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In principium erat harmonium ?.1

jc

  19/12/2020

Je suis allé un peu vite en écrivant que les quatre principes du pape François étaient Thom -compatibles. Je dois des précisions pour le deuxième. Pour Thom, en effet, si l'unité prévaut sur le conflit -deuxième principe franciscain-, c'est parce que le continu précède ontologiquement le discret, position théologique. Il ne conçoit pas les mathématiques comme Aristote (pour qui elles sont connaissance des substances extraites de la matière), mais plutôt comme une théologie (connaissance des substances séparées de la matière (1) ).

Pour Thom (comme pour Aristote et le Dieu de la Bible), l'acte fondateur sépare, plus précisément différencie (2), l'unité pouvant ainsi être récupérée par intégration.

Peut-être la position de Grothendieck est-elle opposée, c'est-à-dire que l'acte fondateur est pour ce dernier une réunion, comme le suggère le sous-titre de "La clef des songes", qui est "Dialogue avec le bon Dieu", et cette phrase extraite de (3) :

"C'est Alexander Grothendieck qui parle pour la première fois de motifs dans une lettre à Jean-Pierre Serre datée de 1964, suivant une analogie musicale, espérant révéler « le “motif commun” (la “raison commune”) derrière cette multitude… ».

Le Verbe en musique ? In principium erat verbum aut in principium erat carum ?


(1) Thom : "En dépit de mon admiration pour Aristote, je reste platonicien en ce que je crois à l'existence séparée ("autonome") des entités mathématiques, étant entendu qu'il s'agit là d'une région ontologique différente de la "réalité usuelle" (matérielle) du monde perçu. (C'est le rôle du continu -de l'étendue- que d'assurer la transition entre les deux régions.)" (ES, p.245)
(2) L'analogie différenciation cellulaire à partir d'un œuf totipotent/différentiation d'une fonction non spécifiée (indifférentiée) est fondamentale pour Thom (SSM, 2ème ed., p.32)
(3) https://fr.wikipedia.org/wiki/Motif_(g%C3%A9om%C3%A9trie_alg%C3%A9brique)#La_naissance_de_la_th%C3%A9orie_des_motifs
 

Mythologie : de la technique à la technologie

Article lié : Alors que meurt la République...

jc

  19/12/2020


Tom Luongo : "Une mythologie, cependant, est quelque chose qui vaut la peine d'être reconstruit pour ne pas permettre aux barbares d’Obama de réaliser leur besogne de destruction. Je crois que Gabbard comprend cela."

Dans sa "Classification des sciences et des techniques", classification RSI "à la Lacan", (AL) Thom distingue techniques et technologies :

"Langage, mythologie, institutions sociales sont des techniques de l'imaginaire. C'est seulement avec la mathématique qu'on voit apparaître la première technologie de l'imaginaire." (p.538).

Il classe la physique et la chimie comme des disciplines symboliques, en sandwich entre l'imaginaire (la mécanique -newtonienne, einsteinienne, quantique) et le réel (la biophysique et la biochimie), la biologie étant, elle, une discipline réelle. Et il note (le dernier mais pas le moindre pour moi) que les mathématiques ont un accès direct au réel, par le rêve.

Wikipédia (Théologie) : "Aristote distingue trois parties dans la philosophie « théorétique » : la mathématique (connaissance des substances abstraites de la matière), la physique (connaissance des substances immergées dans la matière) et la théologie (connaissance des substances séparées de la matière).".

Thom n'a pas le même regard qu'Aristote sur les mathématiques, comme en témoigne sa théorie des catastrophes, théorie de l'analogie "hors substrat" (ou ayant pour substrat la notion mystique de continu, ce qui revient à peu près au même).

