Auguste Vannier
04/01/2022
Macron vient de divulguer sa stratégie politique.
Il aurait tout aussi bien pu dire dire je vais faire chier ces connards de français qui ne veulent pas de mon bon vaccin.
Comme il avait déjà dit qu'il y a des gens qui ne sont rien, qu'on trouve du travail en traversant la rue, qu'il suffit de bosser pour se payer un costard, que l'augmentation du chômage diminue…et que son quinquennat est une réussite, parce qu'après tout il à une pensée "jupitérienne"...
Psychose de la classe dirigeante qui détermine la psychose de masse covidesque et de la GCES dites-vous dans cet excellent article. Avec Macron nous avons une illustration parfaite, et l'avantage qu'elle n'a pas encore tout donné, car vous allez voir ce que vous allez voir avec sa Présidence Européenne…Il ne va pas emmerder que les Français!
jc
01/01/2022
[Je lis dans le wiktionnaire que le clerc est opposé au profane. Pour moi le profane est opposé au sacré, et ce n'est pas du tout pareil. Un laïc peut accepter d'obéir à un clerc pour la simple raison qu'il reconnaît en lui une intelligence supérieure à la sienne (cf. la citation d'Al-Kindi), alors que les rapports sacré/profane sont pour moi à un tout autre niveau. Bien entendu cela pose la vertigineuse question de l'intelligence et donc de l'intelligibilité.)]
À la révolution la royauté est devenue république, les clercs ont été symboliquement éliminés (et de plus parfois physiquement -tchac-) au profit des seuls laïcs. Étymologiquement clerc vient du grec ancien κληρικός, qui, on le sait, signifie "homme d'église" mais aussi, je l'apprends (1), "celui qui observe, qui contemple". Et je suis de ceux qui pensent que la révolution des idées (bien antérieure à 1789) a commencé quand le κληρικός a perdu son pouvoir visionnaire, pour devenir un simple homme d'église vidé progressivement de sa substance, la différence étant pour moi analogue (et concomitante) à celle où l'art, l'antique τέχνη, est devenue simple technique (et l'artisan simple technicien) (2). En termes guénoniens (du peu de ce que j'en connais) cette révolution des idées a eu pour effet d'effacer purement et simplement toute autorité spirituelle au profit du seul pouvoir temporel (3). Je suis de ceux qui pensent qu'il faut restaurer une certaine forme d'autorité spirituelle qui, seule à mon avis, permet de donner à l'organisation sociale une nécessaire stabilité (4).
En épigraphe de l'envoi de son Apologie du logos (AL) Thom cite le philosophe Al-Kindi (5) :
"Au vrai, parmi les choses tant singulières qu'universelles, ainsi que parmi les conditions des choses, certaines sont manifestes, certaines assez manifestes, certaines extrêmement manifestes, d'autres sont cachées, d'autres assez cachées, d'autres extrêmement cachées, soit pour le sens, soit pour la raison. Cette diversité est opérée par la nature des choses elles-mêmes qui les produit dans telle ou telle condition.
Parmi les hommes aussi, d'aucuns sont très aptes à percevoir, soit par le sens, soit par la raison, tandis que d'autres le sont très peu, et cela est dû à la qualité propre de chacun qui le dispose plus ou moins à la perception.
Il en résulte que certains deviennent plus sages que d'autres : est et est réputé plus sage, celui qui perçoit ce qu'il y a de moins perceptible dans les choses et dans leurs conditions. C'est pourquoi ceux qui sont formés par un saint désir de sagesse travaillent considérablement à comprendre l'occulte condition des choses.".
Il nous faut, à mon avis, impérativement reconstituer une autorité spirituelle constituée de gens "formés par un saint désir de sagesse" qui auraient dans un premier temps droit de cité, (ce qui est très loin d'être le cas actuellement) avec pour vocation d'avoir in fine droit sur la cité. Il y aurait alors, à mon avis, fondamentalement deux options pour organiser ladite cité: l'option que j'appelle aristo-démocratique et que je qualifie de transcendante, où une aristocratie dépositaire d'une autorité transcendante, impose son pouvoir au peuple, et l'option que j'appelle démo-aristocratique et que je qualifie d'immanente où c'est le peuple qui secrète sa propre aristocratie.
René Guénon est évidemment partisan de l'option transcendante si j'en juge par ce qu'il dit de la démocratie dans "La crise du monde moderne" mais je trouve son argumentation bien faible, pour ne pas dire plus : "L’argument le plus décisif contre la « démocratie » se résume en quelques mots : le supérieur ne peut émaner de l’inférieur, parce que le « plus » ne peut pas sortir du « moins » ; cela est d’une rigueur mathématique absolue, contre laquelle rien ne saurait prévaloir.".
Je suis partisan de l'option immanente pour la raison fondamentale que le continu est ontologiquement antérieur au discret (la position de Thom, penseur du continu), parce qu'on peut plus facilement secréter du discret -l'aristocratie- à partir du continu -le peuple- grâce à la notion de singularité (plis et fronces des drapés par exemple) car l'inverse est nettement plus difficile à concevoir (déploiement spatial à partir d'une singularité ponctuelle qui vient on ne sait d'où et dont on n'a aucune idée du pouvoir organisateur) .
