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Article : Un été meurtrier

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LE MONDE : Tsahal, désarroi et questions, S.Cypel

Lambrechts Francis

  08/09/2006

... la kontzeptzia (conception) était devenue, en Israël, le mot-clé désignant la vision stratégique de Tsahal. Elle proclamait la nécessité d’une supériorité de feu incontestée et s’ancrait, sur le plan théorique, dans la “guerre mondiale contre le terrorisme” - concept selon lequel Al-Qaida, les groupes armés palestiniens et le Hezbollah ne font qu’un - et dans l’“action préventive”.

... Selon que l’on estime que la “conception” a failli ou qu’elle a connu des ratés mais reste valide, on tirera des conclusions différentes. Un exemple : l’aspect budgétaire. En Israël, les dépenses militaires sont tombées de 15 % du produit national brut (PNB) dans les années 1980 à 8 %. Après l’“incurie” libanaise, l’état-major réclame leur révision à la hausse, ce qui contredit la réduction du train de vie de l’Etat engagée depuis cinq ans. Au contraire “ce sont les priorités de Tsahal qui sont à revoir : en achetant un seul avion F-16 de moins, on entraîne tous nos réservistes pendant un an”, clame le général Dani Yatom, ancien chef du Mossad.

... Yaron Ezrahi, professeur de sciences politiques à l’université de Jérusalem, estime qu’à terme l’échec israélien “renforcera un processus engagé en profondeur : l’abandon de l’idée que posséder une armée beaucoup plus forte que l’adversaire permet toujours de tout régler”.
Si Israël a gagné la guerre du Kippour, rappelle-t-il, il l’a politiquement perdue, rendant le Sinaï à l’Egypte cinq ans après, ce qu’il refusait de faire auparavant. La “victoire” dans la première Intifada palestinienne s’est soldée par la reconnaissance de l’OLP, jusque-là inenvisageable. Celle de la seconde par le démembrement des colonies de Gaza, après trente-sept ans de refus. Enfin, cette guerre au Liban a ramené une Syrie marginalisée dans le jeu régional et renforcé politiquement le Hezbollah.

( NB : “Kontzeptia” évoque si bien l’américanisation de Tsahal. Quel est le moteur d’évolution ? Il y a tellement d’analyses brillantes de “think tank” stratégiques : qu’ont ils changés en Irak ? Pourquoi si peu d’évolution ? Tsahal résulte d’une société comme le pentagone exprime l’amérique. L’évolution de la société israélienne projette l’avenir possible de Tsahal.

L’extrémisme des choix budgétaires (un F-16 = “un an d’entraînement de réservistes”) illustre le gaspillage technologique comparé à la menace, ou plutôt la manipulation obèse d’Israel vers des guerres qui ne les concerne pas ... jusqu’à la guerre spatiale au Hesbollah ?

La dernière sélection (Yaron Ezrahi) positive cet échec militaire qui est “une pièce perdue” sur l’échiquier politique et ne préjuge pas du succès du mouvement suivant, s’ils changent de pion par exemple. On revient à la “Kontzeptia” et à la qualité des acteurs :  si merveilleusement développé dans votre article )

principe de l'armée plus forte

Roberto Buffagni

  08/09/2006

le “principe de l’armée plus forte” est le meme principe qui conduisait a l’échec et à la premiére guerra mondiale l’empire anglais.
Lorsque l’Angleterre (autour 1890, au sommet de la parable imperiale) renonciait a sa traditionnelle grande strategie, dite de la balance of powers(dèpenser le stricte minimum pour l’Armèe et la Marine, et fomenter, par una politique soutenue avec les ènormes quantitè d’argent aussi rendues disponibles, le divisions entre les Etats europeens du continent; le tout, au fin d’eviter qu’une puissance quelconque unifiait le Continent) pour batir la Dreadnought Supernavy dont personne ne pouvait superer le tonnelage, “the Big Ben began to be late” dans le ciel de l’histoire. On arriva jusqu’au point de passer une loi, selon laquelle la marine anglaise devait etre toujours d’un tiers plus grande que la plus grande marine du Continent
L’escalation entre les puissances europeennes allait commencer; et nous savons ce qui s’ensuit.