Claude Lévi-Strauss a étudié "sur le terrain" différentes mythologies. Je pense qu'avec sa formule canonique du mythe (1), il est passé du concret à l'abstrait (2), de la technique à la technologie, Sa formule "analogique" -c'est une proportion de proportions- a évidemment inspiré les thomiens (3). Elle fait apparaître une inversion, constatée par CLS sur le terrain, qui lui semble indispensable à la stabilité structurelle de toute construction sociale. J'ai essayé d'en tenir compte dans mon essai de monarchie populaire (4) :

"Suit alors immédiatement la cérémonie d'allégeance. Le président de la VIème république met un genou au sol devant le couple royal [deux enfants] qui pose la question: Michel, est-ce que nous pouvons avoir confiance en toi ? Si ta réponse est oui alors dis-le, relève-toi, étends tes mains au dessus de nos têtes et dis: Je le jure".


(1) https://fr.wikipedia.org/wiki/Formule_canonique_du_mythe
(2) Laurent Schwartz (matheux médaillé Fields français) : "L'abstrait n'est que du concret auquel on s'est habitué" , à rapprocher du "Abstraire n'est pas mentir. Quand il abstrait le mathématicien ne ment pas" d'Aristote (ou de Thomas d'Aquin ?).
(3) En particulier le matheux-philosophe Jean Petitot et l'anthropologue Lucien Scubla.
(4) Cf. mon commentaire de https://www.dedefensa.org/article/onfray-lost-in-covid
 

In principium erat harmonium ?

Article lié : La parabole des 15 milliards

jc

  18/12/2020

[Latinus cuisinum ?]

Dans la cosmogonie thomienne le temps précède ontologiquement l'espace, ce qui signifie que l'arithmétique précède ontologiquement la géométrie; une lecture attentive de (1, pp.317 et 318) montre que l'harmonie est essentielle à la construction d'une représentation mathématique du temps. Ce qui fait qu'on peut affirmer qu'au principe était l'harmonie, harmonie des sons d'abord -arithmétique d'abord- , harmonie des figures ensuite -géométrie ensuite (2), harmonie des sons et des figures enfin (3).

Pour Platon Dieu est géomètre, et pour Thom le géomètre est Dieu (4). Mais du fait qu'il donne la préséance ontologique du temps par rapport à l'espace, il suit que Thom admet implicitement que l'arithmétique précède ontologiquement la géométrie, et donc que Dieu est d'abord arithméticien, ce qui donnerait raison à Pythagore (5) et… à Grothendieck. Avec la femme sédentaire (Kane et non Caïn) et donc temporelle, et l'homme nomade (Abel) et donc spatial, on arrive à la conclusion que la femme précède ontologiquement l'homme : près réflexion il semble effectivement plus naturel qu'Adam naisse d'entre les basses-côtes d'Ève -comme d'hab- plutôt qu'Ève naisse de la côte d'Adam! (Je trouve que Guénon écrit de belles et profondes choses à ce sujet dans son "Caïn et Abel" (chap.XXI de "Le règne…".)


(1) "La mathématique essentielle", AL, pp.314 à 325.
(2) Le fait que l'unité de longueur moderne soit définie à partir d'une fréquence (qui est l'inverse d'un temps) va dans ce sens.
(3) Les matheux connaissent  ce problème sous le nom de "Problème de Kac : peut-on entendre la forme d'un tambour ?".
(4) Thom, "Infini opératoire et réalité physique".
(5) "Tout est nombre."
 

PéPé et MéMé.1

Article lié : La parabole des 15 milliards

jc

  18/12/2020

Je vois PP&MM comme un mouvement aristo-populiste dont l'objectif est d'instaurer une monarchie populaire (1) gouvernée par les meilleurs d'entre eux (aristocratie) qui remettrait l'église au centre du village : village Astérix pour le village, abbaye de Thélème pour l'église. Goscinny et Rabelais. Pierre de Villiers (?) et une Madame sans gêne (mais pas sans gènes) (2) à trouver. En même temps "Vox populi, vox Dei" et "Vox Dei, vox populi" (3).


(1) Esquissée en commentaire de https://www.dedefensa.org/article/onfray-lost-in-covid
(2) https://fr.wikipedia.org/wiki/Madame_Sans-G%C3%AAne
(3) Héraclite : "L’harmonie suprême est coïncidence des contraires."

