celle-ci ne provient plus fondamentalement de l’Etat, traditionnellement chargé de veiller à l’ordre public et aux « bonnes mœurs », mais des médias eux-mêmes, qui forment la principale caisse de résonance du politiquement correct et sont les premiers à organiser les chasses aux sorcières contre ceux de leurs confrères qui tentent d’aller à contre-courant. Les médias jouaient autrefois un rôle de contre-pouvoir. Ils sont aujourd’hui le relais sinon le moteur des nouvelles censures. C’est un changement radical, dont beaucoup n’ont pas encore pris conscience.
FP : La révolution numérique a permis de faire sauter la chape de plomb du journalisme institutionnel, et vous y voyez plutôt un progrès. La « réinfosphère » et « l’info dissidente » doivent-elles pour autant être prises pour argent comptant ?
ADB : Je me félicite de voir fleurir des sources d’« info alternative ». Le problème est qu’il ne suffit pas d’aller à l’encontre du « discours officiel » pour être de ce seul fait plus crédible. La « réinformation » se pose en contraire de la désinformation, mais elle peut être aussi bien être une désinformation en sens contraire. Bien des sites « conspirationnistes » en témoignent.
FP : Le double phénomène de surabondance de l’information et de multiplication des canaux de transmissions n’entraîne-t-il pas une horizontalité des points de vue et un relativisme généralisé ? Est-ce qu’on appelle désormais la « post-vérité » ?
ADB : Oui bien sûr, mais le problème est en réalité plus grave. C’est la notion même de vérité qui s’efface, d’abord parce que dans les débats actuels, on ne s’intéresse plus à ce qui est vrai et à ce qui est faux, mais à ce qui est ou non conforme au « bien » tel que le définit l’idéologie dominante (c’est l’« empire du Bien » dont parlait Philippe Murray), ensuite parce que le réel disparaît de plus en plus par rapport au virtuel et au simulacre. Je renvoie ici aux travaux de Jean Baudrillard, mais aussi à ce que disait Guy Debord : « Dans le monde actuel, le vrai n’est plus qu’un moment du faux ». C’est cet écart au réel que les gens constatent lorsqu’ils confrontent ce qu’ils voient autour d’eux tous les jours et ce qu’en disent les médias. On ne peut donc pas s’étonner que la défiance dont font l’objet les hommes politiques, les partis, les institutions, et les « experts » en tous genres, se double désormais d’une défiance gravissime à l’égard des médias.
FP : Chacun reconnaît qu’un citoyen éclairé doit pouvoir s’informer convenablement pour penser le monde qui l’entoure. Or, est-ce encore possible lorsque faire le tri et prendre du recul devient un parcours du combattant méthodologique ?
ADB : Le « citoyen éclairé » censé pouvoir s’informer convenablement et rationnellement fait partie de la mythologie issue de la philosophie des Lumières, au même titre que les « choix éclairés » du consommateur, les vertus supposées de la « concurrence pure et parfaite », la « vérité du marché » et autres calembredaines. L’homme n’est pas pure raison. Il y a toujours en lui une part d’irrationnel, qui tend à faire primer la réaction immédiate sur la réflexion. Raison de plus pour l’aider à y voir plus clair, y compris en lui-même !
jc
07/10/2021
[Complément à Vérité et réalité.
1. En maths le passage de la géométrie 2D ou 3D à l'algèbre est une stylisation (on s'exprime par signes -sonores ou visuels- en prononçant ou écrivant des mots les uns après les autres), donc un allègement qui tente d'exprimer en 1D l'essentiel d'un paysage plus complexe puisque multidimensionnel. Exprimer n'allant pas sans comprimer, sauver l'essentiel exige de la finesse. Esprit de finesse: chevau-léger, logocrate(?), esprit de géométrie: cuirassier, topocrate (?).
2. Pour moi le "supérieur" du franciscain "la réalité est supérieure à l'idée" doit être lu comme "antérieur" : la réalité précède ontologiquement la vérité, elle est première par rapport à la vérité (qui passe au second plan).]
