Dedef
02/09/2009
“vers la chute finale dune guerre introuvable”
Puisqu’il est question de l’Afghanistan et de l’Otan et des renforts, ci dessous une interview de Pierre Lelouche de mi-juillet 2009
Relue avec attention elle contient pas mal de choses: de la flatterie, de l’amertume, du mépris, de la colère, du cryto-gaullisme et même de la peur.
Et pour l’Afghanistan, pas de renforts de soldats!
Mais le plus drôle c’est la réponse à propos de “lavis au sujet de la guerre dIrak ” . Vraiment délicieuse, surtout quand il y mèle fraternellement l’humaniste Kouchner.
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PIERRE LELLOUCHE lundi 20 juillet 2009 http://www.turquieeuropeenne.eu/article3411.html
LEXPRESS, le 17/07/2009 Christian Makarian - Jean Michel Demetz
“Pendant des années, à droite, il a endossé le rôle du provocateur. Libéral, iconoclaste, ancien éditorialiste à Newsweek, ce pourfendeur du catéchisme gaulliste est régulièrement attaqué de toutes parts. Aujourdhui secrétaire dEtat aux Affaires européennes, Pierre Lellouche dévoile, pour la première fois, son programme daction et se livre à des révisions surprenantes”
Q:—-Pour un homme réputé pour sa liberté de parole, devenir ministre, à 58 ans, nest-ce pas un piège ?
Cest dabord un grand honneur, mais aussi un aboutissement. Je me suis engagé en politique, il y a vingt ans, après une discussion, peu avant sa mort, avec mon vieux maître Raymond Aron. Je lui avais demandé sil ne regrettait pas dêtre demeuré un spectateur de lHistoire et non pas un acteur, alors quil aurait pu être le Kissinger de De Gaulle. Il mavait répondu que la politique était un univers difficile, mais ses yeux exprimaient un immense regret.
Q:—-Est-ce pour vous un nouveau métier ?
Jai déjà été “testé” sur le terrain, en négociant pour la France lobtention dIter [le réacteur thermonucléaire expérimental international], le plus grand projet scientifique international. Je sors dune mission de quatre mois au Pakistan et en Afghanistan : cétait un job ministériel sans le titre.
Q:—-La fonction de ministre nest-elle pas aujourdhui dévalorisée ?
Je ne suis pas là pour faire des notes ou faire semblant. Je suis là pour identifier les problèmes, tirer la sonnette dalarme, apporter des solutions. Jai mis en garde le président sur lAfghanistan : trop de militaire, pas assez daide civile au développement. Il ma écouté. Cest un plaisir de travailler avec un patron opérationnel, réactif et pragmatique. Quant à Bernard Kouchner, je le respecte beaucoup et je suis ravi de faire équipe avec lui.
Q:—-Quelles sont vos priorités pour les six prochains mois ?
Je mesure chaque jour la portée des 60 % dabstention aux élections européennes. Le système européen na pas purgé les non français et néerlandais au référendum de 2005. Cest le point de départ de ma réflexion. Mon job, cest daider le président de la République à réconcilier les Français avec lEurope.
Q:—-Comment ?
Entre 1957 et 1989, plus dEurope, cétait plus de France. Plus dEurope, cétait le couple franco-allemand, avec une moitié dAllemagne que nous pilotions grâce à notre “virilité” nucléaire et militaire, qui compensait la supériorité économique allemande. Cet équilibre-là a disparu avec la fin de la guerre froide, et la situation sest aggravée avec le rendez-vous raté de Mitterrand avec lAllemagne réunifiée. Les Allemands ne lont jamais oublié. Jai été témoin dun déjeuner, à la fin de 1993, entre Mitterrand et Kohl où le second, dune froideur extrême, rappelait au premier son passé pendant la guerre… Vingt ans après la chute du Mur, jespère aider Nicolas Sarkozy à rebâtir cette confiance entre Paris et Berlin. Car il faut redonner corps à la construction européenne et redonner aux Français lenvie de lEurope. Les maux sont connus : sentiment de dilution, de perte de contrôle du destin national, fonctionnement incompréhensible des institutions… Laissez-moi citer lessayiste Marcel Gauchet : “LEurope ne procure pas didentité, elle ne donne pas de quoi se situer et se définir dans le temps et lespace. Elle ne dit pas aux individus ce quils sont, compte tenu dune histoire assumée et dune situation dans le monde.” On est bien là au coeur du problème. Le divorce, avec nos opinions publiques est là, alors même que, sans lEurope, il ny aura pas de plan Climat, pas de régulation financière, pas de lutte contre limmigration clandestine et guère de poids face aux grandes puissances émergentes.