Pour moi tout membre de l'élite, et en premier tout clerc (7), doit avoir une formation métaphysique. La pratique (8), qui, j'imagine est à la base des programmes de Sciences po, Sciences éco, etc., est pour moi loin d'être suffisante. Il doit, selon moi, auparavant avoir "fait" théorétique et "poîétique", avant d'avoir l'autorisation de "faire' pratique, indispensable pour avoir accès au pouvoir temporel dans un cadre démocratique tel que je le conçois..
1: https://fr.wiktionary.org/wiki/th%C3%A9or%C3%A9tique
2: https://www.dedefensa.org/article/dialogues-3-le-grain-de-sable-divin
3. Cf. le livre éponyme de Guénon
4. C'est l'objet de "Révolutions: catastrophes sociales?" (AL) : "Il importe d'établir qu'aucune société stable ne peut exister sans une certaine forme de pouvoir sémiologique.".
5: https://fr.wikipedia.org/wiki/Al-Kindi
6; la sélection dite naturelle telle qu'elle nous est vendue par le Système
7. qui doit, de mon point de vue, impérativement se tenir à distance du pouvoir temporel (pas question, selon moi, de théocratie dans un cadre démocratique).
8. La pratique se divise en économique, éthique et politique (Wikipédia)
jc
01/01/2022
PhG (1): "Qu’importe, l’âme poétique s’était ouverte, dans toute sa sublime splendeur, dans sa grandeur extrême, dans la douceur de son infinie nostalgie, et je réalise, à en parler comme je le fais, que j’ai mis bien du temps à la reconnaître et à l’honorer pour ce qu’elle est. Je ne crois pas une seconde que cette âme poétique, de même que les mots et les phrases qui naissent de-ci de-là, de ma plume, je ne crois pas que tout cela soit de moi ; cela m’est un don, c’est-à-dire quelque chose que l’on voulut bien me donner pour que j’en fasse le message, que j’en sois le recéleur puis le porteur et rien d’autre, rien de plus…".
Le don, la donnée, le fait ont-ils un caractère sacré ou profane: that is the question. Il est clair que, pour "nos" modernes, données -data- et faits sont des "concepts" profanes ; Thom ironise sur cette vision des choses :
"Lorsqu'on a compris – à la suite de T. S. Kuhn – le caractère « automatique » du progrès scientifique, on se rend compte que les seuls progrès qui vaillent sont ceux qui modifient notre vision du monde – et cela par l'élaboration de nouvelles formes d'intelligibilité. Et pour cela il faut revenir à une conception plus philosophique (voire mathématique) des formes premières d'intelligibilité. Nos expérimentateurs, sempiternels laudateurs du « hard fact », se sont-ils jamais demandé ce qu'est un fait ? Faut-il croire – ce qu'insinue l'étymologie – que derrière tout fait, il y a quelqu'un ou quelque chose qui fait ? Et que ce quelqu'un n'est pas réduit à l'expérimentateur lui-même, mais qu'il y a un « sujet » résistant sur lequel le fait nous apprend quelque chose ? Telles sont les questions que notre philosophe devra constamment reposer, insufflant ainsi quelque inquiétude devant le discours volontiers triomphaliste de la communauté scientifique. Bien sûr la Science n'a nul besoin de ce discours pour continuer. Mais il restera peut-être quelques esprits éclairés pour l'entendre, et en tirer profit.".
Quid des formes premières d'intelligibilité? Pour moi il ne fait guère de doute que ce sont les formes génétiques dont parle Thom (2)
Voici comment, chaussé de mes lunettes thomiennes, je vois le don de PhG. Pour faire court je vois PhG comme un nourrisson, et ses paroles comme des babils. Ce n'est pas du tout péjoratif de mon fait, tout au contraire. Ne dit-on pas en effet que la vérité sort de la bouche des petits enfants (le babil comme émission/expression/expulsion des premières formes d'intelligibilité)?
Thom :
1. "A la naissance le nourrisson est équipé d'un stock de schémas sensori-moteurs, de formes génétiques, qui se manifestent par les réflexes dits archaïques. plus tard, vers l'âge de six mois, ces schémas subissent une sorte de fonte, de catastrophe généralisée qui coïncide avec le début du babil enfantin. On peut voir dans ce babillage la volonté d'expulser, par voie articulatoire, un certain nombre de formes génétiques aliénantes, manifestation ludique d'émission, non de capture. (...) Si on ne parle pas à l'enfant entre un et trois ans, la catastrophe d'émission articulatoire (le babil) dégénère rapidement en l'émission d'un petit nombre de sons grossiers (vocalisation des "enfants-loups")." (SSM, 2ème ed., pp. 309 et 310)
2. "On sait que vers l'âge de dix-huit mois, le nouveau-né commence son babillage, il prend conscience de ses possibilités articulatoires, et -disent les spécialistes- forme à cette époque les phonèmes de toutes les langues du monde. Les parents lui répondent dans leur propre langue et, peu de temps après, le bébé n'émet plus que les phonèmes de cette langue, dont quelques mois plus tard, il maîtrisera le vocabulaire et la syntaxe. Je verrais volontiers dans le mathématicien un perpétuel nouveau-né qui babille devant la nature; seuls ceux qui savent écouter la réponse de Mère Nature arriveront un jour à ouvrir le dialogue avec elle, et à maîtriser une nouvelle langue. Les autres ne feront que babiller, bourdonner dans le vide -bombinans in vacuo." ("De l'icône au symbole", conclusion, MMM).
