Jean-Claude Cousin
01/01/2022
Réponse UN
Eugène Pottier avait eu cette phrase pessimiste « Du passé faisons table rase », je ne pense pas que ce soit judicieux. Du passé lointain a découlé un passé plus proche, de grandes choses ont été bâties, de grandes erreurs ont été accomplies parfois de manière très volontaire.
Il ne faut pas, non, il ne faut pas dire « rien qui ne soit matière de doute et d’inquiétude » : en fait ce sont des penseurs rétribués qui le profèrent sur tous les tons, afin d'affaiblir le tissu solide de la France. Elle seule a eu le courage de mettre en place la laïcité, car la loi qui aura bientôt cent ans a été le fruit de dizaines, voire de centaines d'années de réflexions. Diderot fut l'auteur de certaines de ces réflexions, d'Olbach également, mais ils s'étaient hissés sur les épaules de géants comme Giordano Bruno, et bien plus tôt encore, Abélard.
Aujourd'hui cette laïcité, qui est le fondement même de la façon de penser en France, face au communautarisme si prisé ailleurs, cette laïcité est avilie par des “philosophes” qui la travestissent parce qu'ils en ont peur. Sereine, elle considère tous les humains comme égaux en droits et en devoirs, ce que ne peuvent supporter des psychopathes qui se veulent supérieurs. La laïcité rejette l'esclavage et ses variantes, qui sont devenus pourtant le fondement de la société actuelle.
Jean-Claude Cousin
01/01/2022
Réponse DEUX (suite)
Il y a quelques jours un universitaire a fait le voyage au Kivu, pour constater là-bas l'application de cet esclavage, y compris des enfants. Gageons que son compte-rendu, s'il n'est pas volontairement mis sous le boisseau par ceux qu'il gênerait, pourrait être un coup de tonnerre. Ajoutons que ce qui est extrait au Kivu sert aussi, coup double, à maintenir dans une sorte d'esclavage de la pensée entretenu par des téléphones omniprésents : certains y passent des heures chaque jour, des heures où ils passent à côte de la vraie vie, des heures sous la coupe faussement bienveillante des GAFA.
Est-ce par pressentiment ? Il y a dix ans j'avais pris la peine d'écrire quelques pages, qui pourraient bien être la trame d'une autre donne.
https://ti1ca.com/t8oqg46m-Anarchie-A5-2018-08-Anarchie-A5-2018-08.pdf.html
Depuis, quelques mots ont été corrigés, sur la forme, mais le fond est resté intact. Bien entendu cette proposition d'aller dans une tout autre direction suppose que TOUT, oui, absolument tout ce qui fait le tissu administratif actuel n'existe plus. Là-dessus, on repart à zéro, avec pour postulat que NUL n'est au-dessus de quelque façon que ce soit, mais aussi NUL n'est en-dessous. Une façon de garder l'optimisme auquel, malheureusement pour lui, Michel Houellebecq ne paraît pas abonné.
jc
05/01/2022
Houellebecq et Zemmour en parlent.
Pourquoi se suicide-t-on, pourquoi les sociétés se suicident-elles? Si l'on suit -mon cas- ma citation thomienne favorite (1), alors il y a peut-être une raison commune au phénomène de suicide des cellules (apoptose) (2) et à celui des civilisations. De ce que j'ai retenu de mes lectures thomiennes, je ne serais pas étonné d'apprendre que de tels ordres d'auto-destruction viennent d'un centre organisateur -d'un logos- hiérarchiquement supérieur.
C'est d'ailleurs peut-être dans le même ordre d'idées que Thom écrit à propos des sociétés :
"... un caractère typique des champs morphogénétiques sociaux est qu'ils modifient, souvent de manière durable et irréversible, le comportement des individus. Ceux-ci sont induits à tout sacrifier, jusqu'à leur existence propre, à la conservation de la forme sociale globale, considérée comme la suprême valeur.".
Verdun: un sacrifice commandé par un logos hiérarchiquement supérieur supra-humain? C'est, je crois, la thèse que défend PhG qui insiste le fait que ce sont, selon lui, les poilus -et non les généraux- qui ont choisi de résister.
Thom associe le suicide à la catastrophe "queue d'aronde". Je ne sais pas pourquoi.
1. "Les situations dynamiques régissant l'évolution des phénomènes naturels sont fondamentalement les mêmes que celles qui régissent l'évolution de l'homme et des sociétés."
2. https://www.techno-science.net/glossaire-definition/Apoptose.html (le premier trouvé sur la toile, je n'y connais rien)
jc
08/01/2022
En prolongement de mon précédent commentaire.
Suicide : du latin sui (« soi-même, de soi-même ») et caedere (« tuer ») (Wiktionnaire).
