jc
31/10/2018
Orlov: " sans culture, nous ne sommes que des singes nus qui s’interrogent dans le désert, qui se battent entre eux avec des bâtons et des pierres, qui attendent que quelqu’un de plus cultivé vienne nous sortir de notre misère, ou qui succombent au froid, à la faim et d’ennui."
Je crois ne pas pouvoir me tromper beaucoup en précisant ainsi la pensée d'Orlov: "sans culture," nous sommes réduits à l'état de nature, autrement dit "nous ne sommes que des singes nus qui s’interrogent dans le désert, qui se battent entre eux avec des bâtons et des pierres, qui attendent que quelqu’un de plus cultivé vienne nous sortir de notre misère, ou qui succombent au froid, à la faim et d’ennui."
Si c'est ainsi qu'Orlov voit la nature alors je ne suis pas du tout d'accord. Et je pense ne pas me tromper en disant que PhG ne voit pas, lui non plus, les choses ainsi: pour moi toute la conclusion du tome II de "La Grâce de l'Histoire" le crie. Verdict dans le tome III?
jc
31/10/2018
(Je rappelle que je considère les forums auxquels je participe -maintenant Dedefensa, jadis le blog de Paul Jorion- comme des divans psychanalytiques¹. D'une part l'écriture est pour moi une forme nécessaire de tentative de condensation de ma pensée², et d'autre part le fait de pouvoir être potentiellement³ lu m'est nécessaire pour me forcer à essayer de me clarifier les idées -essentiellement celles de Thom et de PhG, et, éventuellement, celles que je pourrais avoir-.)
1. Thom: "La connaissance scientifique est analogue, sur le plan de l'espèce, d'une psychanalyse sur le plan individuel." (Pour le contexte cf. p.63 parmi les citations recueillies par Michèle Porte, disponibles sur la toile)
2. Thom: "(...) l'homme est pourvu d'un dispositif universel qui, sur un champ de dynamique neuronique, peut en reconstituer le centre organisateur. Véritable gonade mentale, ce dispositif condense les champs en mots, vraies semences d'idées; placé dans un contexte approprié, le mot germe et éclate dans l'esprit de l'auditeur et la forme globale ainsi reproduite est l'idée. Ainsi la pensée conceptuelle est une embryologie permanente."
3. potentiellement me suffit.
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(Suite du commentaire "Le naufrage de la raison occidentale?"
I. La rationalité
Bien que ce ne soit pas du tout mon rayon, je crois ne pas me tromper en disant que la rationalité occidentale doit beaucoup d'abord à Aristote, ensuite à Kant. Il suffit de lire les premières pages de ES pour s'apercevoir que Thom a choisi une toute autre approche:
"On ne cherchera pas à fonder la Géométrie dans la Logique, mais bien au contraire on regardera la logique comme une activité dérivée (et somme toute bien secondaire dans l'histoire de l'esprit humain), une rhétorique. Ici, on ne cherchera pas à convaincre, mais à susciter des représentations, à étendre l'intelligibilité du monde. Au lieu de fonder logiquement la Géométrie, on cherchera à fonder le logique dans la Géométrie."
Thom définit la rationalité comme suit: "Le rationnel, au fond, n'est qu'une déontologie dans l'usage de l'imaginaire."
Et précise: "La théorie des catastrophes m'a réellement donné la clé d'un mode de pensée qui m'a permis de voir les choses sous un angle qui échappe, apparemment, à la manière standard de voir les choses. Essentiellement parce qu'on fait un saut dans l'imaginaire, mais un saut contrôlé, le saut doit être contrôlé. (...) Le contrôle de l'imaginaire est, je crois, l'essence de la rationalité."
II. Le rôle de l'affectivité
Tel que je l'ai compris, la pensée, pour Thom, s'initie dans la privation, le manque, le désir. On cherche à supprimer la douleur que provoque ce manque par une entrée en métastabilité de la dynamique neuronique: "(...) l'affectivité "déforme" la structure de régulation de l'organisme en la compliquant." Ainsi Thom propose une explication "catastrophique" de la façon dont un chimpanzé pense par déformation de la catastrophe "fronce" en la catastrophe "papillon" pour se saisir d'un bâton qui fera tomber une banane suspendue trop haut (ES p.73). Thom résume à la page suivante: "L'invention de l'instrument apparaît comme la schématisation (au sens kantien) de ce concept problématique suggéré par la privation. S'il est vrai, comme l'a écrit Kant, que le schématisme est un secret caché aux profondeurs de l'âme humaine, il est clair qu'il est inutile de persévérer dans cette exploration de l'invention. (...) Seule possibilité d'explication: le choc affectif de la privation conduit à une plicature de la figure de régulation."