Je remue ici les idées qui suivent depuis longtemps. L'idée de ce commentaire et de son titre m'est venue de l'audio-vision de la conférence du philosophe-mathématicien Olivier Rey intitulée " Quand le monde s'est fait nombre" dans laquelle il dit (à 37'25):
"Maintenant je suis très gêné par cette utilisation tous azimuts du mot société, en particulier en anthropologie et en ethnologie, où on va parler des sociétés primitives et où finalement, par le seul usage de ce mot, on projette sur ces mondes-là des catégories qui n'y ont absolument pas cours [ici la communauté] et on gomme complètement, justement, la grande différence qu'il y a entre la forme communautaire et la forme sociale des groupements humains.".
Un changement de catégories implique un changement de vision du monde, un changement de paradigme (typiquement, dans le cas considéré par Rey, un passage du communautarisme à l'individualisme -il précise que le latin individuum est la traduction du grec atomos).
Guénon s'appuie sur les catégories d'Aristote pour qui la catégorie première, antérieure à toutes les autres, est la substance (ulè) (traduite en français par matière, traduction malheureuse selon RG). Dans "Le règne de la quantité..." RG distingue la quantité continue -l'étendue cartésienne- et la quantité discrète, qu'il assimile au nombre (chap. II): "la quantité se présente à nous sous des modes divers, et, notamment, il y a la quantité discontinue, qui est proprement le nombre, et la quantité continue, qui est représentée principalement par les grandeurs d’ordre spatial et temporel . (...) Descartes, qui se trouve au point de départ d’une bonne partie des conceptions philosophiques et scientifiques spécifiquement modernes, a voulu définir la matière par l’étendue.".
Ce que Descartes a voulu faire, Thom l'a fait :
"Pour moi, l’aporie fondamentale de la mathématique est bien dans l’opposition discret-continu. Et cette aporie domine en même temps toute
la pensée." ;
"Il est curieux de voir comment Aristote a ostracisé le concept d’espace, en lui substituant, pour les besoins de sa métaphysique substantialiste, un « lieu » attaché à chaque entité. Cette exclusion de l’étendue — qui a eu, il faut le reconnaître, sur les origines de la Mécanique des effets assez désastreux — n’en a pas moins eu des conséquences heureuses. Car en dévalorisant l’étendue spatiale, Aristote a, par compensation, pensé tous les problèmes des entités mentales sous la catégorie du continu. Il est sans doute permis d’interpréter l’aristotélisme comme une lente reconquête — une réappropriation — de l’espace qu’on s’était par force empêché de voir
au départ."
"Il me semble qu’il y a au cœur de l’aristotélisme un conflit latent (et permanent) entre un Aristote logicien, rhéteur (voire même sophiste, quand il critique Platon et les Anciens) et un Aristote intuitif, phénoménologue, et topologue quasiment malgré lui. C’est avec ce second Aristote (passablement méconnu) que je travaille, et j’ai tendance à oublier le premier. Il a espéré faire la jonction à l’aide du concept de séparation, fondamental dans sa Métaphysique."
"(...) reste l’opposition Platon-Aristote. En dépit de mon admiration pour ce dernier, je reste platonicien en ce que je crois à l’existence séparée (« autonome ») des entités mathématiques, étant entendu qu’il s’agit là d’une région ontologique différente de la « réalité usuelle » (matérielle) du monde perçu. (C’est le rôle du continu — de l’étendue — que d’assurer la
transition entre les deux régions.)".
(Il est très clair pour Thom que le continu est l'être premier, être qui précède ontologiquement le discret. Seul un penseur du continu peut penser le mouvement et résoudre les paradoxes de Zénon, et, a fortiori, seul il peut penser le changement. (Il faudrait relire attentivement ce que dit RG à ce sujet dans "Principes du calcul infinitésimal"). Pour Thom ce qu'on perçoit visuellement (en 2D ou 3D) ou auditivement ce sont avant tout les singularités. Pour lui les mots sont des singularités logologiques (néologisme maison) qui reflètent ces singularités topologiques.)
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