PéPé et MéMé

Article lié : La parabole des 15 milliards

jc

  18/12/2020

Parti Patriotique (PP) et Mouvement Matriotique (MM).

Chateaubriand: "La France est ma patrie et la Bretagne ma matrie." (1)

PP : parti patriotique masculin et jacobin. Archétypes : Père, Ulysse, Mont palatin, Ciel, Espace.
MM: parti matriotique féminin et girondin. Archétypes : Mère, Pénélope, petit Liré, Terre, Temps.

Partis distincts mais destinés à s'entendre ou parti unique PP&MM ?

Condition d'adhésion : faire passer l'intérêt collectif avant son intérêt individuel, servir avant de se servir (2); condition que, selon moi, remplit "génétiquement" la mère avec sa progéniture, "fond de commerce" du MM; et condition que remplissent les militaires qui ont choisi le métier des armes jusqu'au sacrifice suprême (j'y verrais bien également des gens comme Zemmour).  

(1) “Les pieds me brûlaient à Paris, je ne pouvais m'habituer au ciel gris et triste de la France, ma patrie; qu'aurais-je donc pensé du ciel de la Bretagne, ma matrie, pour parler grec?” (Mémoires d'outre-tombe, 1848)
(2) À mon avis condition sine qua non pour adhérer à n'importe quel parti politique.

In principium erat carum

Article lié : La parabole des 15 milliards

jc

  18/12/2020


Je prolonge ici -titre oblige- un commentaire des quatre principes du pape François commencé en Éloge des frontières.2.

Je commence par une remarque à la Finkielkraut : qu'est-ce qu'il se passe au Vatican (1)?

Les quatre principes sont :

1. Le temps est supérieur à l'espace.
2. L'unité prévaut sur le conflit.
3. La réalité est supérieure à l'idée.
4. Le Tout est supérieur à la partie.

(J'ai déjà commenté ici ces principes, mais je ne me souviens plus de ce que j'en disais…)

Dans Éloge des frontières.2 j'ai féminisé le temps et masculinisé l'espace. Le deuxième principe affirme la supériorité du Un sur le Deux, de l'union sur la séparation, de l'amour sur la haine. Je me suis exprimé à ce sujet dans le même sens (2). Le troisième principe figure sous cette forme dans l'encyclique Laudato si. Je l'interprète comme la supériorité d'Aristote sur Platon, de l'intuition basse sur l'intuition haute, du Matérialisme (3) sur l'Idéalisme, et, je crois, du point de vue féminin sur le point de vue masculin. Le quatrième principe est déjà accepté par le communiste Badiou (4). Ce quatrième principe s'oppose frontalement à l'individualisme de Margaret Thatcher (5).

Pour moi ces principes sont "Thom-compatibles".


(1) La question prend son sens lorsqu'on regarde le crèche 2020 sur la place Saint Pierre. https://nicolasbonnal.wordpress.com/
(2) En commentaire de https://www.dedefensa.org/article/trump-est-il-un-logocrate
(3) M majuscule, pour signifier que la matière de la φύσις aristotélicienne est vivante, par opposition à celle de la physique moderne.
(4) Transcendance du Tout -l'ensemble de tous les ensembles n'est pas un ensemble-.
(5) "There is no such thing as society. There are individual men and women and there are families.".


 

Éloge des frontières.4

jc

  17/12/2020

[ Je suis allé un peu vite. Si Zemmour doit attendre la fin du prochain manvantara, c'est que les hommes passent leur tour ! En fait un manvantara se décomposant en quatre parties de durées dans le rapport 4/3/2/1, je vois les hommes sont groggy pendant l'âge d'or -règne sans partage des femmes-, se réveillent mais sont dominés à l'âge d'argent, reprennent le dessus à l'âge de bronze, et règnent sans partage à l'âge de fer (on vient d'en prendre !) ]

Ce qui précède (les .0, .1, .2 et .3) confortent mon intuition vieille de quelques années sur ce site : un Dieu/Déesse Janus, les femmes -conservatrices- au Sénat, les hommes -progressistes- à l' AN, les projets de société proposés par le Sénat à l'AN pour examen de la faisabilité du projet; accord global couché sur le papier à Versailles. L'analogie femmes/bosons et hommes/fermions me plaît : les femmes essentielles pour la cohésion de la société (les gluons sont des bosons), ça me va tout-à-fait.

