Philippe Grau
05/07/2014
“Lintervention US en Ukraine nest pas inexistante, bien sûr que non et bien au contraire. Mais elle nest plus la priorité du jour et elle disparaît de la puissance dinfluence du système de la communication. Elle est désormais réduite à lactivisme sans aucun frein ni contrôle des organisations, agences, etc. (CIA & the rest) qui se sont déployées massivement en Irak et agissent à tous les échelons de la structure-Kiev pour influencer, sinon contrôler et diriger une action maximaliste encourageant à l’intervention dans le Donbass. “
“qui se sont déployées massivement en Irak”, je pense qu’il faut lire Ukraine et non Irak ? Article brillant et vraiment très clair.
Ici on voit vraiment vos concepts en action et vous peignez avec ces outils, magnifiquement, le paysage de l’état actuel du monde.
dedefensa.org
05/07/2014
Oui, bien entendu, il faut lire Ukraine et nullement Irak. Ce que se fera désormais, puisque le changement est fait.
Merci pour votre message, et avec nos excuses pour ce lapsus à peine révélateur.
dde/PhG
shalegas gate
05/07/2014
MERCI DE CONSIDERER CETTE PROPOSITION D’ARTICLE
On fait grand cas de l’accord passé le 20 mai dernier entre la Russie et la Chine, par lequel Gazprom fournira du gaz à CNPC pendant 30 ans pour une valeur de “$400 milliards”. Ce chiffre affole les compteurs, au point que les observateurs parlent “d’accord du siècle” -voire d’accord de “dimension métahistorique” (cas de dedefensa…).
Soit. Moscou et Pékin ont signé un document qui était en gestation depuis dix ans et l’arrivée du gaz russe en chine est bel et bien un événement en tant que tel. Mais a-t-il vraiment la signification historique (métahistorique) que l’on veut lui prêter ? La réponse est venue sans tarder des experts de l’oil&gas, qui ne s’y sont pas trompés : “l’accord du siècle” Gazprom/CNPC n’en est pas un -tout simplement.
Quelques remarques tout d’abord, pour remettre les chiffres en perspective :
- “$400 milliards” sur 30 ans : cela signifie théoriquement que les exportations de gaz vers la Chine najouteront « que » $13 milliards annuels au chiffre daffaires export de Gazprom, qui a atteint $68 en 2013 (quand le total des exportations russes s’est élevé à $593 milliards). Un apport certes non négligeable mais qui nest pas de nature à remettre sur pied le modèle économique de Gazprom, sur la corde raide ces dernières années en raison de projets pharaoniques dictés par les ambitions politiques du Kremlin.
- “38 milliards de mètres cubes (bcm) de gaz exportés chaque année” : qui sait que ces volumes ne représentent que 25% des exportations russes vers lUnion européenne (163 bcm en 2013) et quils seront très inférieurs aux exportations du Turkménistan vers la Chine (celles-ci atteindront 55 bcm dès 2015) ? Les projections officielles chinoises permettent de conclure que le gaz russe ne représentera pas plus de 10% des importations de Pékin en 2030.
D’autres ordres de grandeurs sont à prendre en considération pour relativiser ce contrat :
- le prix de vente concédé à CNPC : curieusement, les parties ont refusé de communiquer sur le sujet mais elles ont annoncé une valeur globale de $400 milliards, pour 38 bcm exportés par an sur trente ans. Cela revient à valoriser le gaz russe à $350 les mille mètres cubes (mmc). Rien dextraordinaire au demeurant pour Gazprom si lon compare ce chiffre avec le « prix européen moyen », qui fut de $380 mmc en 2013. Les négociateurs chinois réclamaient depuis des années un prix identique à celui qu’ils payent pour le gaz dAsie centrale (celui-ci est précisément de $350 mmc), quand Gazprom exigeait le prix de marché européen. Les autorités chinoises semblent donc avoir obtenu gain de cause. De fait, le prix de vente théorique nest pas le facteur déterminant pour qualifier cet accord de «contrat du siècle »...
- les coûts d’un tel projet d’exportation vers la Chine : selon les communiqués, CNPC allouera à court terme $25 milliards à Gazprom au titre d’un “prépaiement”. En dautres termes, Gazprom bénéficiera dune avance qui sera utilisée pour le développement des champs de Chayanda et Kovykta ainsi que pour la construction du gazoduc « Power of Siberia », qui reliera ces champs à la frontière chinoise. Toutefois, le coût global du projet est officiellement estimé à $55 milliards par la partie russe. Malgré le prépaiement chinois, Gazprom subira donc le gonflement de son CAPEX dans les années à venir, lequel est déjà lourdement provisionné par les chantiers South Stream et Vladivostok LNG. Mais les perspectives pourraient être plus sombres encore pour Gazprom. En effet, selon les analystes russes de RusEnergy (citant des sources Gazprom), ce sont plus de $100 milliards dinvestissement qui seront nécessaires pour mener le projet à bien. Ce projet n’est donc pas une opération commerciale concluante pour Gazprom, en raison d’un seuil de rentabilité très élevé...