Mon flair me dit que tout ça s'accorde avec ce que j'imagine être PhG: il suffit de remplaçer ci-dessus mathématicien par théoréticien et Mère Nature par Dieu. Le don "qu'on voulut bien me donner" est alors celui de traduire en français la parole de Dieu "pour que j'en fasse le message".
Logocrate un jour, logocrate toujours dirait sans (aucun?) doute Semper Phi que je verrais bien adhérer à ce que dit Thom, convaincu, lui, que "le langage, ce dépositaire du savoir ancestral de notre espèce, contient dans sa structure les clés de l'éternelle structure de l'Être.".
Au seuil de cette nouvelle année (qui s'annonce chaotique) je souhaite à Semper Phi une bonne éternité.
1: La Grâce de l'Histoire" tome III.1 , https://www.dedefensa.org/article/le-desenchantement-de-dieu
2. Cf. mon commentaire "Conceptualisation".
jc
01/01/2022
Les concepts qui sortent de la fertile imagination de PhG ne sont pas figés, ils évoluent au contraire constamment (majuscule ici, gras là, trait d'union, etc) comme s'ils vivaient vraiment dans l'esprit de leur concepteur. Et c'est peut-être le concept de crise qui, pour moi, montre le plus nettement la façon que PhG a de conceptualiser.
Thom : "Il faut au contraire concevoir que tout concept est comme un être vivant qui défend son organisme (l'espace qu'il occupe) contre les agressions de l'environnement, c'est-à-dire, en fait, l'expansionnisme des concepts voisins qui le limitent dans l'espace substrat : il faut regarder tout concept comme un être amiboïde, qui réagit aux stimuli extérieurs en émettant des pseudopodes et en phagocytant ses ennemis.".
Qu'est-ce que conceptualiser, qu'est-ce que penser par concept? Thom propose la réponse suivante : "L'homme en éveil ne peut, comme le nourrisson de neuf mois, passer son existence à saisir les objets pour les mettre en bouche. Il a mieux à faire : aussi, va-t-il « penser » c'est-à-dire saisir des êtres intermédiaires entre les objets extérieurs et les formes génétiques : les concepts."(1).
Avoir un accès conscient aux formes génétiques : une spécificité de PhG par rapport à l'individu lambda qui n'y a accès qu'inconsciemment, guère plus qu'un animal? Un rapport avec sa mystérieuse et légendaire intuition haute?
Thom : "(...) l'homme est pourvu d'un dispositif universel qui, sur un champ de dynamique neuronique, peut en reconstituer le centre organisateur. Véritable gonade mentale, ce dispositif condense les champs en mots, vraies semences d'idées ; placé dans un contexte approprié, le mot germe et éclate dans l'esprit de l'auditeur, et la forme globale ainsi reproduite est l'idée. Ainsi, la pensée conceptuelle est une Embryologie permanente.
Thom : "L'émission verbale est un véritable orgasme."
PhG (2) : « Il suffit d’un mot, d’une phrase, d’une citation à placer en tête, la chose inspiratrice qui ouvre la voie et là-dessus se déroule le texte, à son rythme, entièrement structuré, avec sa signification déjà en forme et en place. Je n’ai rien vu venir et j’ignore où je vais, mais j’ai toujours écrit d’une main ferme et sans hésiter… et toujours, à l’arrivée, il y avait un sens, une forte signification, le texte était devenu être en soi… C’était un instant de bonheur fou. »
La théorétique est, je viens de le vérifier (3), a trait "à la connaissance conceptuelle, au savoir et non à l'action" et . Pour moi PhG est typiquement un théoréticien; et ainsi peut-être, tel Monsieur Jourdain, un petit peu mathématicien sans le savoir (4).
(1) Thom parle des formes génétiques pp. 303 et 304 de SSM. En gros ce sont les formes archétypes, les formes fondamentales, comme la forme d'un œuf pour la poule qui doit le couver, d'un téton de la mère pour les lèvres du nourrisson ou d'un bec pour l'oiseau (l'oisillon) qui doit donner (recevoir) la becquée. Parmi les singularités thomiennes figurent le "bec à bec", et la "lèvre" (SSM, pp. 66 et 67). Il revient à ce propos à l'embryologie p. 304 : "on aurait tort de se représenter ces formes comme des sortes d'engrammes fixés définitivement, comme une empreinte sur une plaque photographique. En réalité ces formes sont définies dynamiquement, par une sorte d'embryologie permanente, qui se prolonge en la chréode motrice focalisée sur la forme. ".