 

Éloge des frontières.3

Article lié : De la trahison à la sécession

jc

  17/12/2020

L'allusion faite au .2 de Caïn et d'Abel, du temps et de l'espace, me renvoie aux chapitres XXI et XXIII de "Le règne de la quantité...". Si ce que je dis en .2 est correct (si Caïn est en fait Kane, une femme) alors Guénon dit en XXI que la société se féminise , ce qui n'a pas présentement l'air d'être complètement faux.

En relisant ce chapitre XXI je suis tombé sur une note de bas de page qui, selon moi, résume bien l'antagonisme des globalistes "Ulysse et Mont Palatin" et des localistes "Pénélope et Petit Liré" :

"C’est pourquoi le nomadisme, sous son aspect « maléfique » et dévié, exerce facilement une action « dissolvante » sur tout ce avec quoi il entre en contact ; de son côté, le sédentarisme, sous le même aspect, ne peut mener en définitive qu’aux formes les plus grossières d’un matérialisme sans issue."

Je pense que PhG ne verrait pas d'objection à traduire " action « dissolvante » " par entropisation, si bien que nomadisme et sédentarisme, sous l'aspect précisé par Guénon, ne sont que deux formes d'un matérialisme (m minuscule) sans issue, le plouc seulement un peu plus solide et le nomade un peu plus fluide.

La féminisation de Caïn en Kane féminise alors aussi le temps. Ça m'ouvre des perspectives lors de ma relecture du chapitre XXIII, "le temps dévorateur finissant par se dévorer lui-même" devenant "la femme dévoratrice finissant par se dévorer elle-même", assertions de nature translogique, la dernière me faisant penser à la femme samoyède (1).

Guénon : "Ainsi un « retournement » s’opère en dernier lieu contre le temps et au profit de l’espace : au moment même où le temps semblait achever de dévorer l’espace, c’est au contraire l’espace qui absorbe le temps ; et c’est là, pourrait-on dire en se référant au sens cosmologique du symbolisme biblique, la revanche finale d’Abel sur Caïn.".

Allez, Zemmour, ce n'est pas perdu; il va seulement falloir patienter un peu, le temps d'un manvantara (et je trouve imprudent le "finale" de Guénon).


(1) "Le terme de samoyède vient du russe самоед (samoyed), traduit par l'étymologie populaire comme signifiant « qui se mange soi-même » " https://fr.wikipedia.org/wiki/Langues_samoy%C3%A8des
 

 

In principium erat verbum.1

Article lié : La parabole des 15 milliards

jc

  17/12/2020

À ma connaissance Thom n'utilise que deux fois l'expression "Et le verbe s'est fait chair". C'est dans SSM, une fois au tout début du dernier chapitre "Pensée et langage" de la deuxième édition (entièrement remaniée par rapport à la première), et une autre fois en épigraphe du chapitre "Modèles locaux en embryologie" où l'on "voit" effectivement le verbe se faire chair, en particulier dans la section "Chréodes génitales" (2ème ed., pp.190 à 193). C'est tellement frappant sur les figures que Thom se sent obligé de préciser (1): "... on a la configuration typique en champignon ... (il est inutile de rappeler à ce propos, qu'un champignon bien connu s'appelle Phallus impudicus)".

En linguistique ce "Et le verbe s'est fait chair" devient "Et le verbe s'est substantivé". Et Thom de remarquer qu'il est effectivement très courant de substantiver un verbe, mais qu'il est très rare de verbaliser un substantif : "Boycott, Lynch en anglais, Limoges en français ne font pas le poids." (ES, p.196). (Personnellement je remarque qu'il est très facile de verbaliser un substantif qui a été substantivé : c'est le retour à la case départ. Ainsi entre fin et finir, entre but et débuter, j'ai l'impression qu'on est dans le cas de l'œuf et de la poule : on ne sait pas qui a commencé. 21) ).