Si j'ai correctement compris ce qu'écrit Thom, nous disposerions donc d'une espèce de boîte de vitesse interne qui nous permet d'élargir notre horizon de pensée, et ce d'autant plus que la privation initiatrice sera importante (passage de la première, la "fronce", à la deuxième, le "papillon", pour le chimpanzé en privation de banane).
Peut-être la privation de partenaire sexuel donne-t-elle accès aux vitesses supérieures, c'est-à-dire aux catastrophes sexuelles (les trois ombilics), voire plus (la double fronce et au delà)? C'est comme ça que je me plais à interpréter le prophétique "ou en attente, sont prêtes à se déployer quand ce deviendra nécessaire" de la toute fin de SSM cité dans mon précédent commentaire…
Thom en dit plus sur le rôle de l'affectivité dans son article "La notion de programme en biologie" (AL)
Dans la citation qui suit (p.159) on notera comment une pression sélective, darwinienne, se transforme en une pression instructive, lamarckienne:
"Comment expliquer ce* processus d'apprentissage? Un darwinien orthodoxe dira que seuls survivent les systèmes pour lesquels cette* adaptation est suffisamment réalisée… Mais chez les animaux supérieurs, nous savons parfaitement qu'il y a apprentissage par l'affectivité: les choix malheureux conduisent à une douleur, les choix heureux au bien-être. A la sélection par la mort a succédé la sélection par l'affectivité. L'affectivité peut donc être vue comme une rétroaction du flux final ramifié sur la dynamique de commande des pré-programmes. Et je n'ai jamais compris pourquoi ces effets de rétroaction ne pourraient pas être transmis héréditairement (...), ce que nie la biologie moléculaire classique."
*: il faut lire au moins tout l'article pour savoir à quoi précisément renvoient ces démonstratifs.
alain pucciarelli
31/10/2018
Monnet, Schuman et Spaak étaient des agents US (consulter sur le Net ou sur le site UPR les documents déclassifiés par nos amis américains). Ils seraient ravis de ce qui advient à la modeste ambition européenne de concocter son propre avion. Allons-nous longtemps nous bercer d'illusions, et considérer que la construction européenne n'est pas le fruit de la stratégie des Etats Unis? La Belgique est logique avec les prémisses de l'UE. La France, l'Allemagne et les autres font semblant. Ou peuvent peu. Moralité: rien de national n'est faisable hors cadre UE, qui est un carcan euro atlantiste sous contrôle US. Les Belges, au moins, sont parfaitement conformes aux prescriptions initiales de la constuction européenne, à savoir être et se vivre comme un satellite des Etats Unis. Nous leur devons cet hommage, celui qui honore la fidélité du vassal à son suzerain. Diable, nous sommes au XXIe siècle!
Dominique Muselet
31/10/2018
Les inversions historiques sont légions et elles ont souvent une cause… historique.
Je me suis demandé après la lecture de votre article sur le sacrifices des élites de 1914 si ce n'est pas le naufrage des élites de 1945 qui a jeté un discrédit rétroactif sur celles de 1914, amalgamées, en dépit des faits, aux insuffisances et turpitudes de celles de 1945 à nos jours…
EricRobertMarcel Basillais
31/10/2018
L'Ecole Polytechnique par laquelle je suis passé a subi effectivement la même saignée :
voici 3 exemples photographique (à ne pas utiliser pour du matériel éditorial sans autorisation de l'Ecole Polytechnique) pris au hasard :
https://bibli-aleph.polytechnique.fr/exlibris/aleph/a23_1/apache_media/S8KFQVSSEMT46M9UNJ55X4EVTK3X12.jpg
https://bibli-aleph.polytechnique.fr/exlibris/aleph/a23_1/apache_media/ISLK1QPURI7CSIF7X4UJJ9B7A8TJXL.jpg
https://bibli-aleph.polytechnique.fr/exlibris/aleph/a23_1/apache_media/2DJUITKXT2HURRVVC5N8Q8N99QQA61.jpg
De mémoire, la promo X1914 fût presque totalement détruite. On chargeait encore à cheval, sabre au clair au début de la guerre de 1914. Ce fût la fin de la civilisation euriopéenne.
Nous sommes les héritiers des ruines. Et le traité de Versailles est responsable de la deuxième (Allemagne), mais aussi de la troisième guerre mondiale (Kurdistant, Palestine).