(2) "La Grâce…", tome III.1 , https://www.dedefensa.org/article/le-desenchantement-de-dieu
(3) https://fr.wiktionary.org/wiki/th%C3%A9or%C3%A9tique
(4) Allusion à mon commentaire "L'aveugle et le paralytique".
Jean-Claude Cousin
01/01/2022
Réponse DEUX (suite)
Il y a quelques jours un universitaire a fait le voyage au Kivu, pour constater là-bas l'application de cet esclavage, y compris des enfants. Gageons que son compte-rendu, s'il n'est pas volontairement mis sous le boisseau par ceux qu'il gênerait, pourrait être un coup de tonnerre. Ajoutons que ce qui est extrait au Kivu sert aussi, coup double, à maintenir dans une sorte d'esclavage de la pensée entretenu par des téléphones omniprésents : certains y passent des heures chaque jour, des heures où ils passent à côte de la vraie vie, des heures sous la coupe faussement bienveillante des GAFA.
Est-ce par pressentiment ? Il y a dix ans j'avais pris la peine d'écrire quelques pages, qui pourraient bien être la trame d'une autre donne.
https://ti1ca.com/t8oqg46m-Anarchie-A5-2018-08-Anarchie-A5-2018-08.pdf.html
Depuis, quelques mots ont été corrigés, sur la forme, mais le fond est resté intact. Bien entendu cette proposition d'aller dans une tout autre direction suppose que TOUT, oui, absolument tout ce qui fait le tissu administratif actuel n'existe plus. Là-dessus, on repart à zéro, avec pour postulat que NUL n'est au-dessus de quelque façon que ce soit, mais aussi NUL n'est en-dessous. Une façon de garder l'optimisme auquel, malheureusement pour lui, Michel Houellebecq ne paraît pas abonné.
Jean-Claude Cousin
01/01/2022
Réponse UN
Eugène Pottier avait eu cette phrase pessimiste « Du passé faisons table rase », je ne pense pas que ce soit judicieux. Du passé lointain a découlé un passé plus proche, de grandes choses ont été bâties, de grandes erreurs ont été accomplies parfois de manière très volontaire.
Il ne faut pas, non, il ne faut pas dire « rien qui ne soit matière de doute et d’inquiétude » : en fait ce sont des penseurs rétribués qui le profèrent sur tous les tons, afin d'affaiblir le tissu solide de la France. Elle seule a eu le courage de mettre en place la laïcité, car la loi qui aura bientôt cent ans a été le fruit de dizaines, voire de centaines d'années de réflexions. Diderot fut l'auteur de certaines de ces réflexions, d'Olbach également, mais ils s'étaient hissés sur les épaules de géants comme Giordano Bruno, et bien plus tôt encore, Abélard.
Aujourd'hui cette laïcité, qui est le fondement même de la façon de penser en France, face au communautarisme si prisé ailleurs, cette laïcité est avilie par des “philosophes” qui la travestissent parce qu'ils en ont peur. Sereine, elle considère tous les humains comme égaux en droits et en devoirs, ce que ne peuvent supporter des psychopathes qui se veulent supérieurs. La laïcité rejette l'esclavage et ses variantes, qui sont devenus pourtant le fondement de la société actuelle.
jc
31/12/2021
Partant du principe que "les situations dynamiques régissant l'évolution des phénomènes naturels sont fondamentalement les mêmes que celles qui régissent l'évolution de l'homme et des sociétés" (ma citation thomienne favorite) il est naturel de considérer qu'un corps social puisse lui aussi être malade. Or "Très fréquemment, épuisé par l'effort de son ascension dans ces régions arides de l'Être, le métaphysicien s'arrête à mi-hauteur à un centre organisateur partiel, à vocation fonctionnelle. Il produira alors une "idéologie", prégnance efficace, laquelle, en déployant cette fonction, va se multiplier dans les esprits. Dans notre métaphore biologique ce sera précisément cette prolifération incontrôlée qu'est le cancer." (extrait de ma citation onto-thélogique thomienne unique et néanmoins favorite).
Je viens de réaliser ce que veut peut-être dire Thom lorsqu'il parle ici de vocation fonctionnelle et de fonction. Il veut dire, je crois, qu'un être -même l'Être suprême, l'Être en soi- se définit par sa structure mais aussi par sa fonction, c'est-à-dire que la structure de l'être est inséparable de sa fonction (comme la puissance est inséparable de l'acte et la forme inséparable de la forme). Thom écrit à ce propos :
"La célèbre controverse académique de 1830 entre Georges Cuvier et Étienne Geoffroy Saint-Hilaire présente un intérêt théorique considérable. C'est grâce à elle en effet que s'est posé le problème des rapports entre structure et fonction.(...) Cuvier, créationniste, ne reculait pas devant la finalité. (...) Geoffroy, lui, se targuait de matérialisme et refusait les causes finales.".