Haaretz ; Cluster bombs (ou BASM), Phosphorous shells, Multiple Launch Rocket System + Le Monde : Belgique a voté l'interdiction des BASM

Lambrechts Francis

  13/09/2006

IDF commander : We fired more than a million cluster bombs in Lebanon, By Meron Rappaport, 13/09/2006,  http://www.haaretz.com/hasen/objects/pages/PrintArticleEn.jhtml?itemNo=761781 ( NB 1.2.3. ma présentation)

1. “What we did was insane and monstrous, we covered entire towns in cluster bombs,” ...

... The cluster rounds which don’t detonate on impact, believed by the United Nations to be around 40% of those fired by the IDF in Lebanon, remain on the ground as unexploded munitions, effectively littering the landscape with thousands of land mines which will continue to claim victims long after the war has ended. Because of their high level of failure to detonate, it is believed that there are around 500,000 unexploded munitions on the ground in Lebanon. To date 12 Lebanese civilians have been killed by these mines since the end of the war.

2. In addition, soldiers in IDF artillery units testified that the army used phosphorous shells during the war, widely forbidden by international law. According to their claims, the vast majority of said explosive ordinance was fired in the final 10 days of the war.

... It has come to light that IDF soldiers fired phosphorous rounds in order to cause fires in Lebanon. An artillery commander has admitted to seeing trucks loaded with phosphorous rounds on their way to artillery crews in the north of Israel. A direct hit from a phosphorous shell typically causes severe burns and a slow, painful death. International law forbids the use of weapons that cause “excessive injury and unnecessary suffering”, and many experts are of the opinion that phosphorous rounds fall directly in that category.

3. The rocket unit commander stated that Multiple Launch Rocket System (MLRS) platforms were heavily used in spite of the fact that they were known to be highly inaccurate.

... with a range of about 32 kilometers. The rockets are designed to burst into sub-munitions at a planned altitude in order to blanket enemy army and personnel on the ground with smaller explosive rounds. The use of such weaponry is controversial mainly due to its inaccuracy and ability to wreak great havoc against indeterminate targets over large areas of territory, with a margin of error of as much as 1,200 meters from the intended target to the area hit.

4. IDF: No violation of international law

5. LE MONDE 11.09.06 Des armes à bannir au plus vite, par Jean-Baptiste Richardier

... Bombes à sous-munitions (BASM) ... Lors de l’incursion de 1978 au Liban et du siège de Beyrouth en 1982, Israël avait déjà eu recours aux BASM, provoquant une suspension des livraisons par les Etats-Unis jusqu’en 1986, pour non-respect d’un accord secret. Cet accord, rendu public depuis, prohibait toute utilisation dans le cadre d’une agression contre un autre Etat ou sur des zones peuplées, la limitant à des opérations strictement défensives en cas d’attaques multiples.
Manifestement, Tsahal n’en a pas tenu compte, illustrant la fragilité de ce type de contraintes… Dès lors que ces armes sont considérées comme légales, aucune mise en cause pour “utilisation excessive” des BASM n’a de chance d’aboutir, pas plus celle d’Israël au Liban que celles de l’OTAN au Kosovo, des forces de la coalition en Afghanistan ou encore des Etats-Unis et du Royaume-Uni en Irak. Et pendant ce temps, à Genève, dans le cadre de la “convention sur les armes conventionnelles inhumaines”, les discussions sur les BASM s’enlisent depuis cinq ans. ...

L’interdiction des BASM est-elle une utopie ? ... Sanctionné par un traité historique et salué par le prix Nobel de la paix, ce combat a démontré, avec éclat, que rien n’oblige les citoyens à accepter les arguments des militaires et les justifications de responsables politiques qui ignorent les droits des populations civiles. ...