Le mot élite est presque toujours galvaudé. Et depuis toujours. Aucun grand problème signalé n'a été réglé. Ils ont été plutôt agravés. D'autre problèmes ont été importés, créés, magnifiés.
Entreprise au plus haut point perverse. Et qui n'aura servi de rien. Car elle est vouée à l'auto-destruction générale. Que les survivants de la prochaine guerre mondiale se souviennent de ne plus reconduire la technologie, le marché, et l'Etat ; si toutefois le choix devait encore se présenter à eux…
Georges Dubuis
31/10/2018
LF Destouches avaient touché juste. Ces quelques mots résument le commencement et la fin de son voyage….amère, entendez bien ce dernier mot dans notre merveilleuse langue,a mère, sans mère, qui fait pleurer tous les soldats dans la scène finale des Sentiers de la gloire. https://www.youtube.com/watch?v=pJH8hO7VlWE
"Que vois je autour de moi, des gens pressés d'en finir et moi j'ai envie de .......vivre" Et oui, il faut trancher pour ne pas y rester…...dans le social !
Christian Feugnet
31/10/2018
Je n'ai pas écrit confu sionisme , je me suis retenu , rien à voir avec la cabale . L' écriture est un art difficile .
Christian Feugnet
31/10/2018
Je fus éffaré à la lecture du livre de "mathématiques" de mon fils , ne parvenant pas à un dialogue avec lui sur le sujet . Je n'y trouvais aucune cohérence possible . En allant voir son professeur , que je savais pourtant mathématicien , deuxiéme surprise , il m'apprend qu'il partage non point de vue , mais qu'il ne peut choisir le libre ; il lui est imposé . J' y vois un aspect du tourbillon crisique , le post moderne n'est pas du confucianisme , au sens prima des rapports sociaux actuels sur les personnes , mais du confusianisme .
Christian Feugnet
31/10/2018
çà a surgit à lalecture d'un texte que je juge trés important d'Orlov qui parle en termes sociaux des 0.1% .
Apparemment il se contredit , en fait il pense . Grossuérement , à l'origine de l'effondrement serait notre culture . J'emploie là le mot culture abusivement comme il convient aujourd'hui : de message écrit .et de quelque chose qui distingue plus qu'il ne rapproche des autres , soit anti-social au lieu de , mettons ...anti-systéme .
L'effondrement dont il parle est de celui des 0.1 % qui nous y entraine ( plus ou moins , voire idéalement pas du tout , ce qui est alors moins triste que sa conclusion ) .
Orlov est un specimen anti-systéme qui malgré lui , par son existence prouve que cet effondrement ne concerne pas tout le monde , à moins que par excés de sociabilité , il s'y laisse entrainer ...
Le fait est que parlant de la Chine et de sa culture il se laisse à y trouver de la persistence millénaire . Or il me semble qu'entre confusianisme et taoisme ( le fond ) il y a un gouffre . çà se matérialise avec les Han , réalisateurs du confusianisme né dans l'époque de son contraire les royaumes combattants .
Ce qui est depuis considéré comme taoisme est son antidote : le livre de Lao Tseu écrit sous la contrainte du premier Empereur Han , à son corps défendant ( ce n'est pas une métaphore , j' y viens ) , puis se refugie , dépité ( il a trahit pour sauver la culture ) , dans la Montagne . Alors que le taoisme comme l'ésotérisme Grec s'enseigne par pratique corporelle , et s'énonce oralement de maitre à disciple . Il en reste quelque chose par exemple dans la cuisine Chinoise ou la "gymnastique" du matin . Pour ce qui est de la cuisine , un détail , on la tourne dans un seul sens , le méme que celui privilégié du yi king . En général tout est pensé en termes corporels et personnels . A l'inverse du confusianisme . Il n'y a pas continuité .
Pour ce qui est de la motre , avec la finance nous approchons de la rupture générale avec les restes de "culture" dégénérés de nos " élites" , les guillemets c'est parce qu'ils se sont séparés de nous , désocialisés ,depuis longtemps , de l'écrit abusif .
Au contraire de l'élite engloutie sous les bombes en 14-18 , époque de royaumes combattants ..
