Franck du Faubourg
24/06/2019
On ne sait jamais; ça peut servir!
https://www.armstrongeconomics.com/future-forecasts/ecm/the-next-8-6-year-wave-will-be-inflationary/
jc
23/06/2019
C'est un thème qui m'accompagne presque constamment, sur lequel je reviens de temps à autres dans mes commentaires¹ sur mon divan psychanalytique unique et préféré, à savoir ce site. En conclusion de l'article du jour PhG revient sur la conception de la légitimité et de la souveraineté selon Talleyrand et renvoie à ce propos à un article ancien "Éloge et nécessité de la légitimité". (Je devrais plus souvent penser à actionner le moteur de recherche du site.)
Selon moi Bonaparte était un homme d'action, un esprit de géométrie, qui s'occupait vraisemblablement plus de légalité que de légitimité, alors que Talleyrand était un esprit de finesse.
(Lorsque Emmanuel Macron a été élu président de la République et a annoncé aussitôt qu'il gouvernerait par ordonnance, j'ai tout de suite pensé, jugement conforté par son attitude pendant la campagne, qu'il serait un président légal mais un président illégitime².)
En maths l'opposition légalité/légitimité se retrouve dans l'opposition algèbre/géométrie. Thom:
1: "C'est parce que la mathématique débouche sur l'espace qu'elle échappe au décollage sémantique créé par l'automatisme des opérations algébriques."
2: "Il y a une certaine opposition entre géométrie et algèbre. Le matériau fondamental de la géométrie, de la rétique"topologie, c'est le continu géométrique: étendue pure, instructurée, c'est une notion "mystique" par excellence. L'algèbre, au contraire, témoigne d'une attitude opératoire fondamentalement "diaïrétique". Les topologues sont les enfants de la nuit; les algébristes manient le couteau de la rigueur dans une parfaite clarté."
(Je cite régulièrement (1) sur ce site dès qu'il est question du JSF (décollage…). Il y a pour moi un rapport certain entre légalité et légitimité d'une part et intelligence artificielle et intelligence naturelle d'autre part -ou encore les tours, légales mais illégitimes, de Dubaï entre beaucoup d'autres!- et la cathédrale de Reims.)
Une bonne gouvernance exige selon moi une bonne dose d'esprit de finesse en plus de l'esprit de géométrie, l'esprit de finesse permettant de percevoir la nuance entre légitimité et légalité, nuance que ni les actuels dirigeants US ni l'actuel dirigeant français ne sont manifestement capables de faire suffisamment.
¹: Je devrais plus souvent penser à actionner le moteur de recherche du site.
²: J'ai lu récemment une analyse -ou un simple "bon mot"- dans laquelle était opposés le légitime front populaire de l'entre deux guerres et le front impopulaire, front renversé et illégitime du macronisme.
Alex Kara
23/06/2019
( Tout d'abord je voudrais fournir une énième preuve de la nature conspirationniste du capitalisme, ici à propos de la destruction de la production locale d'huile alimentaire, notamment par le scandale, et en s'aidant d'huile de vidange et de diesel s'il le faut : https://www.independentsciencenews.org/health/indias-colourless-revolution-replacement-of-traditional-oils-by-soy-and-palm-oils/ )
Sinon, malgré toute la nature de charlatanerie des sociétés marchandes, je pense que ce qui est à l'oeuvre dans ce décrit Burke est un problème d'ordre quantitatif.
Les personnes très intelligentes sont rares dans la société. (On pourrait utiliser la courbe de QI pour cela, mais le QI ne reflète pas l'expérience de la vie, et dans les récits populaires tel berger est souvent plus sage que tel prodige.). Ces personnes ne sont, de surcroît, pas intelligentes sur tout, et même dans leur domaine de spécialisation, elles ne le sont pas tout le temps. Elles peuvent se tromper ou échouer, ce qui fait partie intégrante de la recherche.
Ce sont souvent des personnes isolées ou vivant à la périphérie de leur groupe social. Ce sont aussi pour l'essentiel des personnes incomprises du plus grand nombre, et c'est là leur principale caractéristique : avec l'avènement de l'âge technico-scientifique, nous ne sommes plus dans un contexte rural ou artisanal, tel shaman ayant “le secret” du désenvoûtement comme le cordonnier avait “le secret” de la bonne chausse. Maintenant il s'agit de gens dont on ignore jusqu'à la fonction.
C'est une opportunité pour la charlatanerie (où la personne est un imitateur qui trompe sciemment son monde) mais aussi le Culte Cargo (où l'imitateur se croit investi des mêmes pouvoirs que celui qu'il imite). Ces deux catégories ne s'adressent pas à une vérité abstraite (parfois, seul le spécialiste de la question est en mesure de déterminer s'il s'est trompé ou non) mais à un public, qui est incapable de distinguer le vrai (disons, un scientifique) du faux (un gars qui se coiffe comme Einstein).
Dans les réseaux de persifleurs que Burke décrit ici, il me semble important de distinguer ces deux types, car le charlatan a une logique criminelle (dans l'exemple suivant, les fraudeurs ont dû corrompre ou impliquer un sénateur US : https://www.cbsnews.com/news/whistleblowers-expose-billion-dollar-back-surgery-scam/ ) alors que le Cultiste Cargo (https://en.wikipedia.org/wiki/Cargo_cult ) est dans une démarche somme toute magique, et même fanatique.