J'ai retrouvé une citation thomienne où il lie explicitement le suicide cellulaire (apoptose) et le suicide humain) :
"(...) la vie collective impose souvent — et seuls sont exclus les individus de la lignée germinale — une déformation de la figure de régulation de l'individu. Cette déformation, en stabilisant un col de la crête, donc en l'abaissant, diminue la stabilité individuelle de l'élément. De fait, dans un organisme biologique, certaines cellules peuvent même recevoir un ordre de suicide pour assurer la régulation spatiale ou physiologique de l'organisme entier (cellules de l'épiderme, hématies). Dans les sociétés humaines, cette déformation de la figure de régulation de l'individu porte le nom de morale ; ainsi qu'il est bien connu, l'égoïsme d'une société se fonde sur l'altruisme des individus qui la composent.".
Thom tient ici à opposer égoïsme et altruisme. Mais je ne crois pas déformer sa pensée en disant que la notion même de société repose sur l'altruisme des individus qui la composent. Sa conception de la société diffère ainsi radicalement de la société ultra-libérale et ultra-individualiste défendue par Margaret Thatcher : "And, you know, there is no such thing as society. There are individual men and women and there are families.", qui énonce ici, selon Thom, la bonne façon pour une civilisation de se suicider (une MT qui s'empresse d'ajouter :There is no alternative…).
L'altruisme de certains individus d'une collectivité peut aller jusqu'à mettre leur vie en danger : ainsi des animaux qui font le guet pour prévenir leur communauté de la présence d'un prédateur par un cri qui attire sur eux l'attention de ce prédateur. Cet altruisme peut aller jusqu'à donner sa vie pour la communauté; dans les sociétés humaines ce suicide est en général sacralisé (on ne dit pas de tels individus qu'ils se suicident mais qu'ils se sacrifient).
Je suis de ceux qui pensent que la stabilité d'une société exige une certaine forme de sacré. Thom ne dit pas, je crois, autre chose lorsqu'il écrit dans son article "Révolutions: catastrophes sociales?" : "Il importe donc d'établir qu'aucune société stable ne peut exister sans une certaine forme de pouvoir sémiologique." (ce à quoi il s'attache dans l'article). La restauration d'une autorité spirituelle, la révolution -inévitable selon moi- qui nous attend?
Remarque terminale. Le thomien "et seuls en sont exclus les individus de la lignée germinale" de la citation initiale me fait aussitôt penser au dogme central du néo-darwinisme qui est l'existence d'une barrière -dite de Weismann- qui interdit toute action du soma sur le germen, dogme radicalement opposé à l'un des dogmes lamarckiens que défend Thom :
"... on ne pourra que s'étonner -dans un futur pas tellement lointain- de l'étonnant dogmatisme avec lequel on a repoussé toute possibilité d'action du soma sur le germen -tout mécanisme "lamarckien" " (ES, p.127)
Les révolutions (1) comme manifestations sociales de type lamarckien (avec l'analogie Biologie /Sociologie : germen/élite, soma/peuple) ?
(1) populaires, et non "de palais".
jc
08/01/2022
Petit complément à "Du suicide au sacrifice"
Le lacanien Charles Melman écrit dans "L'homme sans gravité" : "La barbarie consiste en une relation sociale organisée par un pouvoir non plus symbolique mais réel".
Macron, Biden, Xi (1), pour ne citer qu'eux : il est pour moi très clair que nous nageons actuellement en pleine barbarie. Vladimir Poutine, seul dans le monde qui compte, à se rendre compte de la nécessité d'un pouvoir symbolique pour assurer la stabilité sociale ?
(1) PhG : "Nous avons cité l’intervention de l’officiel chinois avec une intention à l’esprit, ne doutant pas un instant de la sincérité de son propos, et de la véracité de sa propre conviction, dans l’exposé qu’il fit des intentions de la Chine, de l’Asie, et de l’antique sagesse de cette partie du monde. Nous reconnaissons d’autant plus tout cela que nous pouvons dire notre conviction que l’intervenant se trompait, qu’il se trompe en croyant qu’un modèle de civilisation asiatique rénové s’imposera rapidement, à côté du modèle occidentaliste, éventuellement pour le concurrencer et le remplacer. Ce n’est nullement que ses arguments de fond ne soient pas justifiés et excellents; ils le sont, ceci et cela, et plus qu’à leur tour. Mais l’intervenant ignore deux choses: combien le modèle occidentaliste est, à la fois, plus puissant qu’il ne croit et plus proche de l’effondrement catastrophique qu’il ne croit." ( https://www.dedefensa.org/article/glossairedde-crisis-la-crise-de-la-raison-subvertie )
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