Christian Feugnet
30/10/2018
Pour autant je soutiens Stanley Kubrick , car si à l'époque on disposait d'une véritable élite , le film nous parle de celle d'aujourd'hui et de sa propension à se draper de la mort des autres .
jc
30/10/2018
Si Kunstler est un vieux sage au fait depuis des lustres de l'évolution de la société US -ce que semble indiquer son ami l'ermite de Fléron- alors la description qu'il nous fait de la situation actuelle est assez inquiétante. Ainsi son impression que "La raison a été laissée au bord de la route, comme une personne trop ivre et sans la moindre conscience des choses se déshabille dans le blizzard d’une nuit glaciale."
Est-ce la raison occidentale -celle codifiée par Aristote- qui est en train de sombrer? Peut-être bien que non, peut-être bien que oui.
Pour René Thom, en effet, nous ne pensons pas selon la logique d'Aristote mais notre façon de penser est embryologique:
"La pensée conceptuelle est une embryologie permanente";
"La classe engendre ses prédicats comme le germe engendre les organes de l'animal. Tel est, à mes yeux, l'unique manière de définir ce qu'est la Logique naturelle." (entre beaucoup d'autres citations)
De ce point de vue je trouve tout-à-fait judicieux le choix par Kunstler de qualifier Trump de golden golem (on désigne figurativement comme golem la personne dont les dons intellectuels et sociaux sont demeurés à l’état brut -cf. Wikipédia-). Trump: une "nature" -ça, personne ne peut le nier- qui raisonne instinctivement selon une logique "naturelle"* venue du fond des âges, logique qui déstabilise complètement ceux, républicains comme démocrates, qui sont formatés par la bonne vieille rassurante logique "culturelle" léguée par Aristote?
Ces propos sembleront sans doute à beaucoup comme extra-galactiques. Voici ce qu'écrit Thom à la toute fin de "Stabilité Structurelle et Morphogénèse":
"Dans le domaine des sciences humaines il m'est difficile de me rendre compte si ma tentative présente quelque intérêt; mais en écrivant ces pages j'ai acquis une conviction; au coeur même du patrimoine génétique de notre espèce, au fond insaisissable du logos héraclitéen de notre âme, des structures simulatrices de toutes les forces naturelles extérieures agissent, ou en attente, sont prêtes à se déployer quand ce deviendra nécessaire. La vieille image de l'homme microcosme reflet du macrocosme garde toute sa valeur: qui connaît l'homme connaîtra l'univers. Dans cet essai d'une "théorie générale des modèles", qu'ai-je fait d'autre, sinon de dégager et d'offrir à la conscience les prémisses d'une méthode que la vie semble avoir pratiquée dès son origine."
On notera le côté prophétique du "ou, en attente, sont prêtes à se déployer quand ce deviendra nécessaire.". Les optimistes pourront y voir une raison d'espérer en attendant celle promise par "Le réenchantement de Dieu" dans le tome III de "La Grâce de l'Histoire"...
*: où c'est l'affectivité qui mène la danse (cf. par ex. ES p.73)
Alex Kara
30/10/2018
Je ne remet aucunement en cause l'abnégation de ces personnes à ce moment-là, mais je m'interroge sur l'emploi du terme "élite".
Il me semble que les élites véritables ont justement leur mot à dire sur la conduite de la guerre, et dans sa forme et dans son objectif. S'ils se content d'exécuter les ordres, ils peuvent à la rigueur être considérés comme des cadres (au sens militaire) d'élite, ou des gens d'un certain rang social, mais ils participent pas à la décision au sens où on le ferait dans des sociétés tribales ou claniques.
Il faudrait avoir les statistiques de ces "élites" qui osèrent faire la grève de la guerre (qui apparemment concerne 43% des divisions https://en.wikipedia.org/wiki/1917_French_Army_mutinies ).
La Première Guerre Mondiale reste une boucherie insensée, le simple fait qu'elle ait pu se produire doit nous interroger sur le sens du mot "élite" dans une société complexe comme la société industrielle.
On peut aussi se demander ce que la Troisième République avait de démocratique si on y fait la même chose que sous un quelconque empire oriental. Les mutins, eux, ont repris en partie leur droit politique pour un moment, et c'est cela même qui a poussé Pétain à faire ses réformes. Quelle était la part des élites là-dedans ? Sans doute pas minime.
Christian Feugnet
30/10/2018
M'évoque un monde qui vit dans les images . D'employées de bureau et de "services" . A la recherche de cruauté par manque de sensations .
Une matrice de jeux du cirque où se déploie toutes les perversités pour un plaisir illusoire , laissant ftustré . On pourrait imaginer pour le futur , des massacres d'immigrants ou de lgbtq selon les gouts , d'ailleurs à Byzance les afftontements avaient lieu sur les bancs , faute de cruauté dans l'aréne à cause du christianisme .
