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Article : Malaparte postmoderne

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Ukraine

Jean-Paul de Beauchêne

  07/12/2004

Bien sûr, vous avez totalement raison. Merci de nous donner des références précises d’une intervention à la fois évidente et masquée. On sait depuis Tocqueville que les Russes sont un adversaire potentiel majeur des Etats-Unis, et vous-même, si j’ai bonne mémoire, rappeliez cette confidence du Président des Etats-Unis à je ne sais plus qui en 1944 que le programme nucléaire états-unien était dirigé plus contre les Russes que contre les Allemands. Les Etats-Unis ont un intérêt stratégique évident à contrôler toute la ceinture sud de la Russie – on parle même de groupes AKKU ou similaires – à la fois pour affaiblir la Russie et contrôler les pétroles de Bakou. L’alliance turque est là erssentielle, c’est pourquoi l’Union européenne, aux ordres, va déclarer son adhésion recevable. Et plus l’Europe sera disparate, plus elle pourra devenir cette zone de libre échange aux règles unifiées et permissives favorable à la liberté du commerce… états-unien, bien sûr.
What next ? (en langue-poubelle) On parlait autrefois de la Sibérie. Des organes de presse bien-pensants avaient même fait paraître des cartes du monnayage de la Russie avec des républiques indépendantes de l’Oural (Iekaterinbourg) ; de Sibérie centrale (Novossibirsk) et de Siberie orientale (Vladivostok), avec peut-être aussi un morceau autour de Krasnoïasrk. On n’en parle plus. Peut-être que des néo-cons moins « inward-looking » que les autres ont compris que ce n’était pas si facile et que ce serait un cadeau facile pour les Chinois, suffisamment dangereux comme cela par ailleurs.
Pour en revenir à l’Ukraine – mot qui signifie « au bord de… » soit « marches » - berceau de la Russie, la Kievskaïa Rus’ des Xe – XIIIe S., appelée aux XVIIe et XVIIIe S. la Petite Russie, la leçon que je tire du deuxième tour est que, même si les fraudes ont été importantes, presque une moitié des électeurs ont voté pour le candidat du rapprochement avec la Russie, et que les idées dites pro-occidentales ne provoquent pas le raz-de-marée d’opposition que l’on décrit.
J’ai la faiblesse de lire « le Figaro » et d’avoior rencontré leur correspondant à Moscou, Laure Mandeville. Je ne sais pas comment ils l’ont choisi, ni ce qui la pousse à cela, mais elle ne peut pas écrire trois lignes ni dire dix mots sur la Russie sans la critiquer et la vilipender, ainsi que son gouvernement, donc Poutine. J’ai eu l’occasion de l’entendre à un colloque où intervenaient également d’autres spécialistes comme Hélène Carrère d’Encausses et Jacques Sapir, aussi connaisseurs et beaucoup plus positifs s’ils n’ignorent pas les difficultés : Le contraste était frappant. Quand à la spécialiste des questions russes et ukrainiennes au ministère de la défense, comme son nom ne l’indique pas, elle a des origines d’Ukraine de l’ouest et j’ai des doutes sur son objectivité.
Comme chacun sait, le cœur de l’opposition à la Russie vient non pas de la partie qui connaît le mieux la Russie, mais au contraire de la partie qui fut polono-lituanienne, qui ne fut pas incluse dans le traité de Pereïaslav de 1654 d’union avec la Russie et qui fut austro-hongroise des années 1760 à 1945. Lvov, ou Lviv, s’appelait alors Lemberg. Donc le rejet de l’alliance russe ne vient pas de ceux qui ont le plus d’expérience de l’union avec la Russie. On ne sait même pas qui des Ukrainiens de l’est ou de l’ouest a le plus souffert des allers et retours de la politique de Staline envers l’Ukraine, rendant la langue ukrainienne, définie et fixée à cette occasion, tour à tour obligatoire, puis interdite. Quand à la famine organisée, elle venait peut-être surtout du fait que c’étaient les terres à blé les plus riches et que le pouvoir soviétique a d’autant plus fort tiré dessus pour l’approvisionnement de la capitale au moment de la collectivisation des terres et de l’élimination des koulaks.
Tout cela est fort complexe. Quand j’ai visité Kiev pour la première fois en 1967, notre groupe (promo de Sup’Aéro) a eu droit à une séance folklorique avec publicité pour la spécificité d’une Ukraine jumelle de la France par sa taille et sa population, et chansons en ukrainien. Le tout présenté en russe et en français.
Compte tenu de la position géographique et historique de la province de Lvov/Lviv, j’aurais tendance à regarder de plus près le rôle que pourraient jouer les services et autres faux-nez culturels polonais et allemands, en symbiose bien sûr avec les services états-uniens.