Je ne serais pas étonné d'apprendre que dans toutes les théogonies Dieu est considéré comme un Être vivant. Et un être vivant a toujours au moins une cause finale : celle de persévérer dans son être, ce qui exige ou est en rapport étroit, à mon avis, avec la stabilité structurelle. Je n'imagine pas non plus qu'il y ait des théogonies où Dieu finisse par mourir. Par contre c'est le cas pour les êtres inférieurs, que ce soient des individus, des espèces ou des civilisations. Thom : "(...) il y a une certaine incompatibilité entre l'immortalité de l'individu et les possibilités évolutives ultérieures de l'espèce. La mort serait alors le prix à payer pour préserver toutes les possibilités de perfectionnement futur de l'espèce." ; "(...) il m'est difficile de voir pourquoi un être pleinement différencié ne pourrait être immortel.".
L'apoptose est un fait biologique. Si les dynamiques sont les mêmes dans tous les cas (cf. ma citation thomienne favorite) alors on peut imaginer que les civilisations puissent recevoir un ordre venu de plus haut de se suicider pour laisser la place à la civilisation suivante. Une explication (très spéculative!) à la curieuse situation actuelle dans le bloc BAO (cancel culture, wokenisme, etc.)?
La religion d'un genre nouveau esquissée dans mes commentaires de "Structure crisique" me semble visiblement universelle, c-à-d valide dans tout l'univers donc en particulier sur notre Terre. À-t-elle des chances d'être acceptée? Cause finale, dessein intelligent, créationnisme…Thom dit que c'est une (la?) métaphysique minimale permettant de redonner du sens au monde. Métaphysique, cause finale, dessein intelligent, créationnisme : j'entends déjà hurler les chiens de garde du Système. Hurler à la mort?
jc
30/12/2021
Avec mes considérations sur la Crise-Dieu qui m'ont emmené en métaphysique extrême (je ne suis pas déçu de mon voyage) je redescend en métaphysique normale.
À la fin de SSM Thom évoque la décomposition de l'empire d'Alexandre :
"Il serait tentant d'envisager l'histoire des nations comme une suite de catastrophes entre formes métaboliques ; quel exemple de catastrophe généralisée que la décomposition d'un grand empire, comme celui d'Alexandre. Mais il faut de toute évidence se borner ; dans un sujet comme l'Homme, on ne saurait pénétrer qu'à la surface des choses.".
Je me demande si envisager l'histoire "comme une suite de catastrophes entre formes métaboliques" n'est pas très exactement envisager l'histoire comme l'Histoire majusculée, c'est-à-dire comme la métahistoire au sens de PhG. Pour qu'il en soit ainsi il faudrait que la chaîne crisique (c-à-d la suite de catastrophes entre formes métaboliques) soit une chréode (1). PhG se retrouverait alors face à l'histoire exactement dans la même position que Thom face à la Biologie : saut métaphysique est incontournable, raison à mon avis fondamentale pour laquelle la théorisation thomienne de la Biologie est refusée par les scientifiques actuels. Grasset et Thom même combat?
Les catastrophes anaboliques et cataboliques (évoquées en Structure et fonction.1) sont des catastrophes généralisées. Il y en a d'autres. Ces catastrophes ont toutes en commun de ne pouvoir être rationnellement formalisées (2), ce qui est déjà un indice qui renforce l'intuition de PhG selon laquelle on est nécessairement dans le domaine de la métaphysique.
1: Notion introduite par l'embryologiste anglais Waddington, généralisée par Thom.
2: Thom : "Une catastrophe généralisée n'est pas un processus formalisable car la déduction logique vérifie l'analogue formel du principe de Curie [toute symétrie des causes se retrouve dans les effets] : dans un système formel, tout automorphisme d'un système de prémisses s'étend en un automorphisme de l'ensemble des conclusions." (SSM, 2ème ed., pp.104 et 105)
jc
30/12/2021
En fouillant sur le site ce que PhG dit à propos des crises en général j'ai parcouru l'article "Notes sur notre “kosmos crisique” avec plus d'attention avec des concepts soigneusement nommés et définis: structure crisique, chaîne crisique, infrastructure crisique (qui appellera sans doute celle de superstructure crisique ou de métastructure crisique quand cette fameuse crise qui monte actuellement en puissance va réellement s'emballer).
Ce qui m'a attiré dans ces Notes c'est l'inversion du sens. Le sens naturel est, selon moi, lorsque la fonction crée l'organe, c'est-à-dire lorsque la fonction s'impose à la structure. Lorsqu'il y a inversion du sens, c'est-à-dire quand c'est la structure qui s'impose à la fonction, c'est pour moi un signe de vieillissement du système considéré (ici, bien entendu, du Système). C'est un mauvais signe pour le Système car il est le signe un manque d'adaptabilité (typiquement La Redoute, la Poste, face au tout nouveau e-commerçants pour qui le principe lamarckien joue à fond). Mais le fait que la catastrophe soit furtive ("PhG parle de déferlement furtif", "de trou noir silencieux") m'incite à penser à une autre cause d'inversion catastrophique.