Faute de retour à une société productive que ce soit républicains ou démocrates , çà craint , et de toutes façon la thérapie sera longue .
jc
30/10/2018
La dégénérescence est un changement, la régénérescence aussi. Comment juger du changement -et donc du progrès- si tout est relatif, si rien n'est objectif*, si ce n'est par rapport à une permanence? Génération et corruption. Je suppose que nombre de philosophes se sont penchés sur la question.
Comment juger objectivement de la dégénérescence (ou non) d'une oeuvre d'art? Pour fixer les idées, comment -sur quels critères- Nordau aurait-il (a-t-il?) jugé le Balzac de Rodin -scuplture qui a défrayé en son temps la chronique artistique-?
D'abord quelques citations thomiennes pour planter le décor:
1. "Si la science progresse c'est en quelque sorte par définition. Alors que l'art et la philosophie ne progressent pas nécessairement, une discipline qui ne peut que progresser est dite scientifique. De là on conclura que le progrès scientifique, s'il est inévitable, n'est peut-être le plus souvent qu'illusoire."
2. "Ainsi la fonction originelle d'une philosophie de la nature** sera-t-elle de rappeler constamment le caractère éphémère de tout progrès scientifique qui n'affecte pas de manière essentielle la théorie de l'analogie."
3. "Qu'on le veuille ou non la Science est une entreprise dogmatique, puisqu'elle vise à susciter chez tout observateur la même réaction mentale en face d'un même donné scientifique, fait ou théorie."
4. "La science, actuellement, est une gigantesque industrie, dont le seul principe directeur est: "Tout ce qui peut se faire doit être fait." Il ne s'agit là -en fait- que de la poursuite du besoin exploratoire déjà présent chez l'animal."
5. "Le monde de l'analogie est un monde qui porte en quelque sorte son ontologie en soi."
6. "La théorie des catastrophes est, très vraisemblablement, le premier essai cohérent (depuis la logique d'Aristote), d'une théorie de l'analogie."
Nordau s'appuie donc sur la science de son époque -principalement celle de Morel et de Lombroso- pour développer son propos sur la dégénérescence de l'art à la fin du XIXème siècle. Il est intéressant de consulter l'article Wikipédia "Théorie de la dégénérescence" sur le sujet et de le confronter aux quatre premières citations ci-dessus. (J'y ai noté que Morel s'appuie sur le transformisme de Lamarck et que le rédacteur de l'article écrit plus loin: "Magnan est crédité de la formulation définitive de la théorie de la dégénérescence, celle qui remplace le transformisme de Lamarck par l'évolutionnisme de Darwin." Ainsi soit-il.)
Pour revenir à la question initiale de ce commentaire, question qui concerne spécifiquement l'art, Thom a écrit un article (AL) qui, entre autres, propose une méthode d'interprétation des oeuvres d'art: "Local et global dans l'oeuvre d'art", méthode que l'on peut, je crois, qualifier d'objective si l'on accepte les citations 5 et 6 ci-dessus. Thom termine le chapeau du premier article par: "Je n'ai jamais entendu dire que cette méthode ait été pratiquée depuis par quelque critique d'art que ce soit. Sans doute a-t-on pensé, dans ce milieu, que l'effort nécessaire pour comprendre les bases de la méthode ne se justifiait pas en regard de ce que fournit la sensibilité artistique immédiate: opinion que, pour ma part, je me garderai bien de contredire."
Thom: "Peut-on fonder, pourrait-on rêver une théorie "scientifique" de l'esthétique? Or il se trouve que la théorie des catastrophes -vue sous son angle le plus général, le plus philosophique- peut jeter quelques lumières sur ce problème de la génèse de l'art; de ce point de vue -et fort impérialistiquement- je serais tenté de dire qu'il n'y a pas d'art catastrophiste opposé à un art qui serait, dirions-nous, continuiste ou apollinien, mais bien que, par essence, tout art est catastrophique!" (AL p.102)
Dans la conclusion du tome II de "La Grâce de l'Histoire" PhG consacre quelques paragraphes au Balzac de Rodin, oeuvre d'art qui n'a, pour lui, rien de dégénéré, loin s'en faut. Extrait: "Je connais des personnes qui considèrent que le Balzac de Rodin est informe et qui en restent là, et je peux parfaitement comprendre ce jugement; pour mon compte et tout au contraire, je crois distinguer dans cette informité apparente, ou cette apparence d'informité si vous voulez, une sorte de perfection de la forme qui est ainsi effleurée en vérité, à cause de cette mystérieuse dimension métaphysique de l'oeuvre." (p.407)
Ma compréhension de la théorie des catastrophes n'est pas assez assurée pour tenter de mettre en pratique la méthode d'interprétation proposée par Thom (d'autant plus que mon incompétence en art est totale).
