jc
03/01/2020
OM: "... la Russie doit aussi devenir (...) une puissance technologique internationale et une puissance civilisationnelle et culturelle. La Russie de Poutine, soutient Service, n'a ni l'un ni l'autre."
Avant de devenir il faut d'abord être. Comme tout être toute nation se construit en partie de l'intérieur et de l'extérieur. Je vois les USA comme s'étant construits quasi-uniquement de l'extérieur, comme une communauté animée par la seule défense de ses intérêts (communauté qui n'a cessé depuis au moins un siècle, par la force, d'imposer au reste du monde son incivilité et son inculture). Il ne faut pas s'étonner, dans ces conditions, que la nation US se délite lorsqu'elle se retrouve seule face à elle-même¹.
Je ne vois pas en quoi les USA pourraient s'être construits de l'intérieur, et je n'ai jamais entendu parler de l'âme des USA (ni d'ailleurs de l'URSS). Par contre j'ai toujours entendu parler de l'âme russe².
Comme tout être, toute société se doit de persévérer dans son être, autrement dit d'être suffisamment stable (ce qui exige pour ladite société de disposer de mécanismes régaliens régulateurs de cette stabilité).
Dans "Révolutions, catastrophes sociales" (AL), Thom s'attache à "établir qu'aucune société stable ne peut exister sans une certaine forme de pouvoir sémiologique" (AL p.437).
Pour moi le pouvoir sémiologique qui a participé à assurer la stabilité des sociétés et des civilisations depuis les temps immémoriaux peut se résumer grosso modo en un "In God we trust", alors que le pouvoir sémiologique censé assurer la stabilité de la société globalisée actuelle imposée par les USA est plutôt un "In Gold we trust".
Le pouvoir sémiologique ancien a disparu de nos sociétés modernes. Il s'agit de renouer avec la Tradition à travers la modernité. Le sujet de l'oeuvre de Thom dont la dernière phrase de "Esquisse d'une Sémiophysique" est: "Seule une métaphysique réaliste peut redonner du sens au monde"? Le sujet de "La Grâce de l'Histoire"?
¹: Arbatov (conseiller de Gorbatchev): " Nous allons vous faire une chose terrible, nous allons vous priver d’Ennemi. "
( https://www.dedefensa.org/article/eh-fukuyama-tout-ca-pour-ca )
²: https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%82me_russe
jc
04/01/2020
Philippe Grasset nous dit que "la sagesse, aujourd'hui, c'est l'audace de la pensée".
D'audace de pensée, Thom ne manque pas:
"On devrait en principe avoir deux systèmes nerveux distincts : l'un prédateur, chargé d'attirer et de capturer les proies ; l'autre, proie fictive, chargé d'éviter ou de repousser les prédateurs éventuels. Ces deux systèmes existent sûrement chez tout animal : à côté de l'âme appétitive, il y a l'âme sensible. Mais la grande découverte des Vertébrés est d'avoir créé un cerveau-proie tout au long du corps, selon l'axe céphalo-caudal, la moelle épinière. Le cerveau-prédateur, lui, solidaire de la bouche, est localisé dans
le cerveau. Le vertébré a pris le risque de renoncer à cette ligne Maginot, l'exosquelette ; il l'a remplacé par une carapace de douleur virtuelle. (1988, ES, ch. 5)
Perso j'aime situer ce cerveau-proie au bas de la moelle épinière, près de l'output (l'input étant la bouche) c'est-à-dire près des organes excréteurs (excréteurs du bon grain -les gamètes- et de l'ivraie). De ce point de vue le cerveau-proie, le cerveau "endodermique", prend une importance prépondérante (par rapport au cerveau-prédateur "ectodermique") puisque c'est lui qui permet à l'espèce de persévérer dans son être, c'est lui le véritable chef¹. (Par une audacieuse analogie Biologie-Linguistique, Thom associe les séquences Endoderme-Mésoderme-Ectoderme et Sujet-Verbe-Objet².)
Les USA avec une seule âme, appétive, la Russie avec (bien entendu) une âme appétive, mais également une âme sensible?