(Nota : dans le cinéma populaire, les personnalités très intelligentes sont soit les antagonistes (le savant fou, le génie sociopathe) soit des marginaux un peu magiciens (le sage, le geek), il y a autour d'eux un mystère et l'association à une forme de puissance (elle aussi mystérieuse) ce qui ne peut que susciter l'envie).
Dans mon expérience il y a beaucoup plus de “cultistes cargo” que de charlatans parce qu'il est plus simple de l'être, la charlatanerie exigeant une certaine maîtrise, alors que le Culte Cargo s'adresse à notre capacité simiesque d'imitation, ce qui est à la portée de tous (et que l'on voit par exemple dans les débats sur les mérites supposés de telle marque d'article de sport sur une autre, etc.)
David Cayla
22/06/2019
C'est quelque chose qui me chiffonne depuis que j'ai appris que le Global Hawk n'était pas le seul oiseau américain dans le ciel iranien lorsqu'il a été abattu, mais qu'il y avait aussi un avion espion P3 Orion avec 35 passagers à son bord, les Iraniens ayant précisé qu'ils auraient aussi pu l'abattre, mais s'en sont abstenus, "jugeant que le message envoyé en abattant le Global Hawk serait suffisant".
Aussi, est-ce que par hasard d'aucuns n'auraient pas décidé d'envoyer le seul Orion en mission suicide, ne laissant d'autre alternative aux Iraniens que le choix entre l'humilitation de laisser un avion espion survoler leur espace aérien sans réagir, ou de l'abattre, avec toutes les conséquences qui s'ensuivraient ?
Est-ce que devant la détermination des Iraniens, et alors que tout avait été sans doute déjà préparé pour lancer des frappes aériennes de représailles sur l'Iran, cela après une campagne médiatique éclair qui ne devait pas durer plus de quelques heures, au point où nous avons appris que les avions américains étaient déjà dans le ciel pour venger leur drone (?) et que seule l'intervention in extremis de Trump aurait permis d'arrêter cette folie au bout de la nuit,
Est-ce que d'aucuns n'auraient pas décidé d'envoyer aussi en mission un Global Hawk, et ce exactement sur le même parcours que l'Orion, offrant ainsi aux Iraniens l'occasion de prouver leur "détermination", ce qu'ils ont fait, et offrant aussi à Trump, par la même occasion, l'occasion de prouver sa "détermination" à se montrer magnanime, en expliquant que des frappes, qui pour être "limitées" n'en auraient pas moins coûté la vie à près de 150 Iraniens, ne se justifiaient pas, pas pour la perte d'un drone ?
Ainsi, tout aura été consommé ou consumé (la destruction du drone, la campagne médiatique poussive, les frappes menées avec une telle détermination qu'elles ont pu être annulées, et avec elles l'hybris guerrier qui les accompagnait) en l'espace d'une nuit, après quoi les Iraniens auront pu faire savoir presque en passant qu'il y avait aussi un Orion en goguette dans leur espace aérien, faisant ainsi clairement savoir aux militaires américains à quel point leur vie ne vaut pas grand chose aux yeux de certaines personnes, et aussi à quel point la cause qu'ils devaient défendre ne vaut pas non plus grand chose s'il faut monter pareilles provocations grossières pour justifier une entrée en guerre.
alexandar nijetakolose
22/06/2019
Petit complement d'information
Douglas Macgregor n'est pas n'importe qui, il est écouté et respecté dans l'US Army, surtout par les officiers superieurs, subalternes et sous-officiers.
Sa voix compte, son opinion a du poids
https://en.wikipedia.org/wiki/Douglas_Macgregor
Et hors sujet mais interessant concernant le delabrement du systeme US
https://www.zerohedge.com/news/2019-06-21/come-heavily-armed-oregon-senator-threatens-violence-governor-hunts-down-lawmakers
jc
22/06/2019
Merci, ça me fait plaisir. Quelques remarques:
- Je sens en vous -comme en PhG- une sensibilité que je n'ai pas (si j'ai une qualité peut-être plus développée que la moyenne c'est de reconnaître -et d'être attiré- par ceux dont je sens qu'ils parlent de première main et parlent "vrai"). À lire votre commentaire -où je sens un logocrate tant "ça coule de source"- je sens que vous avez complètement pénétré l'esprit de Grothendieck, que vous vous mettez littéralement dans sa peau (comme dans celle du Nietzsche de Zarathoustra (que je n'ai pas lu), vous avez cette capacité de vous mettre en esprit dans la peau des choses ou d'autrui, capacité que Thom appelle intelligence.
- Grothendieck utilise à tour de bras le mot "créateur". Je crois qu'en lisant attentivement "La clef des songes", sous-titré "Dialogues avec le bon Dieu", -et vous l'avez fait plus que moi-, le véritable créateur n'est pas nous, mais Dieu qui est en nous. Cette distinction est importante pour moi car elle revient à dire que nous ne créons ni n'inventons; nous découvrons. Distinction qui conduit à se poser la question de la propriété intellectuelle et par suite celle de la légitimité des brevets d'invention (à l'heure où certains n'hésitent pas à breveter le vivant).