Dans sa classification des catastrophes (plus de entrées 30 à ce mot dans l'index de SSM!) figurent justement les catastrophes silencieuses, catastrophes qui se caractérisent par l'augmentation de la dimension de l'attracteur, soit par bifurcation (dédoublement) soit par couplage avec un autre attracteur. Thom écrit à son propos : "En embryologie, la catastrophe silencieuse signifie en principe un gain de compétence mais, comme il s'agit d'une transformation continue, elle ne donne, en principe, naissance à aucune morphogenèse.". Peut-être l'intuition qu'a PhG de la situation est-elle mieux décrite par une catastrophe anabolique (formation d'attracteurs de dimension plus grande) ou catabolique (désagrégation de l'attracteur au profit d'attracteurs de dimension plus petite)? Le rôle de la catastrophe silencieuse en morphogenèse est indiqué dans l'article fondateur "Une théorie dynamique de la morphogenèse" (MMM), paragraphe "La finalité en Biologie".
(1) https://www.dedefensa.org/article/notes-sur-notre-kosmos-crisique
jc
30/12/2021
PhG : "Pour nous, cette révolution structurelle décisive, préparée par divers événements (diverses crises) s’est faite avec l’ensemble Covid-wokenisme apparu en 2020, – dont il est évidemment complètement inutile de chercher une explication historique et rationnelle, – ni du Covid, ni du wokenisme, ni du reste.".
PhG insiste ici -et aussi ailleurs- sur le fait qu'il est inutile de chercher une explication rationnelle à la crise qui nous secoue. Je ne suis pas d'accord avec ça, je l'ai déjà souvent dit en commentaire et je le redis ici. La rationalité n'étant rien d'autre qu'une déontologie dans l'usage de l'imaginaire, rien ne dit qu'en changeant de déontologie on ne va pas tomber sur une autre rationalité qui nous permettra de voir les choses autrement et plus nettement. Il apparaît de plus en plus clairement que les principes qui fondent notre rationalité occidentale (identité, non-contradiction) sont mis à mal depuis l'apparition de la Physique quantique (le chat de Schrödinger, à la fois mort et vivant).
Le langage naturel a pour Thom une origine embryologique qui calque l'origine embryologique du monde comme esquissé dans mon commentaire "ontologie". Autrement dit, à condition d'utiliser le langage en logocrate (comme PhG s'attache scrupuleusement à le faire) et sans le saccager (comme "on" est en train de le faire), ce langage naturel est une base solide pour fonder une nouvelle rationalité. Le problème est que c'est seulement une base, base qui ne permet pour l'instant pas d'aller au-delà. Thom:
1: "L'ambition ultime de la théorie des catastrophes, en fait, est d'abolir la distinction langage mathématique-langage naturel qui sévit en science depuis la coupure galiléenne. quel est l'intérêt des la mathématisation en physique? C'est qu'on peut, par le calcul sur les nombres, faire des opérations que ne permet pas le raisonnement sur des concepts en langage ordinaire. Une modélisation géométrique de la pensée verbale ordinaire n'aura d'intérêt que si l'on peut, grâce à elle, aboutir à des assertions que ne permet pas de fournir la logique usuelle du langage naturel. Cela suppose qu'on puisee: 1) modéliser géométriquement toutes les déductions (rigoureuses) de la pensée ordinaire. Autrement dit : réaliser le rêve leibnizien de la "caractéristique universelle" ; 2) aller au-delà.
La partie 1 de ce programme "énorme" n'étant pas réalisée (et de loin), il est sans doute prématuré de considérer la partie 2. J'ai cependant déjà rencontré des propositions à caractère "translogique" fournies par le modèle géométrique et que rejetait le bon sens ordinaire. Ainsi de l'assertion : "le prédateur affamé est sa propre proie" qui, selon moi, est à la base de l'embryologie animale." (AL, p.409) ;
2: "Je suis convaincu que le langage, ce dépositaire du savoir ancestral de notre espèce, contient dans sa structure les clés de l'éternelle structure de l'Être." ;
3. "La pensée conceptuelle est une embryologie permanente." ;
4. "La classe engendre ses prédicats comme le germe engendre les organes de l'animal. Il ne fait guère de doute, à mes yeux, que c'est là l'unique façon de définir la Logique naturelle" ;
5. Ce que dit Thom dans le dernier chapitre de la deuxième édition de SSM (mais pas la première) intitulé "De l'animal à l'homme : pensée et langage" ouvre des perspectives selon moi assez vertigineuses.
jc
30/12/2021
[ Dans "Ontologie" lire x->x⁴ + ax² + bx pour le déploiement de x->x⁴ ]
Le lecteur ayant parcouru et l'article du glossaire et mes commentaires aura peut-être été frappé par le net décalage entre l'approche hautement intuitive et quasi-mystique de PhG et celle beaucoup plus nette de Thom.
Thom écrit à ce sujet:
1. "(...) il y a une certaine opposition entre géométrie et algèbre. Le matériau fondamental de la géométrie, de la topologie, c'est le continu géométrique ; étendue pure, instructurée, c'est une notion « mystique » par excellence. L'algèbre, au contraire, témoigne d'une attitude opératoire fondamentalement « diaïrétique ». Les topologues sont les enfants de la nuit ; les algébristes, eux, manient le couteau de la rigueur dans une parfaite
clarté."