(1) Les figures dont parle Thom proviennent de la théorie des singularités structurellement stables. Ce ne sont pas les classiques équations "bitte-couilles" qui circulent chez les potaches.
(2) Thom consacre quelques lignes à ce problème (SSM, 2ème ed. p.226) : "la poule et l'œuf ne sont que des sections temporelles d'une configuration globale dont le centre organisateur n'apparaît jamais, autour duquel l'onde de croissance tourne indéfiniment.

Éloge des frontières.2

Article lié : De la trahison à la sécession

jc

  17/12/2020

Acte fondateur : séparation ou réunion ?  Si le Créateur est un séparateur, il semble assez naturel que ses créatures le soient également…, et que sa Création achevée soit pure séparation, pure division, pure entropisation.

Dans le monde des humains il me semble qu'on se réunit d'abord autour d'un projet, et que la réalisation du projet se mesure à l'énergie potentielle du groupe rassemblé autour de ce projet, énergie destinée à s'actualiser et à prendre forme au cours de sa réalisation : puissance -> acte et matière -> forme. De ce point de vue les limites (frontières fermées) sont faites pour éviter que l'énergie initiale se dissolve à l'infini : limites adaptées à la taille du projet. Les frontières sont faites pour permettre de se sédentariser, seule(?) façon de réaliser un projet, que celui-ci soit réel ou virtuel : la réalisation d'un projet se fait toujours "intra muros", même si parfois, les murs sont grands.

Je trouve intéressant de rapprocher cette façon de mûrir un projet puis de le réaliser avec la façon dont Thom construit la mathématique à ses yeux essentielle : "Nous allons nous efforcer ici de construire la mathématique essentielle à la manière d'une cosmogonie. Au commencement était le temps." (AL, p.316)

Et donc ensuite sera l'espace (1). Thom fait "fort spéculativement" une analogie entre le temps et les bosons d'une part et l'espace et les fermions d'autre part. (AL, p.325). Un Dieu-Déesse Janus, Dieu diviseur, Déesse rassembleuse ? Ça me plaît bien.

Thom : "(...) à beaucoup d'égards, l'ontologie, c'est l'obstacle.". Mais pas à tous ?

Le pape François a édicté quatre principes (2). Le premier d'entre eux est : "Le temps est supérieur à l'espace".


(1) Car il faut de l'espace pour réaliser un projet. Il m'apparaît nettement (hic et nunc, demain étant un autre jour) que Caïn est Kane (féminin) et Abel est ... Abel (masculin). Kane aurait-elle tué Abel ? Cf. le best seller Kane and Abel, by Jeffrey Archer.
(2) https://www.cath.ch/blogsf/les-quatre-principes-de-francois/






 

Éloge des frontières.1

Article lié : De la trahison à la sécession

jc

  17/12/2020

 


Les positions d'Aristote et de Thom me semblent être conformes à celle de la Bible (début de la Genèse) : "Dieu sépara la lumière d'avec les ténèbres." Le Dieu de la Bible fondamentalement diviseur ?

Pourquoi pas un Dieu rassembleur, un Dieu pour qui l'acte fondateur serait une réunion ?

Thom : "Ici l'entéléchie sépare ... mais si le mouvement avait lieu en sens inverse ... l'entéléchie réunirait." (ES, p.186)

 

Éloge des frontières

Article lié : De la trahison à la sécession

jc

  17/12/2020

Le globalisme et la société ouverte de Popper-Soros est sur la défensive, le retour des frontières étant dans l'air du temps. Tout récemment les chiens de garde du Système se sont déchaînés sur François Ruffin (1) parce qu'il avait osé parlé de frontières, et parce que, consciemment ou non, ils assimilent pavloviennement (ô que c'est adverbe est ici bien choisi, et le verbe pas mal aussi) frontière à fermeture.