- Vous renvoyez à un lien vers une conférence de Laurent Lafforgue. Il n'est pas inutile de préciser que LL, médaille Fields, est le successeur de Grothendieck à l'IHES, le Princeton français. C'est un mathématicien catholique qui s'affiche comme tel dans l'exercice de sa fonction, ce qui est rarissime dans un milieu dans lequel j'ai été immergé pendant quarante ans.
- Thom croit aux mêmes vertus du rêve même s'il est moins disert que Grothendieck sur le sujet. Citations:
1. "Au moment où tant de savants calculent de par le monde, n'est-il pas souhaitable que d'aucuns, qui le peuvent, rêvent." (dernière phrase de SSM);
2. "(...) pour réellement théoriser la biologie il faut faire du rêve une fonction biologique.";
3. "On sait combien la durée relative du sommeil onirique (ou paradoxal) va croissant dans l'échelle phylogénétique. Il est naturel de voir dans cette activité une sorte de spatialisation virtuelle des formes génétiques." (SSM, p.305).
Quant aux relations de Thom avec Dieu, je cite souvent l'étrange: "Selon beaucoup de philosophies Dieu est géomètre; il serait peut-être plus logique de dire que le géomètre est Dieu."
Pour résumer ma pensée à ce sujet: c'est dans le rêve que Grothendieck et Thom vont puiser leurs intuitions, en particulier leurs intuitions mathématiques. D'où viennent les intuitions de Philippe Grasset?
patrice sanchez
21/06/2019
Je tenais à remercier doublement JC pour m'avoir permis de découvrir le mathématicien Grothendieck dont je viens d’entamer la lecture de “ la clé des songes “, c'est un témoignage essentiel pour qui veut comprendre les mystères de la création intellectuelle, lumineusement zarathoustrien !
"La liberté de Dieu dont procède notre liberté. Celui que Grothendieck appelle le "Rêveur" c'est-à-dire celui qui rêve en nous mais qui est un autre que nous, et dans lequel Grothendieck pense reconnaître Dieu se manifestant discrètement à nous, nous dépasse infiniment par la connaissance profonde, par la pénétration du regard, par la puissance et la délicatesse des moyens d'expression, par l'infatigable bienveillance et surtout par une liberté déconcertante, infinie. "
Après la redécouverte de l'âme soeur venant chuchoter nuitamment à l'oreille de Nietzsche dans le Zarathoustra, nous avons le rêveur Grothendieckien en chacun de nous et d'inspiration divine ... ( A noter que pas un de ces éminents membres de la communauté intellectuelle nietzchéenne n'aura daigné relever cette découverte fondamentale pourtant évoquée en de nombreux passage du Zarathoustra pas plus que dans Ecce Homo ou Nietzsche nous parle de son expérimentation de la pensée créatrice venue tout droit d'un ailleurs, par héminégligence crasse et lâche conformisme matérialisant ... les jours de la pensée du sous-sol de ces tristes pîtres sont comptés, l'immanence de la pensée Zarathoustrienne et Divine reprendra ses droits et les imposteurs auront en guise de postérité, le mépris et l'oubli de l'Histoire )...
Et j'en viens à mon deuxième remerciement, car votre intervention m'aura donné l'opportunité de découvrir le texte introductif au troisième cercle de Monsieur Grasset !
Parce qu'avec pareils prolégomènes introduisant la conclusion de l'oeuvre d'une Vie, je proposerais que les lecteurs de dedefensa reprennent en choeur : Sancto Subito ... suivi d'un grand éclat de rire Zarathoustrien.
Je me permettrais de joindre deux liens, un résumé de la clé des songes et le tapuscrit dégoté sur le blog de l'écrivaine Alina Reyes.
https://www.laurentlafforgue.org/textes/GrothendieckLiberte2.pdf
et le lien de la clé des songes
http://matematicas.unex.es/~navarro/res/clefsonges.pdf
La liberté de Dieu dont procède notre liberté Celui que Grothendieck appelle le "Rêveur" c'est-à-dire celui qui rêve en nous mais qui est un autre que nous, et dans lequel Grothendieck pense reconnaître Dieu se manifestant discrètement à nous, nous dépasse infiniment par la connaissance profonde, par la pénétration du regard, par la puissance et la délicatesse des moyens d'expression, par l'infatigable bienveillance et surtout par une liberté déconcertante, infinie.
Tout ce que nous savons, il le sait, tout ce que nous percevons, il le perçoit, mais avec une profondeur, une acuité, une vivacité, une liberté qui nous font défaut. Ainsi, la liberté est le premier et plus important attribut de Dieu. En même temps, sa discrète manifestation à nous par le rêve s'accompagne d'un irrécusable sentiment de parenté, et même de proche parenté. Ce sentiment de parenté signifie en particulier que nous aussi avons pour attribut essentiel la liberté, même si c'est à un degré infiniment moindre, et que notre liberté procède filialement de celle de Dieu. Quand Dieu se manifeste à travers le rêve, c'est un peu comme si nous avions en nous un autre nous-même qui aurait à sa disposition tous nos sens et toutes nos facultés de perception et de compréhension mais qui les utiliserait avec une liberté et une efficacité totales. Ainsi, la liberté de Dieu agissant en nous ne s'oppose pas à notre liberté ; au contraire, notre liberté est totale quand Dieu peut utiliser nos facultés avec une liberté totale. (§7, §23 et note 3) Un aspect de la totale liberté de Dieu se manifestant à travers le rêve est l'objectivité. Même s'il a l'air de regarder par nos yeux, jamais il ne prend partie, ni pour ni contre nous, ou pour ou contre quiconque. Il se borne à montrer les choses et les êtres tels qu'ils sont. (§23) Dire que l'objectivité est un aspect de la liberté signifie que celui qui est libre respecte la réalité et qu'il reste impartial, autrement dit respecte la justice. Celui qui est libre ne suit aucun caprice. L'exercice de la liberté n'est pas arbitraire.
