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Article : Un débat qui nous vient de Mars

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nihilisme

CHIBOLET Léon

  29/08/2006

Je voudrais revenir sur la question du nihilisme que j’avais déjà évoquée à propos de l’utilisation des armes atomiques (thermonucléaires) dans des conflits éventuels avec l’Iran, la Syrie ou la Corée du nord.

1. Je propose, après certains auteurs, d’accepter la présence de structures imaginaires collectives à l’oeuvre dans le fonctionnement du champ social. Il y a, me semble-t-il, dans les phases de préparation des grandes guerres des phénomènes de cristallisation et résonance qui permettent la formation d’adhésions collectives. Au risque de paraître peu “analyste rationnel”, je pense que ces phénomènes sont très profondément inconscients chez la plupart des gens mais que des groupes restreints d’individus peuvent élaborer des stratégies avec cela (ce qui demande de bonnes formations en psychologie collective, celle qu’on acquiert en tant que professionnel des médias, par exemple.)

Nous sommes dans une situation de cristallisation/concentration de ces structures imaginaires collectives (on les appellera dorénavant SIV) autour du projet de reconstruction du Moyen-Orient, le fameux re-building the Middle-East qui renvoie au projet grandiose de la RMA (revolution in Military Affairs ), le re-building the nations. C’est ce travail que les USA, Israel et les anglo-saxons doivent réussir à partir des principes des démocraties libérales (market-democratie”.

Ce projet vertigineux (et complètement cinglé) est explicité clairement chez les “néo-cons” et emprunte ses sources, via Léo Strauss, à Hegel.
Il s’agirait pour les USA et leurs alliés d’incarner le chemin douloureux mais dialectiquement splendide de l’Esprit Absolu, celui qui travaille la pâte humaine pour l’amener à construire une histoire.Comme le dit Hegel,la “Menschwerdung” est en même temps “Gottwerdung”.
On voit bien que se joue une alliance entre les présentations rationnelles de Hegel et ses lecteurs (Marx et tutta la famiglia),le messianisme électif sécularisé dans le sionisme et enfin les lectures bêtas et simplettes
des sectes “apocalyptiques” évangélistes, celles qui attendent et préparent l’armageddon (pour la bataille de Meggido, au nord de l’Israel actuel).

2. On ne saurait rire d’un tel amalgame car il puise ses forces dans des courants nihilistes dont les sources sont sans doute anciennes mais les développements typiquement européens. C’est plutôt un sentiment d’horreur qui paraît légitime car ce sont des hommes de cet acabit, animé par ces efrayantes compulsions qui sont maintenant au coeur du Pentagone et du gouvernement.

C’est ce nihilisme, cette volonté destructrice capable d’anéantir toutes les formes disponibles que le philosophe Friedrich Nietzsche a détecté, analysé et s’est proposé d’en faire la généalogie.L’une des sources se situe pour lui dans le développement des religions juives ET chrétiennes autour des concepts de création et d’incarnation.Ce philosophe fut si clairvoyant qu’il sut repérer et prédire les grandes guerres qui devaient selon lui surgir pendant le siècle suivant. Pour lui, le 21 ème siècle devait être sans doute le siècle de la fin des hommes.
Mais, n’allons pas plus avant et retenons que c’est dans ce contexte nihiliste propre aux sociétés contemporaines
- que peuvent apparaître des projets aussi déments que la reconstructions des nations du Moyen-Orient en fonction des critères des market-democratie;
- que l’emploi des armements thermo-nucléaires peut trouver une légitimité.
Mais n’est-il pas logique que ces armes soient utilisés par des hommes qui sont “formatés” de même manière que ceux qui les ont construits?

3. La question n’est pas seulement la mise en place des conditions de la guerre, de l’utilisation des armements atomiques mais des lendemains immédiats qui suivront cette guerre. Assistera-t-on à une prostration des petits hominidés qui seront enfin définitivement convaincus de leur horreur individuelle et collective, sauf, sans doute, des blancs américains, des Israéliens et des anglais installés dans leurs bunkers, ou (et sans doute en même temps), des révoltes meutrières).

J’ai seulement voulu dire que des forces imaginaires propres aux sociétés occidentales modernes, celles qui ont poussé ces sociétés à extirper des particules élémentaires, des énergies titanesques, les poussent maintenant à les utiliser.
Mais peut-être que cet autre philosophe, Heidegger,s’approche plus encore de notre vérité losqu’il reprend les vers du poète Hölderlin:
Mais là où est le danger, là aussi
croît ce qui sauve