Il y a deux ans j'ai acheté "L'éloge des mathématiques" d'Alain Badiou et en même temps (expression à la mode) "Éloge des frontières" de Régis Debray; pour la même raison : savoir si Thom y était cité, et, si oui, en quels termes (la réponse a été doublement négative). Pourtant les frontières ont constitué la préoccupation fondamentale de Thom, qu'elle soit mathématique ou philosophique :

"En vérité, il existe une réelle unité dans ma réflexion. Je ne la perçois qu'aujourd'hui, après y avoir beaucoup réfléchi, sur le plan philosophique. Et cette unité, je la trouve dans cette notion de bord. Celle de cobordisme (2) lui était liée." ,

et il a même énoncé deux axiomes reliant topologie et philosophie aristotéliciennes (Aristote topologue) (3) : l'axiome ABP "l'Acte est le Bord de la Puissance" et l'axiome FBM "la Forme est le Bord de la Matière", deux axiomes visiblement destinés à être portés à l'attention des philosophes.

Pour en revenir aux chiens de garde, la réponse de RD est limpidement contenue dans le titre du chapitre II : "Au début était la peau", qui suggère avec insistance d'une part que si nous n'avions pas de peau, alors nous n'aurions pas de pot (ça se discute), c'est-à-dire que nous ne serions pas, ou si peu, car dilués dans le grand Tout, et d'autre part que la peau est une frontière qui dispose d'orifices -dont certains sont pourvus de sphincters- qui permettent d'échanger avec l'extérieur sur le mode potentialisation/actualisation (5), ce qui renvoie aux axiomes thomiens.

Et le titre du dernier chapitre "La loi de séparation", semble rejoindre "L'acte fondateur sépare" de Thom et "L'entéléchie sépare" d'Aristote.

Il faudra que je m'y replonge.




(1) https://www.liberation.fr/france/2020/12/02/frontieres-ruffin-accuse-de-jouer-la-carte-rn-par-la-macronie_1807462
(2) https://fr.wikipedia.org/wiki/Cobordisme
(3) Dans ES Thom essaie de débusquer un Aristote topologue "passablement méconnu" (p.245)
(4) Il faudrait que je m'y plonge, mais, autant je me suis facilement plongé dans "L'éloge des maths" par le philosophe Badiou (parce qu'il s'exprime comme un matheux), autant j'ai du mal avec le philosophe Debray et son "Éloge des frontières (parce qu'il s'exprime plutôt comme un poète).
(5) C'est le cheval de bataille de Stéphane Lupasco (parmi d'autres) http://tiersinclus.fr/

Le rejet devient projet

Article lié : De la trahison à la sécession

jc

  17/12/2020


PhG : "Aucune des forces en présence ne semble avoir, ni la capacité, ni même le projet, de tenter d’y rétablir un semblant de stabilité, sans parler de l’ordre et de l’harmonie (...) Reste une seule idée saine, qui se devine et se nomme ‘sécession’."

Que j'interprète : L'empire globalisé se décompose, et l'air du temps est à l'exit (Br,T, Fr, etc.), à la sécession, à la relocalisation, à la refondation, au ré-enracinement, au retour des frontières. Pour Thom, à la suite d'Aristote, l'acte fondateur est une séparation (1). Éloge des frontières ? Le mot pour moi le plus important est celui de projet ("ni même le projet"). Quel a été le projet des globalistes (je parle au passé décomposé) ? Quel est celui des localistes ?

Thom : "Le "rejet" devient "projet"." (2)


(1) Aristote: "L'entéléchie sépare"; Thom: "L'acte fondateur sépare". Cf. ES. chap.7.
(2) "De l'icône au symbole", MMM.
 

In principium erat verbum

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jc

  16/12/2020

[Je me suis souvent demandé pourquoi la traduction française était "Au commencement", car, si la cause est finale, le principe peut être à la fin. C'est, je crois, ce que suggère Thom à la conclusion de son incursion en "métaphysique extrême"]

PhG : " "Au commencement était le Verbe", murmura un évêque qui avait mené la charge de la modernité au Concile Vatican II et en avait oublié comment l’on se signe."