Grothendieck n'est pas politique car, pour lui, la vérité spirituelle échappe par essence même à la conscience collective. Elle ne peut être « sue » ou « connue » par une collectivité ou communauté, si restreinte soit-elle. Seul l'être dans sa solitude, seule l'âme qui l'habite, connaît la vérité. (note 20) Face à l'âme seule qui connaît la vérité se dressent les groupes et les institutions qui exercent toujours sur les personnes une emprise négative et stérilisante. C'est pourquoi le relâchement considérable au cours des derniers siècles du caractère coercitif de l'emprise du Groupe sur la personne, le fait que « les princes qui nous gouvernent » laissent désormais dire et écrire quasiment ce qu'on veut (même si c'est seulement pour s'être aperçus que cela ne change pas grand chose et augmente le brouhaha général sans mettre en danger l'Etat ni ses institutions), ou encore la diffusion plus ou moins généralisée d'idées « humanistes » sur la dignité de l'être humain et ses nombreuses « libertés » de ceci et de cela (et même si Grothendieck avoue avoir longtemps eu tendance à ne guère accorder d'importance à ces « bons sentiments idéologiques » du grand nombre) lui apparaissent comme les rares aspects réjouissants de la civilisation moderne qu'il juge par ailleurs en des termes extrêmement négatifs. Pour qualifier l'état de cette civilisation qu'il appelle « civilisation techniciste », Grothendieck emploie les mots « effritement », « nivellement », « érosion », « avachissement », « décomposition », « pourriture ». La civilisation techniciste lui paraît connaître un processus de décomposition rapide, inséparable du caractère férocement déspiritualisé qui la distingue de toutes celles qui l'ont précédée. Une telle civilisation privée d'âme est condamnée à disparaître au bout de quelques siècles, l'homme ne pouvant vivre à la longue en ignorant ses besoins religieux et sa nature spirituelle. La seule consolation est de penser que d'ici quelques générations cette civilisation pourrissante apparaîtra sans doute comme l'utile matière brute qu'une oeuvre créatrice intense, à laquelle tous les hommes sont appelés, doit transformer en le terreau vivant de l'homme pleinement humain et d'une humanité enfin humaine. (§54)
Religion et esprit de liberté Pour se détourner du plan politique ou social, Grothendieck n'en attend pas moins une mutation qui serait l'éveil impensable et soudain d'une vie spirituelle là où toute trace en paraît absente. Une mutation d'une ampleur véritablement vertigineuse, faisant irruption dans l'intime de milliards d'être humains en même temps, sans pourtant aller à l'encontre du libre arbitre d'aucun d'entre eux ni le bousculer. Une mutation qui s'accomplirait non par la disparition de l'Institution religieuse mais par un assouplissement draconien des positions doctrinales, laissant libre jeu à la recherche spirituelle parmi ceux des adeptes qui s'y sentent appelés, permettant la formation de courants spirituels d'une diversité extrême au sein des grandes Eglises et de relations de convivialité fraternelle entre ces courants comme entre les Eglises elles-mêmes. Ainsi, les Eglises entreraient enfin - écrit Grothendieck - dans la voie de leur mission : servir, éclairer, stimuler la libre créativité de chacun. (note 35)
Mais, aujourd'hui encore, estime-t-il, rarissimes sont ceux, chrétiens ou non, qui comprennent et vivent pleinement l'exigence ardue de la liberté spirituelle, ceux pour qui « la vérité » n'est jamais acquise, jamais saisie ou enfermée dans une pensée ou dans un écrit, si originaux, si profonds, si inspirés et divins, si « vrais » soient-ils, mais qui en chaque jour, voire en chaque moment, la doivent redécouvrir, la re-créer dans leur être. Pourtant, notre rôle d'hommes, dépositaires chacun du pouvoir de créer, n'est pas de nous en remettre passivement à la lettre des enseignements d'un plus grand que nous, fût-il un égal de Dieu, mais, quitte peut-être à nous inspirer de l'esprit qui l'avait animé, de faire usage de notre propre créativité, en nous y mettant tout entier : « de tout notre coeur, de toute notre âme et de toute notre pensée ». Il est remarquable qu'écrivant cette dernière formule, Grothendieck explique lui-même l'emprunter au texte évangélique (Mt 22, 37-40) où Jésus cite « le plus grand et le premier commandement » comme étant : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu avec tout ton coeur, et avec toute ton âme, et avec toute ta pensée