¹: http://fautrigoler.free.fr/index_ff.html?http://fautrigoler.free.fr/html/qui_est_le_chef.html
²: Thom: "On sait que chez les animaux supérieurs, et en particulier les Vertébrés, l'embryon se présente initialement sous la forme d'une sphère creuse (blastula) ; en s'invaginant à l'intérieur d'elle-même par le processus de la gastrulation, cette blastula devient une structure triploblastique à trois feuillets : ectoderme-mésoderme-endoderme. L'ectoderme donnera essentiellement la peau (pour partie), les organes sensoriels et le système nerveux ; le mésoderme fournira les os, les muscles, le sang, le cœur, le
système vasculaire et les organes d'excrétion. L'endoderme construira la muqueuse intestinale et diverses glandes digestives, comme le foie. À cette énumération quelque peu rhapsodique, la métaphore suivante apporte un sens : j'ai proposé d'identifier la structure triploblastique du Vertébré à la structure ternaire de la phrase transitive : sujet-verbe-objet, selon la correspondance :
ectoderme = objet, mésoderme = verbe, endoderme = sujet."
jc
05/01/2020
Je profite de la bribe de citation thomienne ("... l'embryon se présente initialement sous la forme d'une sphère creuse (blastula) ; en s'invaginant à l'intérieur d'elle-même par le processus de la gastrulation, cette blastula…") de mon précédent commentaire pour dire en quoi je considère que le savanturier¹ JPP n'est pas un charlatan (ou, au moins, pas plus charlatan que Lacan ou que Thom lorsqu'il s'aventure hors des mathématiques, en particulier en Biologie ou en Linguistique).
Le mathématicien américain Stephen Smale, médaillé Fields travaillant dans le même domaine que Thom, a un jour émis une conjecture reçue sceptiquement par son entourage car l'une des conséquences était qu'on pouvait retourner la sphère. Smale ayant ultérieurement prouvé sa conjecture, restait le problème de savoir comment la retourner. Problème résolu par les français Bernard Morin (mathématicien aveugle) et JPP suite aux travaux de l'américain Anthony Philips. Leur méthode est exposée par JPP dans le "Récit des trois rencontres entre Jean-Pierre Petit et Jacques Lacan, tournant autour de la surface du Cross Cap et de la surface de Boy" ( https://www.jp-petit.org/nouv_f/lacan_jpp.pdf )
De ce que j'ai cru comprendre, il ressort que pour retourner la sphère JPP (et BM?) est passé par une étape intermédiaire où l'extérieur et l'intérieur de la sphère sont confondus, formant une surface (découverte par le mathématicien Boy) unilatère -Janus- c'est-à-dire sans dessus ni dessous.
Il me paraît alors tout-à-fait naturel qu'un JPP, changeant sa casquette de matheux pour celle d'un astrophysicien, reprenne ces idées de surface unilatère pour fondre en un seul univers "Janus" les deux univers jumeaux du physicien russe Sakharov. J'ai ainsi visionné avec grand plaisir la trentaine de vidéos "Janus" dans lesquelles JPP expose ses idées avec un talent pédagogique certain.
Je n'ai pas le niveau intellectuel -et donc pas la compétence- pour juger du niveau de charlatanisme de JPP, de Lacan et de Thom, Thom m'apparaissant dans cette affaire, lorsqu'il s'écarte des mathématiques où le charlatanisme ne peut exister, comme étant alors le charlatan en chef:
"Les situations dynamiques régissant l'évolution des phénomènes naturels sont fondamentalement les mêmes que celles qui régissent l'évolution de l'homme et des sociétés ..."
citation qui se poursuit par
"ainsi l'usage de vocables anthropomorphes en Physique se trouve foncièrement justifié."
Invagination… (cf. la citation initiale de Thom au début de ce commentaire et https://www.jp-petit.org/nouv_f/lacan_jpp.pdf pages 9 et 10)
Les cinq premières citations thomiennes d'un recueil de 90 pages collectées par Michèle Porte² sont à mettre en regard avec le "La sagesse, aujourd'hui, c'est l'audace de la pensée" de PhG:
1. Quand on sait où l'on va, on va rarement très loin.
2. Pour atteindre les limites du possible, il faut rêver l'impossible.
3. En pliant un être dans un cadre conceptuel trop pauvre pour l'exprimer, on ne saurait s'étonner d'aboutir à des incompatibilités et des paradoxes apparents.
4. Au moment où tant de savants calculent de par le monde, n'est-il pas souhaitable que d'aucuns, qui le peuvent, rêvent ?
5. La liberté, comme la mathématique, est fille de l'imagination.
et, ailleurs (AL pp.558 à 561), où il fait ce que je considère comme son acte de foi platonicienne, Thom écrit: "... le monde des Idées excède infiniment nos possibilités opératoires, et c'est dans l'intuition que réside l'ultima ratio de notre foi en la vérité...".
Je pense que PhG ferait facilement sienne cette fin de phrase: c'est dans l'intuition (haute, bien entendu) que réside l'ultima ratio de notre foi en la vérité. Et c'est pour que nous sachions quelle est sa propre foi en la vérité qu'il nous invite à lire le tome III de "La Grâce de l'Histoire".
¹: C'est ainsi que JPP se présente.
²: https://www.maths.ed.ac.uk/~v1ranick/papers/thom/data/citations.pdf
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