Que la substance puisse précéder l'essence peut choquer. Je comprends que ma position Matérialiste (M majusculé, j'y tiens) puisse heurter ici. Pour moi, un socialiste est quelqu'un qui fait passer l'intérêt collectif avant son intérêt individuel. C'est ainsi que je conçois un militaire dans une armée de métier : quelqu'un qui fait passer l'intérêt de la patrie avant son intérêt propre, et ce jusqu'au sacrifice suprême. Je pense que les femmes sont naturellement socialistes en ce sens qu'elle sont génétiquement programmées pour faire passer l'intérêt collectif (leur progéniture) avant leur intérêt individuel.  Mais, pour moi, si l'on veut réunir les nationalistes, les patriotres, les matriotes, et autres pour chasser la bête immonde, il faut que la "gauche" complètement paumée actuellement, puisse retrouver une place.

Pour utiliser un vocabulaire que PhG affectionne, ma position Matérialiste est tactique, voire stratégique, mais certainement pas ontologique. Je m'explique.

Pour Aristote la substance est ce qui se tient au-dessous. Elle tient pour cette raison un rôle particulier dans sa liste des catégories; c'est le substrat dont les autres catégories , dont l'étendue, ne peuvent être que des attributs; c'est pour cela, je crois, qu'on a taxé Aristote de matérialiste (et qu'on aurait dû taxer de Matérialiste, ce qu'il est, à mon avis). Topologue et penseur du continu comme, selon lui, Aristote, Thom refuse le choix de ce dernier et met en-dessous l'étendue, refusant ainsi qu'elle soit un prédicat de la substance.  Mais l'étendue -le continu- n'est pas de ce monde; c'est une donnée mystique, hors substrat, du ressort de la métaphysique extrême, de la théologie. cela permet à Thom d'y développer "hors substrat" ses Idées platoniciennes, c'est-à-dire sa théorie des catastrophes, ce que ne peut pas faire Aristote, coincé par son choix (et qui refuse les idées de son maître Platon). Thom développe tout ça dans ES (j'espère ne pas avoir fait de contresens…).

Guénon est aristotélicien. Pour lui l'étendue -le continu- est un prédicat de la substance. Il s'ensuit que pour lui le continu est une quantité (chap II de "Le règne…"), au même titre que le discontinu qu'il assimile au nombre. Ce n'est pas le cas de Thom qui, malgré son admiration pour Aristote, n'est pas aristotélicien. (Je rappelle que pour Thom c'est l'opposition continu/discontinu qui domine toute la pensée.)

C'est maintenant le continu (qui doit être vu comme élastique indéfiniment déformable sans jamais se rompre) qui joue le rôle de la substance et le discret qui joue le rôle du verbe, le discret étant une marque qui émerge du continu par invagination. Ainsi en se mangeant elle-même la droite, continu 1D, s'invagine sur elle-même pour faire apparaître en fin de phase d'invagination -en un retour au centre organisateur qui est le verbe-, la singularité pli. C'est ce que dit poétiquement Paul Valéry dans le cimetière marin : "Hydre absolue, ivre de ta chair bleue, Qui te remords l’étincelante queue". Jean-Pierre Petit est peut-être le meilleur connaisseur in the world de 'invagination en 2D :  https://www.jp-petit.org/nouv_f/lacan_jpp.pdf






 

Thom sur le progrès

Article lié : La parabole des 15 milliards

jc

  16/12/2020

PhG : “la seule chose dont on est assuré désormais dans le flux dynamique des connaissances scientifiques, c’est qu’au plus ces connaissances progressent dans une mesure exponentielle gigantesque comme elles font, au moins on est assuré de la véracité de cette dynamique et de la vérité de ce qui en est produit” ; "

Thom :

1.  "(...) si la science progresse, c'est en quelque sorte par définition. Alors que l'art et la philosophie ne progressent pas nécessairement, une discipline qui ne peut que progresser est dite scientifique. De là on conclura que le progrès scientifique, s'il est inévitable, ne peut être le plus souvent qu'illusoire."