Grothendieck assimile la liberté de chaque être avec ce qu'il appelle sa singularité foncière et sa qualité créatrice. Cette singularité fait l'essence même de l'âme humaine, elle est indistinguable de sa nature créatrice, elle est indestructible et éternelle comme l'âme elle-même est indestructible et éternelle. Le Groupe, avec son immense force coercitive, ne peut pas détruire cette singularité mais seulement en bloquer les manifestations reconnaissables. (§45) L'une des manières dont le Groupe s'oppose à la liberté créatrice est la tendance impérieuse, consacrée par un usage millénaire, de cacher le travail de création. Le chercheur est censé rendre publics uniquement des travaux finis, qui semblent être sortis tout droits de son esprit, et non pas les pages imparfaites et parsemées d'erreurs par lesquelles il lui a fallu passer pour tracer peu à peu son chemin de vérité On se souvient peut-être que ce thème apparaît déjà dans « Récoltes et Semailles » où Grothendieck se promet de ne plus publier que des textes de recherche qui portent toutes les traces des obscurs labeurs de la liberté créatrice en travail, et non plus des textes peaufinés qui auraient fait disparaître ces traces. Il espère que son cas ne restera pas isolé et que se produira une évolution dans la forme de la recherche, dans le sens de ne plus cacher le travail de création. Ce serait un signe de changement radical des mentalités et de l'ambiance culturelle. (note 46) Cette question est d'autant plus importante pour Grothendieck que son propre « chant de liberté » à l'intention de tous est, écrit-il, l'affirmation catégorique que l'homme dans son essence est créateur, indestructiblement. Une liberté qui n'est pas créatrice est un jouet à quatre sous qui séduit un moment avant de lasser et d'être largué, quand ce n'est pas un boulet doré qu'on traîne en le maudissant. La véritable liberté est dans la création. (note 48)
Ecoute et délicatesse Pour qu'il y ait acte créateur, oeuvre novatrice et acte de liberté, il faut écouter une autre voix que celle du bon sens et de la raison qui incarne les réflexes acquis et les consensus bien établis. Cette autre voix aiguille vers l'essentiel alors que celle du gros bon sens tend à nous maintenir sagement collés aux choses répertoriées et classées, ressenties comme sûres. Car les choses essentielles sont aussi les plus délicates et les moins sûres de toutes, celles qui ne font l'objet d'aucun consensus bien établi et sont donc entièrement nouvelles. Il n'existe aucun consensus pour distinguer le vrai du faux, l'essentiel de l'accessoire. Cette autre voix est la même que celle qui parle par le rêve, qui est l'oeuvre d'une liberté totale. (§6) Les choses créées demandent une écoute toujours plus fine et attentive car toutes ont un sens. Ce sens est à la fois infiniment délicat et secret, et manifeste et fulgurant comme la clarté insoutenable de mille soleils. C'est pourquoi nul d'entre nous ne le peut saisir dans sa plénitude, mais tout au plus le pressentir ou l'entrevoir, sous le biais et dans l'éclairage uniques que fournit à chacun sa propre expérience. (§40) Pour saisir les choses et leur sens, il faut donc être dans un état d'écoute vis-à-vis de cela ou de celui en nous qui sait, et qui se manifeste par une voix intérieure si basse qu'on ne l'entend que dans un état d'écoute intense. Cette voix intérieure est si discrète qu'on a tendance à ne pas noter sa présence même quand on est en train de l'écouter intensément. Ainsi, quand Grothendieck écrit, c'est-à-dire cherche à saisir les choses au moyen des mots, il a l'impression que ce n'est pas lui qui décide quand une formulation pose problème, ni qui trouve par ses propres moyens comment la nuancer ou la bouleverser, et que c'est encore cette voix intérieure qui l'avertit quand telle chose doit être développée. Rester à l'écoute signifie aussi garder assez de distance et de liberté par rapport à ce qui est déjà fixé sur le papier pour y pratiquer d'éventuelles modifications. (§55.2)
Liberté créatrice et œuvre intérieure C'est le titre du §46, le dernier du chapitre IV. Son sens est que la création se distingue d'une simple production par le fait qu'en plus de l'oeuvre extérieure, elle s'accompagne d'une « oeuvre intérieure » qui en constitue l'aspect essentiel. L'acte créateur, ou le processus ou le travail créateur, est celui qui transforme l'être qui l'accomplit ou en lequel il s'accomplit. Pour apprécier la qualité créatrice d'un acte ou d'une activité, la nature de l'oeuvre extérieure est accessoire. Une telle oeuvre peut même être absente, comme dans le cas de l'activité créatrice du très jeune enfant. Ainsi, non seulement tout acte créateur dépend de notre état intérieur mais son effet est principalement une transformation intérieure. Pour Grothendieck, l'essentiel est l'intériorité. (§46) Il précise que, dans son aspect « intérieur » qui est l'aspect essentiel, la création est un acte ou un processus par quoi se forme ou se transforme une connaissance. La création vaut ce que vaut la connaissance qu'elle fait apparaître ou qu'elle approfondit ou renouvelle. Une connaissance au sens que Grothendieck donne à ce mot n'est pas une information ni un savoir. Une connaissance est chose intimement personnelle, elle diffère de la connaissance que peut avoir tout autre être, fût-ce au sujet de la même réalité « objective » du monde extérieur. Elle fait partie de l'être comme sa chair même, elle fait corps avec lui. Il y a trois types de connaissances - charnel, mental (c'est-à-dire intellectuel ou artistique) et spirituel - et donc trois types de créations. (§47 et note 48) Puisque son aspect le plus essentiel est une