Et les premiers résultats sont là. Malgré les pressions des pays de l’OTAN, c’est en réponse à la mobilisation des ONG que la Belgique a voté l’interdiction des BASM en février ( NB Plus tôt ? voir 6 ). Propice à une prise de conscience de l’opinion, l’actualité au Liban ne peut manquer d’encourager plusieurs pays comme l’Irlande, le Mexique, la Norvège et la Suède, notamment, à franchir le pas. Sans oublier le récent appel à l’interdiction de la ministre allemande de la coopération…

Qu’en est-il de la France ? Le pays des droits de l’homme, membre permanent du Conseil de sécurité, producteur de BASM, a été jusqu’à aujourd’hui un opposant déclaré à leur interdiction.

6. Sénat de Belgique 1 AVRIL 2005 Proposition de loi complétant la loi du 3 janvier 1933 relative à la fabrication, au commerce et au port des armes et au commerce des munitions, en ce qui concerne les bombes à fragmentation (Déposée par M. Philippe Mahoux) http://www.senate.be/wwwcgi/get_pdf?50333683#search=%22Cluster%20bomb%20Belgique%22

7. Belgian Doctors Bill U.S. for Treating Iraqi Girl ( 6 mai 2005) http://www.stopusa.be/scripts/texte.php?section=&langue=3&id=23757

Haaretz Editorial : Shooting without a target (further testimony to the flawed decision-making of those who managed the war)

Lambrechts Francis

  14/09/2006

During the final days of the war, when it became clear that the Israel Defense Forces had no solution to the ongoing launchings of Katyusha rockets, a decision was made to “flood” the area with cluster bombs, delivered by artillery shells and rockets. This was non-target specific shooting, based on the assumption that the bomblets would cover a large area, possibly destroy Hezbollah rocket launchers and cause as many casualties as possible among its fighters.

... Firing at undefined targets is a problem in and of itself. The dilemma it entails is reflected in statements by soldiers who fired cluster bombs during training and recognized that this type of weapon should be used only in a war against a regular army, for the purpose of hitting arms supply convoys or missile batteries - not against civilian areas. But beyond this dilemma, the committee investigating the war should find out whether anyone considered what would happen to the thousands of cluster bomblets that failed to explode, and were therefore transformed into mines spread throughout southern Lebanon.

The cluster bomb is not a banned weapon, but it is described as an “indiscriminate” weapon, which should not be used against targets in civilian areas because, inter alia, it continues to kill once the war is over. Since the cease-fire went into effect, 12 Lebanese civilians have been killed by duds that exploded unexpectedly. Since the percentage of unexploded cluster bomblets ranges from 5 to 30 percent, according to various assessments, southern Lebanon is now an area littered by thousands of bomblets that have not yet exploded.

Questions regarding the IDF’s conduct during the war have many implications, both moral and practical. Israel’s ability to rally international support depends in part on the distinction it makes between innocent civilians and the enemy. While Hamas and Hezbollah attack civilians as part of their strategy, Israel declares that it does not do so, and that it makes an effort to avoid harming civilians. The decision to drop cluster bombs on villages, with no specified targets; the decision to use these bombs over a large area, making it impossible to know in advance who will be there; and the well-known fact that a large percentage of these munitions will not explode on impact, and will therefore be transformed into mines in an area to which civilians will return,

are all further testimony to the flawed decision-making of those who managed the war.

Now, Israel can do little except accede to UN Secretary General Kofi Annan’s request and assist in marking the areas hit by the cluster bombs, so that there will be no further casualties among Lebanese civilians, who have already been hurt by the war. Significant portions of southern Lebanon have now become minefields. Annan’s condemnation was not without basis.

coopération franco-israélienne

Roland Brémond

  19/09/2006

Je souhaite revenir brièvement sur un point que vous citez comme en passant :

“La période correspondait aux liens militaires très forts qu’Israël avait établis avec la France, et qui durèrent jusqu’en 1967. (Les Israéliens furent presque exclusivement équipés de matériels français, notamment aéronautiques, jusqu’en 1967 : les avions Magister, Ouragan, Vautour, Mystère, Mirage, Noratlas, etc. Une coopération plus secrète porta également sur le domaine nucléaire.)”

Pouvez-vous être plus précis sur la question de la coopération nucléaire ? Selon D. Lorentz (affaires atomiques, les arènes, Paris 2001), la France a participé au développement de la bombe atomique israélienne. Cette hypothèse est-elle crédible ?