2. "J'appelle « progrès essentiel » en Science toute modification de la nomologie qui permet une résorption considérable de l'accident qui lui est
expérimentalement attaché."

3. "Lorsqu'on a compris – à la suite de T. S. Kuhn – le caractère « automatique » du progrès scientifique, on se rend compte que les seuls progrès qui vaillent sont ceux qui modifient notre vision du monde – et cela par l'élaboration de nouvelles formes d'intelligibilité. Et pour cela il faut revenir à une conception plus philosophique (voire mathématique) des formes premières d'intelligibilité. Nos expérimentateurs, sempiternels laudateurs du « hard fact », se sont-ils jamais demandé ce qu'est un fait ? Faut-il croire – ce qu'insinue l'étymologie – que derrière tout fait, il y a quelqu'un ou quelque chose qui fait ? Et que ce quelqu'un n'est pas réduit à l'expérimentateur lui-même, mais qu'il y a un « sujet » résistant sur lequel le fait nous apprend quelque chose ? Telles sont les questions que notre philosophe devra constamment reposer, insufflant ainsi quelque inquiétude devant le discours volontiers triomphaliste de la communauté scientifique. Bien sûr la Science n'a nul besoin de ce discours pour continuer. Mais il restera peut-être quelques esprits éclairés pour l'entendre, et en tirer profit."

4. "Ainsi la fonction originelle d'une philosophie de la nature sera-t-elle de rappeler constamment le caractère éphémère de tout progrès scientifique
qui n'affecte pas de manière essentielle la théorie de l'analogie."

5. "La science, actuellement, est une gigantesque industrie, dont le seul principe directeur est l'expérimentalisme ; la maxime directrice est : « Tout ce qui peut se faire doit être fait ». Il ne s'agit là – en fait – que de la poursuite du besoin exploratoire déjà présent chez l'animal."

Je rappelle à ce propos que l'œuvre majeure de Newton est intitulée : Principes mathématiques de la philosophie naturelle, et que ces Principia ont eu une influence considérable sur la science moderne, quantitative, prédictive et expérimentale (toute intuition, toute spéculation est systématiquement rejetée si elle n'est pas confrontée aux fameux "faits" (cf. 3)

(...) le but ultime de la science n'est pas d'amasser indistinctement les données empiriques, mais d'organiser ces données en structures plus ou moins formalisées qui les subsument et les expliquent. Dans ce but, il faut avoir des idées « a priori » sur la manière dont se passent les choses, il faut avoir des modèles. Jusqu'à présent, la construction des modèles en Science a été avant tout une question de chance, de « lucky guess ». Mais le moment viendra où la construction des modèles elle-même deviendra, sinon une science, du moins un art ; ma tentative, qui consiste à essayer de décrire les modèles dynamiques compatibles avec une morphologie empiriquement donnée, est un premier pas dans l'édification de cette « Théorie générale des Modèles » qu'il faudra bien construire un jour." (Je rappelle que SSM est sous-titré : "Essai d'une théorie générale des modèles".


PhG : “La seule chose dont je suis assuré pour mon compte est que les sciences ont totalement perdu leur prétention à l’objectivité vertueuse, que je ne veux plus par conséquent envisager la véracité et la vérité des sciences ;"

La coupure galiléenne a eu pour effet de faire de l'objectivité une chasse gardée de la science (bien entendu moderne) et de repousser les philosophes dans la forteresse de la subjectivité*. La physique quantique sème actuellement -et heureusement- le trouble dans la science "dure" moderne, car elle pose la question du lien -peut-être très fort, voire infiniment fort- en sujet et objet, entre observateur et observé. Sans doute la science dite "molle", qui sait ça depuis toujours, se dit-elle enfin : "enfin !".

*: Thom : "(...) Les Philosophes ont abandonné aux savants la Phusis et se sont repliésdans la forteresse de la subjectivité. Il leur faut réapprendre la leçon des
Présocratiques, rouvrir les yeux grands sur le monde, et ne pas se laisser impressionner par l'expertise souvent dérisoire d'insignifiance de l'expérimentateur. Inversement la science doit réapprendre à penser."