transformation intérieure, tout travail créateur est une maturation de l'être qui l'accomplit ou en lequel il s'accomplit. La maturité d'un être est la somme des connaissances qui se sont créées en lui au cours de son passé. Chaque acte créateur crée aussi de la connaissance dans l'être, telle une sève subtile imprégnant le fruit et le faisant mûrir. La maturation est un processus créateur et toute création s'accompagne d'une oeuvre intérieure de maturation. (note 48) Dans la mesure où la maturation est un processus créateur, elle est une oeuvre poursuivie en commun avec Dieu dans une sorte de dialogue créateur entre Dieu et l'âme. Le caractère « créateur » de ce dialogue réside surtout en Dieu car l'âme est réticente à se transformer. La maturation progressive de l'âme a pour effet de lui donner des moyens toujours plus délicats et multiples pour participer plus pleinement, de façon véritablement créatrice, à ce dialogue. Mais l'âme a toute liberté pour récuser à tout moment ces moyens, les bloquer et les refouler en refusant le dialogue créateur avec Dieu. Au contraire, en acceptant librement les moyens spirituels qui lui sont impartis dans son état de maturité présent, elle est fidèle à elle-même ou, ce qui revient au même, fidèle à sa mission, si humble soit-elle. Ainsi seulement elle entre dans la liberté créatrice. Alors notre existence, dans la mesure où elle est créatrice, c'est-à-dire où elle est bel et bien une « oeuvre », est oeuvre commune de Dieu et de nous. (note 24 et note 49) La destinée humaine est l'apprentissage d'une liberté créatrice appelée à devenir égale à celle du Maître, Dieu, et bornée seulement par les limites qu'il a assignées à la condition humaine. Il est permis de penser, ajoute Grothendieck, que le stade ultime et incarnation parfaite de la liberté créatrice fut atteint dans l'existence terrestre de Bouddha, de Lao-Tseu et de Jésus. (note 24)
jc
21/06/2019
Le cancer sociétal (sorosien?) qui est en train de ronger le bloc occidental ("ce multiculturalisme haineux qui s’alimente de la victimisation") appellera une réaction, qu'on le veuille ou non.
Driss Ghali:
- "Si la repentance visait la réconciliation, elle commencerait par baliser le chemin qui mène vers le pardon."
- "Elles [les élites] chantent les louanges des différences (donc de la division) au lieu de promouvoir le métissage réel (celui des mariages mixtes)."
- "Une partie du peuple français a échappé au lavage de cerveau. Elle vient notamment de la Diversité."
Diviser pour régner: les élites politiques ne pensent qu'à ça depuis bien longtemps déjà. Réunir pour régner? Claude Lévi-Strauss a écrit de belles pages sur la subtilité de la politique des mariages dans certains groupes sociaux dits primitifs et c'est un grand matheux (André Weil) qui, à sa demande, en a expliqué les règles dans le cadre de la théorie des ... groupes.).
Je trouve que Nicolás Gómez Dávila¹ cerne bien en quelques mots comment pensent ces élites politiques décadentes: « Les révolutions se font pour changer la propriété des biens et le nom des rues. Le révolutionnaire qui ambitionne de changer la “condition de l’homme” finit fusillé comme contre-révolutionnaire. »
Réunir, diviser; unité, diversité. Il y a un moment que je propose, utopiquement bien sûr, comme devise pour la France (et plus si affinité): Unité-Harmonie-Diversité. Pour moi notre actuelle devise est morte-vivante (a-t-elle jamais vécu?), la liberté étant devenue libéralisme, l'égalité égalitarisme (H=F=L=B=G=T=Q) et la fraternité fraternitarisme (unis comme des frères).
¹: https://leblogalupus.com/2019/06/15/le-reactionnaire-authentique-avec-video/
Christian Feugnet
21/06/2019
La fin du monde .... la Crise du Systéme , etc , de quoi parle t on au juste . Rodier : un cycle de un siécle , la culture ( où çà commence ou çà finit ce machin ?) , bon mais , Un siécle , c'est pas franchement léger point de vue historique ?
Christian Feugnet
21/06/2019
Chargé faut dire .
Alors on a la date de la fin du monde ? Le début de la Crise ?
Le radnarog , que sais je : çà sent le business çà , et je dirai de mauvais aloi , tous les jours , étant en Roumanie , j ai des offres ( Roms va sans dire qui parasitent mon tel ) de psition pour me donner la date de ma mort et ses circonstances . Contre rétributions évidemment pour un tel talent .
Moi aussi j 'ai cherché la fin du monde , c'est quand ? Je vais pas m 'étendre mais une certitude pour moi , entre 2020 et 2030 et personne n 'est capable de dater avec plus de précision . Les concepts , les mesures fussent elles possibles font défaut . Encore que la fin du monde c'est peut étre une bonne nouvelle , personnellement la connerie et cruauté de nombres de mes comtemporains m inspirent que leur disparition en masse , pourvu qu'elle m épargne me réjouirait assez .
jc
20/06/2019
Un ajout à "Corruption et régénération".
Dans l'oppostion Mad.0/Mad.1 j'ai oublié le dual dans Mad.1 de "Système du technologisme issu des Lumières du XIXème siècle" de Mad.0, dual que je formule ainsi: "Système de la communication issu des Leds¹ du XIXème siècle"².