2. "Si l'on veut comprendre l'auteur, il faut jouer le jeu et rentrer dans son monde. Sans doute y a-t-il beaucoup de cas, récents, où le jeu n'en vaut pas la chandelle. dans ma propre écriture, je mêle de manière quasi indissoluble la pensée verbale et l'idéalité mathématique. Cela ne va pas sans inconvénient. Ce style mixte irrite le mathématicien professionnel, habitué à traiter mathématiquement l'être mathématique; et déconcerte le non-géomètre (αγεωμέτρητος) à qui la face mathématique de ma pensée échappe irrémédiablement. Mais je vis de ce contact, et si ma pensée a quelque valeur, c'est de cette symbiose qu'elle la tire. la pensée purement mathématique, quand elle est formalisée, est aveugle, mais capable de marcher, et même fort loin. La pensée intuitive, au contact du réel, est le paralytique de la parabole, qui voit, mais ne peut pas progresser sûrement." (AL, p.503)
jc
30/12/2021
On trouve dans "Structures et fonction en biologie aristotélicienne" (AL), le passage suivant qui me semble en rapport avec ce que dit PhG du Temps crisique :
"On peut métaphoriquement représenter le concept de fonction par une fronce d'hystérésis associée à l'opposition de deux temps : un temps "atemporel", une éternité vide d'évènements, ce que les anciens Grecs appelaient aiôn, et un temps qualitativement spécifié, chronos, celui qui est porteur d'évènements catastrophiques, et où se déroule l'exécution d'actes. (...) Toute fonction apparaît alors comme un pli des temps sur l'espace-temps." (p.257).
On voit que, dans ce cas, il y a une respiration : phase de tension suivie d'une phase de relâchement, que l'on retrouve un peu partout (par exemple systole/diastole, inspiration/expiration,voire guerre/paix). Cela suggère l'idée d'un monde perpétuellement en crises pendant lesquelles est consommée de l'énergie active (ἐνέργεια) entrecoupées de périodes de repos pendant lesquelles le monde emmagasinant de l'énergie potentielle (δυναμικός) destinée à être transformée en énergie active pour de futurs travaux. On retrouve là, il me semble, une idée développée jadis par PhG (1).
En fait, si l'on regarde la Crise-Dieu du point de vue esquissé dans mes précédents commentaires, cette crise est embryologique et il est clair que le développement de l'embryon à partir de l'œuf fécondé est une succession de crises. Le choix de Crise-Dieu est, àmon avis, fort bien venu parce que cette crise est embryologique (2).
(1) https://www.dedefensa.org/article/le-rythme-contraction-extension-de-la-crise
(2) dont il découle que le Dieu Kosmos doit être pensé comme vivant.
jc
29/12/2021
Pour Thom il ne fait aucun doute que, dans les sociétés, c'est la fonction qui crée l'organe. Il me semble en effet clair que tout logisticien qui se respecte est lamarckien lorsqu'il s'agit d'organiser son job et que d'une façon générale, on s'organise pour que ça fonctionne (ce ne seront pas les logisticiens qui me contradiront). Ainsi le Dieu Khaos (en puissance) n'est pas entièrement libre, car il est contraint de se débrouiller pour que le Dieu Kosmos (en acte) fonctionne. Thom : "(...) j'accepte, en biologie, le principe lamarckien : la fonction crée l'organe. C'est un principe que les biologistes actuels refusent absolument. Ils pensent, par exemple, que si nous voyons c'est parce que nous avons des yeux et pas du tout parce que d'une certaine manière la vie a décidé de fabriquer des yeux pour voir !"(1).
Remarque finale : On retrouve le problème avec les homéomères et les anhoméomères d'Aristote : "L'opposition homéomère-anhoméomère recoupe donc -en un certain sens- l'opposition centrale de la physique aristotélicienne, celle de la puissance et de l'acte. (...) Ainsi donc, si les homéomères définissent la structure, les anhoméomères sont étroitement liés à la fonction." ("Structure et fonction en biologie aristotélicienne", AL p.255).
(1) Cf. le film fait par JL Godard sur Thom, à 40', dispo sur la toile.
jc
29/12/2021
Identifiant (à tort ou à raison…) la Crise-Dieu à l̈́'Être en soi, on est amené, par l'analogie thomienne génialissime considérée précédemment, à l'associer à la fonction indéfiniment différentiable inspécifiée et indifférentiée, -l'œuf cosmique-, fonction qu'on peut voir comme l'âme du développement en série de Taylor de cette fonction -l'arbre cosmique-. La Crise-Dieu est alors assimilée au Dieu Khaos, crise-Dieu en puissance, âme du Dieu Kosmos, crise-Dieu en acte.