Cependant, sur les modes "Ce n'est pas parce qu'on n'a pas grand chose à dire qu'il faut fermer sa gueule" et "Je me lâche" -merci à Internet-, je vois une sculpture comme une morphogénèse, c'est-à-dire comme une succession de formes où le sculpteur part de la glaise informe, en puissance, pour arriver à la statue finie, en acte (rien que de banal, donc, jusque là, sinon peut-être la dimension métaphysique qui apparaît avec la distinction puissance/acte). Avec son Balzac Rodin s'est pour moi arrêté à mi-chemin. Et je l'imagine même (Rodin) s'appliquant à ne rien perdre sur le chemin de la génèse de "son" Balzac, en équilibrant à chaque étape la perte de puissance par un gain équivalent d'acte, de même qu'un solide en mouvement sans frottement équilibre à chaque instant sa perte de potentiel par un gain équivalent d'énergie cinétique (principe de moindre action de Maupertuis). Formatage scientifique sans doute…
*: Nordau: "Le rhétoricien verbeux expose avec plus ou moins de grâce ou d'intelligence les impressions subjectives reçues des œuvres qu'il critique (...)."
**: dont Thom se revendique
jc
29/10/2018
En mathématiques c'est la géométrie qui donne du sens à l'algèbre, qui en évite le décollage sémantique.
(L'informatique c'est du code, de l'algèbre pure, de la logique pure (en principe!). Qu'est-ce qui en évite le décollage sémantique*? Qu'est-ce qui évite, par exemple, le décollage sémantique des millions de lignes de code** permettant le décollage (réel, cette fois!) du F35?)
Depuis quelques décennies, il y a en France une pluie qui tourne au déluge, de lois, décrets, règlements et ordonnances en tous genres. Décollage sémantique assuré***. Qu'est-ce qui peut jouer le rôle que la géométrie joue en mathématiques par rapport à l'algèbre? Selon moi ce ne peut être que la légitimité qui peut (et doit) fonder la légalité: la légalité (yang) comme bord de la légitimité (yin). (Je rappelle les "principes" thomiens (ES p.176) : ABP -l'Acte est le Bord de la Puissance- et FBM -la Forme est le Bord de la Matière.)
(BB nous égrène la déjà longue liste des lois liberticides qui s'apparentent un peu plus tous les jours à du terrorisme d'Etat. En France comme ailleurs. Est-il vraiment légitime de les mettre sur le compte des terroristes du 9/11, du "Charlie hebdo" et du Bataclan? BB nous donne une réponse plus que plausible:
" Toutes les lois antiterroristes dont n’ont été esquissées ici que le squelette de quelques-unes n’ont jamais dissuadé un terroriste de passer à l’action tant il sait qu’il y perdra sa vie. Elles sont faites pour faire respecter un certain ordre, celui des donneurs d’ordres, le patronat et le CAC 40 entre autres.")
PS à propos du terrorisme d'Etat de LMEM (La Macronie En Marche):
Parmi les hexagrammes Yi Jing chinois les hexagrammes 9 et 10 s'interprètent respectivement par "le pouvoir d'apprivoisement du petit" et "la marche"****. Très forts ces chinois!
*: Thom: "S'il est vrai, comme l'a dit Paul Valéry, qu' "il n'y a pas de géométrie sans langage", il est non moins vrai -comme l'ont entrevu certains logiciens- qu'il n'y a pas de langage intelligible sans une géométrie, une dynamique sous-jacente dont ce langage formalise les états structurellement stables." (SSM p.21)
**: j'ai entendu parler de 25 millions de lignes de code.
***: BB: "chaque nouvel exécutif sollicite les élus de la nation transformés en une chambre de pur enregistrement afin qu’ils votent pour une nouvelle couche de règles et de lois. Elles viennent s’accumuler sur des sédiments déjà bien abondants amoncelés par ce phénomène parasitaire que la France absolutiste puis napoléonienne et enfin jacobine républicaine fait et exporte le mieux, une bureaucratie productrice de règlements à l’infini soit inutiles car déjà existants soit contradictoires."
****: https://fr.wikipedia.org/wiki/Hexagramme_Yi_Jing
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