¹: La philosophie des Lumières artificielles du XXIème siècle ...
²: En ayant en tête l'article "Glossaire.dde : technologisme versus communication".
jc
20/06/2019
"Ne dérange pas mes cercles ! », avait dit Archimède au soldat romain qui s’approchait de lui, fier conquérant, au moment de la prise de la ville de Syracuse¹."
Je trouve que cette devise s'applique bien à PhG, homme que j'imagine d'ordre, d'harmonie et d'équilibre, auteur de deux cercles et bientôt d'un troisième -qui sera le premier car PhG, c'est bien connu, avance dans l'avenir à reculons²-.
En reparcourant une fois encore "Le désenchantement de Dieu", j'ai été frappé du nombre de fois où apparaissait le mot "cosmique". L'enchaînement associatif cercle-sphère-cosmos-harmonie m'a alors fait redécouvrir à ce propos un article que j'ai trouvé superbe de Wikipédia sur l'harmonie des sphères³. Me souvenant aussi qu'un lecteur de Dedefensa avait qualifié ses articles de symphonie⁴, et que "l'âme poétique" revenait souvent sous la plume de PhG, il est ressorti de tout ça la définition suivante de ce qu'est un logocrate, définition que je trouve s'appliquer parfaitement à PhG: un logocrate est un musicien de mots.
Revenant une fois encore à ce passage du "désenchantement" qui me fascine tant, j'imagine très bien un PhG musicien écrire une symphonie entière à partir d'une note, d'un motif ("Il suffit d'un mot, d'une phrase ..." pour ensuite prendre plaisir à l'écouter ("... et toujours, à l’arrivée, il y avait un sens, une forte signification, le texte était devenu être en soi… C’était un instant de bonheur fou. »
En mathématiques la musique est clairement du côté de l'arithmétique⁵, du logos, pas du côté de la géométrie⁵, du topos. Si un logocrate a l'intuition haute que c'est 2023 alors c'est que ...
¹: https://www.saxifrage.fr/1623-2/
²: "La Grâce de l'Histoire", tome II, p.420
³: https://fr.wikipedia.org/wiki/Harmonie_des_sph%C3%A8res
⁴: "Le désenchantement de Dieu"
⁵: À mes yeux la géométrie arithmétique, synthèse du logos et du topos, est ce qu'il y a de plus fondamental (et difficile) en mathématiques. Grothendieck, ce Pythagore des temps modernes, en est encore actuellement, je crois, le maître incontesté.
patrice sanchez
20/06/2019
Je réagissais tout à l'heure à un article repris par RI : L’avènement de la technologie qui détruit la vérité "
https://reseauinternational.net/lavenement-de-la-technologie-qui-detruit-la-verite/
Patience et longueur de temps, leurs mensonges sont devenus si évidents, si criants d’inhumanité, que ce système du mal omniprésent est en mode auto-destruction ! Le bon sens et l’entraide des peuples sont en train de reprendre le dessus avec ce systéme internet qui nous force à réagir malgré tout en nous reconnectant à notre part d’humanité et ceci, au grand dam des tireurs de ficelles dans les coulisses qui voient leur plan satanique leur échapper … Ils ne mériteraient que le goudron et les plumes avant de terminer dans la fosse septique de l’histoire. Le chaos créateur du mal se verra dans peu de temps damer le pion par le chaos libérateur !
Comme quoi, les idées zoroastrienne et zarathoustrienne nietzschéenne où bien et mal sont intimement liés et connectés s’avèrent lumineusement exactes, car c’est avec la complicité du mal que nous arriverons à la libération de nos chaines mentales et par voie de conséquence, à la spiritualité de la libre pensée grâce à l’amour et à l entraide inconditionnels…
Si vous avez jamais dit « oui » à un plaisir, ô mes amis, alors vous avez en même temps dit « oui » à toute douleur. Toutes choses sont enchaînées, enchevêtrées, liées par l’amour –
Si vous avez jamais voulu qu’une fois fût deux fois, si vous avez jamais dit : « Tu me plais, bonheur ! moment ! instant ! », alors vous avez voulu que tout revienne ! – tout de nouveau, tout éternellement, tout enchaîné, tout enchevêtré,
tout lié par l’amour » Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra
Et pour vous donner un exemple concret de cet univers qui n'obéit qu'à l'amour, je me permettrais de vous joindre le lien d'une émission, "Nus et culottés " où l'on voit deux jeunes sympathiques zigottos partir à l'aventure dénués de tout, et par la magie du lâcher prise et de la joie de vivre avec la bienveillance solidaire naturelle de la population qu'ils croisent au cours de leurs périples, ils se créent des synchronicités extraordinaires qui plongeraient dans la stupeur et les tremblements tous lesValls, Merkel, les athées et autres transinhumanistes !
https://www.france.tv/france-5/nus-et-culottes/nus-et-culottes-saison-7/1006859-objectif-norvege.html
jc
19/06/2019
MAD.0:
Armageddon dur par dd&e (déstructuration-dissolution-entropisation) du corps des hommes (cancers réels provoqués par le rayonnement des explosions nucléaires): renvoi au Système du technologisme issu des Lumières du XIXème siècle¹, aux sciences dures² (mathématiques, physique), à la modernité, au matérialisme du XIXème, à l'idéal de puissance.