Des nouveaux rapports de force résultant de la campagne de 2006 au Sud-Liban

Robert Meille

  18/10/2006

 Les changements de l’IDF que vous énumérez justement soulignent à quel point Israël est devenu un “quasi-protectorat américain”, réduit de ce fait à un copié-collé des doctrines US en vigueur (supériorité du feu; centralisation et contrôle de l’information par la “network centered maneuver”); y ajouter le morcellement et l’inefficacité des structures de renseignement notamment en raison de la faiblesse du renseignement humain (recul de la maîtrise de la langue arabe dans l’armée israélienne). Ces priorités recopiées du protecteur américain ont conduit naturellement aux impasses constatées en matière d’équipements comme à l’aggravation des faiblesses tactiques.
 L’IDF que les initiés moquaient entre eux il y a quelques années comme “la meilleure armée arabe” s’est ainsi endormie sur ses lauriers. Elle a perdu ses savoir-faire et son âme dans les opérations de contrôle de populations d’une armée de type colonial. Le corps de ses officiers s’est sclérosé et coupé du peuple. La priorité donnée au high-tech par une caste de spécialistes a conduit (en période de restrictions budgétaires obligées) à supprimer des programmes de cohérence ( ‘petits’ programmes peu voyants) et à économiser sur le drill de la troupe.
Aujourd’hui l’IDF s’interroge - mais trop tard - sur sa solidité et son moral; elle doute de ses missions, de ses performances, de son lien avec le peuple. Ses dysfonctionnements croissants ne peuvent plus être dissimulés: bureaucratie militaire envahissante; intellectualisme et son corollaire: un orgueilleux aveuglement; perte de réactivité et d’initiative des petits échelons; mauvaise interprétation des nouvelles situations sociales et géopolitiques d’où l’incapacité à reformuler des propositions de missions pertinentes; etc.
 Pour paraphraser un mot de Willy Brandt jadis, il est possible qu’Israël et l’IDF , vieux avant terme, aient épuisé une bonne part de leur imagination et ne puissent donc plus voir la réalité !
 Quelles conséquences sont envisageables ?
Confronté à une crise de cette ampleur, tout establishment militaro-politique est tenté par une session de rattrapage, serait-ce seulement pour se rassurer et redorer son blason: Gaza est probablement le théâtre du second round comme cela semble se dessiner ces derniers jours?  Il est fort à parier que coincés dans le dilemme d’une intervention massive et de ses “dégâts collatéraux” dans un mouchoir de poche surpeuplé ou de coups de poing limités à l’infra-médiatique maisn peu efficaces, l’état-major et le gouvernement perdent à tout coup la bataille de l’information.
Plus grave, Israël ne voit plus les limites du recours exclusif à la force armée; il a perdu l’initiative stratégique; chacune de ses réactions renforcent ses adversaires; il devient le dénominateur commun et commode de l’arc chiite en gestation et de la nébuleuse fondamentaliste sunnite.
Le pays aura une tendance accrue à se bunkériser au rythme de la montée des dangers et de l’aggravation des décalages démographiques intérieurs et dans la région.
 Et l’Europe dans tout cela ?
Elle peut certes contribuer à freiner la spirale infernale en tant que partenaire commercial majeur de l’état d’Israël. Elle doit discuter avec tous les interlocuteurs arabes en place, surtout lorsqu’ils sont démocratiquement élus !. Elle pourra le moment venu tenter de redéfinir une grande politique proche -orientale occidentale avec une nouvelle administration américaine revenue à la raison.
Mais il lui faut aussi se décider à mettre sur pied une force de projection suffisamment nombreuse, dissuasive mais robuste et rustique, pour: 1/ appuyer sa diplomatie de façon assez convaincante; 2/ se préparer in fine à tout simplement garantir la survie du"soldat Israël” en passe d’être submergé à un horizon de 20 ans ou 40 ans.
Mais le rôle de l’Europe dans l’espace méditerranéen et plus largement dans le monde de l’Islam en crise est un autre débat qu’il serait sans doute utile que vous ouvriez.