Les conclusions que l’on peut tirer de cette mise en perspective sont donc les suivantes :
- Gazprom et les finances russes continueront de rester très dépendants du marché européen. Conclu en pleine crise diplomatique entre lUnion européenne et la Russie (pour cause de crise ukrainienne), cet accord a accentué les craintes de Bruxelles quant à la pérennité de ses approvisionnements en gaz russe. Un raisonnement sans fondement.
- La déclaration dAlexei Miller (CEO de Gazprom) au Forum économique de Saint-Pétersbourg concernant l’Europe (“It can be assumed that the signing of the contract will affect gas prices on the European market ») procède donc une nouvelle fois des habitudes russes de communication dans le domaine énergétique, lesquelles allient pressions et désinformation. Car pour que cette prédiction se vérifie il faudrait que Gazprom ait les moyens techniques de constituer une ressource gazière russe globalisée, permettant dorienter et de calibrer les exportations en fonctions des avantages commerciaux concédés par des marchés européens et chinois qui se disputeraient le gaz russe par pipeline. Or, une telle offre globale nexiste pas aujourdhui et nexistera pas davantage à lavenir. En labsence dinterconnexions entre les bassins de production est et ouest, le marché chinois sera approvisionné par les champs de Sibérie orientale quand ceux de Sibérie occidentale continueront dêtre dédiés à lEurope.
Aussi, ce constat purement technique permet-il de battre en brèche l’idée selon laquelle la Russie et la Chine serait désormais “partenaires/alliés” (sous-entendu : contre les Etats-Unis) ? On répondra par l’affirmative :
Ce contrat gazier “dans la norme” n’amènera pas la Russie et la Chine à cesser de se percevoir en menace potentielle l’une pour l’autre. Ces deux pays sont et restent des puissances militaires aux ambitions illimitées en termes de domination régionale lesquelles, donc, se télescopent. D’ailleurs, la Russie refuse de vendre ses armements de dernière génération à la Chine ; lesquels sont en revanche cédés à l’Inde. Et Pékin n’hésite pas à “braconner” sur les terres de Moscou en pompant le gaz du Turkménistan -un dossier extrêmement sensible quand on sait que des exportations de gaz turkmène vers l’Europe seraient perçues comme une “déclaration de guerre” à Moscou.
Surtout, la Russie accroît aujourd’hui sa dépendance financière envers la Chine. En dépit de ressources naturelles considérables, la Russie manque de « cash ». Le phénomène nest pas nouveau, la faute en revient à une industrialisation au ralenti (hors secteur oil & gas) et à une accaparation de la manne pétro-gazière par une caste dirigeante douteuse. Aussi, la Russie a-t-elle fait appel aux aides financières chinoises dès 2009 : ce sont 300 000 b/j de brut (sur 20 ans) qui ont été cédés à CNPC, contre $25 milliards de prêts consentis par la China Bank Development à Rosneft et Gazprom. Puis laddition sest corsée en 2013 : Rosneft sest engagé à doubler les livraisons (600 000.b/j) contre un prépaiement de $60 milliards destiné à éponger les dettes contractées lors du rachat de TNK-BP ($40 milliards). Plus récemment, CNPC a pris une participation de 20% dans Yamal LNG à laquelle sajoutera bientôt une nouvelle participation dans ce même projet conduit par Novatek, du fait du tarissement des financements occidentaux depuis lannexion de la Crimée.
En bref, la Russie ne cesse de vendre des pans de son patrimoine énergétique à la Chine en échange de lignes de crédit. Le contrat gazier du 20 mai nest que la dernière déclinaison de cette politique trahissant les faiblesses actuelles de la Russie : isolée sur la scène politique européenne, coupée du marché des capitaux en Occident, la Russie signe à bas prix un accord qui ne fait quaccroître sa dépendance financière envers la Chine. Une dépendance “monumentale” au demeurant, ainsi que Russia Today aurait pu le titrer…
perceval78
05/07/2014
Il semblerait que les va t’en guerre ukrainiens accusent surtout les Allemands concernant ce nouveau cessez le feu.
Les mêmes Allemands qui en remettent une couche contre la NSA
Le ministre Allemand candidat idéal pour remplacer Ashton ( ouf il es déjà pris)
http://carnegieeurope.eu/strategiceurope/?fa=56063
Il semblerait que ces temps ci notre ministre Laurent Fabius se préoccupe surtout de football de climat et de tourisme
dont acte
06/07/2014
1/Merci de vous relire et de ne plus faire du Grasset.