MAD.1:
Armageddon mou par dd&e de l'esprit des hommes: mise aux normes du politiquement correct (cancers virtuels provoqués par l'uniformisation de la pensée, l'égalitarisme forcené -typiquement H=F=L=B=Q=T=Q- pour aboutir à l'homme-zombie, universel, uniforme et sans qualité): renvoi aux sciences molles², à la post-modernité, à l'idéalisme du XXIème siècle, à l'idéal d'impuissance.
MAD.0 + MAD.1: dd&e, liquéfaction de la société (à partir d'Hiroshima?) puis gazéification (à partir du 9/11?).
La lutte du Bien contre le Mal (chère à Dedefensa).
Actuellement notre société (BAO sinon globale) est clairement en phase de corruption (dd&e). Dans le cadre du darwinisme-Système⁴, pièce maîtresse du politiquement correct, il n'y a là rien d'autre qu'une évolution naturelle.
Mais si l'on a foi en l'existence de forces structurantes et néguentropisantes (s&n) alors on a un conflit permanent entre forces du Bien (s&n) et forces du Mal (dd&e). J'incline à penser que non seulement c'est le cas mais encore que la nature a la capacité innée de réguler ce conflit (comme elle sait réguler tous les conflits de ce type tel le conflit inspiration-expiration ou le conflit diastole-systole).
¹: Gouhier (à Stendhal horrifié): "Les Lumières c'est désormais l'industrie" (citation faite sporadiquement par PhG)
²: Thom (sur les sciences dures): "Depuis la rupture galiléenne, le savant a toujours essayé d'exploiter les automatismes, la "stupidité" de la nature: la physique est tout entière fondée sur ce manque d'imagination des forces naturelles."
³: Thom (sur les sciences molles): "On est frappé, à la lecture du discours de bien des auteurs en sciences humaines, du caractère intelligent de leurs considérations. Il y a là, visiblement, un obstacle rédhibitoire à faire entrer leurs oeuvres dans le domaine scientifique."
⁴: Darwin était en partie lamarckien (cf. sa théorie des gemmules), fait que les darwiniens-Système ont tendance à oublier.
jc
19/06/2019
Karl Rove: "(...) while you're studying that reality – judiciously, as you will – we'll act again, creating other new realities, which you can study too, and that's how things will sort out. We're history's actors . . . and you, all of you, will be left to just study what we do.”
Indéfectibilité, inculpabilité, exceptionnalité, supériorité: ce que dit Rove s'éclaire à la lumière de ces mots-clé sans lesquels PhG m'a convaincu qu'on ne pouvait comprendre l'américanisme. Ces élites américanistes se prennent vraiment -réellement!- pour des dieux¹ ("creating other realities")!
Comment décoder ce que dit Rove ("(...) and you, all of you, will be left to just study what we do.”)? Pour moi c'est très simple: en remplaçant créer par inventer et réalité par virtualité et en interprétant acteur par comédien ("we're history's actors").
Ce que je trouve piquant c'est que la démarche de Rove est, au départ, tout-à-fait scientifique (plonger le réel dans le virtuel²) et tout-à-fait logique pour un gouvernant dont la devise est -ou devrait être- "Gouverner c'est prévoir", car l'action politique consiste en effet à choisir parmi un éventail de virtualités -potentialités- celle qui sera la future réalité (passage de la puissance à l'acte).
Mais la démarche de Rove est également tout-à-fait logique dans la cadre idéologique "Struggle for life" dans lequel baigne l'américanisme: hasard des mutations suivi de sélection ... qui sera nécessairement celle que les américains ont choisie, exceptionnalité oblige.
Le parallèle suivant entre la science politique (science molle) et la physique moderne (science dure) s'impose. Maupertuis a proposé un principe mécanique dit de moindre action (en fait d'action extrémale) qui a été prouvé ultérieurement être équivalent au principe fondamental de Newton: parmi toutes les évolutions virtuelles, celle choisie -cause finale?³- est celle qui minimise l'action. Principe qui devrait peut-être être étudié et surtout médité -s'il ne l'est pas déjà- dans les écoles de sciences politiques, de sciences naturelles, et de philosophie).
Pour terminer, les termes de création et d'invention appellent le développement suivant. Il me semble clair que, dans l'esprit de Rove comme dans l'esprit de toute l'élite américaniste, la création et l'invention viennent d'eux, qu'elle leur appartient: attitude foncièrement capitaliste. Ceux qui croient que les Idées (platoniciennes par exemple) existent réellement -c'est-à-dire hors de la tête de ceux qui les pensent-, et beaucoup de matheux -dont moi- ont cette croyance, ceux-là préféreront le terme de découverte -un théorème, énoncé comme démonstration, ne s'invente pas, il se découvre.
Les matheux ne prennent pas de brevets d'invention -pourvu que ça dure, le concept de propriété intellectuelle gagnant peu-à-peu les esprits-, au contraire des Monsanto-Bayer et cie qui n'hésitent pas à faire des inventions biologiques et à ... breveter le vivant!).
¹: Lloyd Blankfein, ex-directeur exécutif de Goldman Sachs: "I'm doing God's work".
²: Thom: "En science, le réel doit toujours être plongé dans un virtuel plus grand."
³: Cf. "La finalité en biologie" (SSM, 2ème ed. pp.276 à 279)
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