L'intérêt de la théorie des catastrophes est qu'on a alors une petite idée de la structure du Dieu Khaos et du Dieu Kosmos -et donc de la crise-Dieu-, car on peut découvrir progressivement leur ontologie. À la base on a l'être le plus simple qui soit, représenté par la fonction x->x² qui est son propre déploiement, c'est-à-dire qu'à la base Khaos et Kosmos sont identiques : c'est l'être d'une stabilité structurelle absolue, persévérant imperturbablement dans son être (Spinoza) quand on tente de le perturber. Au stade suivant on a un être un peu plus élaboré représenté par la fonction x->x³ pour Khaos, âme de Kosmos représenté par le déploiement "corps-et-âme" de cette âme, à savoir la fonction x->x³ + ax (a paramètre dit "de déploiement"), âme cette fois structurellement instable qui est stabilisée par son déploiement: on a ainsi un renseignement sur Khaos: si on veut dialoguer avec lui il faut le faire dans le plus grand recueillement, extrême sensibilité -due à l'instabilité structurelle- oblige! (1). À l'étape suivante on a x->x⁴ pour Khaos et x->x⁴ pour Kosmos et ainsi de suite, les "véritables" Khaos et Kosmos trônant "évidemment" au sommet infiniment haut d'un "arbre de Jacob" dont les trois branches les plus basses sont celles ci-dessus.
Dans une interprétation linguistique de cet "arbre de Jacob", Khaos est le Verbe et Kosmos est la phrase élémentaire qui donne sens à ce verbe en saturant ls valence par des substantifs -typiquement "Le chat mange la souris." pour un phrase SVO- (et ainsi le Verbe se fait Chair). Linguistiquement Thom associe à l'âme x->x² le verbe être (on ne peut rien dire de cet être qu'une seule chose : il est), puis commencer ou finir à x->x³ et diviser et unir à x->x⁴ qui sont les évènements crisiques les plus courants.
Remarque finale : On voit donc qu'il est plus difficile de remonter l'arbre de Porphyre que le redescendre puisqu'il s'agit d'isoler l'âme du corps-âme. L'âme est au corps ce que la vue est à l'œil, disait Aristote…
(1) Ce que Grothendieck dit faire dans "La clef des songes" lorsqu'il dialogue avec Dieu.
jc
29/12/2021
En actionnant mon moteur de recherche général je constate que c'est Edgar Morin qui occupe le terrain de la crisologie : a priori très peu pour moi, car classé -peut-être à tort- "du camp d'en face".
PhG en donne ici la définition suivante :
« La science intuitive du phénomène de la crise, c’est-à-dire l’acquisition d’une connaissance par l’intuition appuyée sur l’expérience pour le domaine de l’humain ; soutenue par un savoir d’origine ancestrale sinon éternel, extrahumain et au-dessus de l’humain, qui nous est donnée sans reconnaissance ni autorisation de notre conscience (“à l’insu de mon plein gré” comme dit l’autre), sans aucun savoir ni connaissance, – au-delà, [c’est-à-dire décisivement] dans l’inconnaissance pure. ».
Pour moi cette définition a tout à voir avec la notion d'ange gardien, dont il était question au catéchisme de ma jeunesse, ange qui, à l'insu de notre plein gré, nous prévient de la façon dont nous devons réagir à un évènement -un changement donc- qu'il pressent (pré-sent) pour nous; et la définition s'éclaire si on identifie crise et évènement (pensé comme une rupture phénoménologique dans le déroulement du Temps) c'est-à-dire comme une catastrophe thomienne), identification qui ne me semble pas déraisonnable (1). Bien entendu il le dit différemment, mais je pense que pour lui cette idée lui est absolument fondamentale pour échafauder une théorie de l'évolution du vivant (évolution des espèces si l'on veut…) différente de celle de Darwin :
"Comment s'expliquer ce processus d'apprentissage [qui permet l'adaptation adéquate]? Un darwinien orthodoxe dira que seuls survivent les systèmes (les individus] pour lesquels cette adaptation est suffisamment réalisée… mais chez les animaux supérieurs nous savons parfaitement qu'il y a apprentissage par l'affectivité: les choix malheureux conduisent à la douleur, les choix heureux au bien-être. À la sélection par la mort a succédé la sélection par l'affectivité. L'affectivité peut donc être vue comme une rétroaction du flux final ramifié sur la dynamique de commande des pré-programmes. Et je n'ai jamais compris pourquoi ces effets de rétroaction ne pourraient être transmis héréditairement [Thom lamarckien…] (au niveau des modes de stimulation du génome, sinon sur la composition de l'ADN lui-même), ce que nie la biologie moléculaire classique." (AL, p.159).
(1) Pour être plus précis le concept de crise relève du biologique au sens que Thom donne à cette expression dans son article "Crise et catastrophe" : "On posera donc en principe que la crise comporte toujours un élément subjectif, elle ne peut apparaître que chez un être pourvu de conscience. (...) Si, à cause de sa composante subjective, le concept de crise déborde le cadre de la Dynamique, il n'est pas non plus du domaine de l'humain, du psychologique. En fait, ce concept relève proprement du biologique.". Il faut lire l'article pour en savoir plus.
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