2/ Qui aime bien châtie bien.
Votre texte :
“Le caractère dObama, fait dindécision et de microgestion des conflits aboutissant non pas à labsence de décisions mais à une succession de décisions sectorielles plus ou moins officielles, plus ou moins graduées et parfois sinon souvent avec des épisodes contradictoires, ce caractère qui prête tant le flanc à la critique alors quil voudrait sen faire quitte a donc constitué, une fois plus, le contraire de ce quil attendait, cest-à-dire un accélérateur dans ce sens de la confusion et pour linstallation du cas irakien comme affaire dominante, pour la polémique interne plus que pour laction.”
Respirons un peu :
Le caractère dObama EST fait dindécision et de microgestion des conflits. DE CE FAIT, CES CONFLITS aboutissEnt non pas à UNE absence de décisions, mais à une succession de décisions sectorielles plus ou moins officielles, plus ou moins graduées. CELLES-CI PROVOQUENT souvent une SUCCESSION D’épisodes contradictoires, INCOHÉRENCE AUtant critiquÉE PAR LES OBSERVATEURS QUE NIÉE PAR SON AUTEUR. RÉSULTAT, une fois plus, OBAMA OBTIENT le contraire de ce quil attendait : une confusion ACCÉLÉRÉE FAITE D’UN cas irakien ÉRIGÉ EN TANT QU’affaire dominante DU MOMENT, PLUS ENLISÉ DANS UNE polémique DOMESTIQUE QUE FAISANT L’OBJET D’UNE ACTION RÉELLEMENT EFFICACE.
Désolé,
Très cordialement,
D.A.
Tchang
07/07/2014
@shales gate:
“Ces deux pays sont et restent des puissances militaires aux ambitions illimitées en termes de domination régionale lesquelles, donc, se télescopent. D’ailleurs, la Russie refuse de vendre ses armements de dernière génération à la Chine ; lesquels sont en revanche cédés à l’Inde.”
Que ces puissances soient expansionnistes, c’est déjà discutable.
Mais la Russie a bel et bien commencée à exporter ses armements de pointe à la Chine :
* Su35s
* S-400
* Yakhont ?
Source : http://www.wantchinatimes.com/news-subclass-cnt.aspx?cid=1101&MainCatID=11&id=20140529000006
GEO
04/08/2014
Le 31 mai denier, Hajnalka-Vincze liait sur son blog l’extrémisme atlantiste de l’est à la faiblesse de l’idée américaine d’alliance.
http://blog.hajnalka-vincze.com/2014/05/otanus-bases-permanentes-lest.html
Le ministre polonais des Affaires étrangères ny va pas par quatre chemins. Dans un récent article du Spiegel allemand, sur linsuffisante préparation de lAlliance face à une hypothétique invasion russe, Radek Sikorski fait remarquer : « Il y a des bases au Royaume-Uni, en Espagne, en Allemagne, en Italie et en Turquie. Mais il ny a aucune base là où on en a besoin ». En avant donc, pour des bases permanentes en Pologne et dans les Etats baltes. Après tout, quoi de mieux pour promouvoir la désescalade?
Il faut dire que Sikorski parle avec dautant plus de confiance que le commandant suprême de lAlliance, le général américain Philip Breedlove avait déjà fait flotter lidée de rendre les renforts permanents. Selon lui, lOTAN devrait prendre en considération le changement de paradigme suite aux actions de Moscou, et repositionner ses forces en conséquence.
( ...)
larticle 5 du Traité de Washington étant ce quil est (une garantie en trompe-lil, pour ne pas dire imposture), les alliés déçus et inquiets de lEst exhortent lOTAN, et surtout lAmérique, à faire des gestes. De préférence plus convaincants que la rotation régulière de troupes et lintensification de la planification et des exercices, programmées de toute façon dès lannée dernière. Ils veulent que la présence de soldats américains devienne permanente au lieu de simple « persistante » (comme on dit aujourd’hui dans la novlangue de l’OTAN).
Lors de la cérémonie d’accueil des renforts pour lheure temporaires, la présidente lituanienne nous a expliqué sans ambages les raisons de cette quasi-obsession avec le stationnement de forces US : « Si un de nos invités est blessé cela signifiera une confrontation ouverte non plus avec la Lituanie mais avec les Etats-Unis ». Au moins, les choses sont claires. Les convives y sont considérés un peu comme des otages, pour se prémunir contre les incertitudes de lengagement américain. Heureusement que la confiance règne.
GEO
04/08/2014
Par ailleurs vous avez mon appui et celui de quelques autres pour persister à faire du philippe Grasset.
Salutations.
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