Q:—- Bruno Le Maire aura été secrétaire dEtat aux Affaires européennes durant six mois seulement. Or il devait réchauffer les relations avec Berlin…
Il y a beaucoup travaillé, et je continue. Je me suis rendu à Berlin quatre jours après ma nomination. La vérité sur le couple franco-allemand, cest quil fonctionne parce quil y a accord au sommet, entre Nicolas Sarkozy et Angela Merkel. Vous insistez sur limportance de lAllemagne, mais Nicolas Sarkozy na pas vraiment commencé son mandat en privilégiant laxe franco-allemand… Laxe franco-allemand est la base de tout. Le président de la République a toujours été sur cette ligne-là.
Q:—-Bye-bye, le rêve de rééquilibrage avec le Royaume-Uni ?
Non. Je vous rappelle que, sans le sommet franco-britannique de Saint-Malo, en 1998, il ny aurait pas eu davancée européenne en matière de défense. Mais Philippe de Villiers est un dangereux fédéraliste à côté des conservateurs britanniques plus queurosceptiques qui gouverneront peut-être le Royaume-Uni en mai prochain ! Il faudra donc faire preuve de pédagogie, car nous avons besoin de Londres, sur la défense comme sur le futur service daction diplomatique européen.
Q:—-Concrètement, comment mettre fin au divorce entre lopinion et lEurope ?
Par un constant travail dexplication, mais aussi en multipliant les relais dinfluence. Je veux passer une journée par semaine à Bruxelles, dans mon bureau de la représentation permanente de la France, à oeuvrer auprès des députés, des commissaires, des hauts fonctionnaires. Les parlementaires français nationaux et européens seront impliqués en permanence. Je les convierai à maccompagner dans les réunions européennes chaque fois que cela sera possible. Une part importante de notre droit interne provient de lEurope. Il faut donc déminer en amont : plus de directive Bolkestein ni de vin rosé fabriqué avec du blanc et du rouge !
Q:—-Il se murmure que Nicolas Sarkozy prendra une initiative spectaculaire si Angela Merkel remporte les élections allemandes, en septembre…
[Silence.]
Q:—-Merci de la confirmation… Venons-en au lourd calendrier qui vous attend.
Lautomne va être dominé par les problèmes institutionnels que nous narrivons pas à résoudre depuis quinze ans et, en même temps, nous allons nous emparer des grands dossiers politiques.
Première semaine de septembre : réunion extraordinaire du Parlement allemand et vote de la loi qui doit achever le processus de ratification du traité de Lisbonne.
Fin septembre : élections en Allemagne.
Début octobre : référendum irlandais.
Entre les deux, le Parlement européen se sera prononcé, ou non, sur la nomination du président de la Commission.
Dans la foulée du référendum irlandais, si le oui lemporte, le nouveau dispositif institutionnel se mettra en place : Parlement, Commission, président permanent du Conseil européen et service daction diplomatique. Le choix des hommes sera capital, car il façonnera la nouvelle Europe. A la fin de lannée, nous voulons voir réglée la question institutionnelle.
Q:—-Et puis il y a les crises prévisibles…
Sur les livraisons de gaz russe, sur la grippe… Autant de tests majeurs pour lEurope.
Sans parler des crises régionales : Caucase, Proche-Orient, Iran, Afghanistan…
Q:—-Lélargissement va-t-il continuer ?
La France est favorable à la candidature de lIslande, qui devrait être prise en considération dici à la fin de lannée. Et nous espérons faire avancer le dossier de la Croatie, entravé par ses différends territoriaux avec la Slovénie. Cest un signal important sur lengagement de lUnion à stabiliser les Balkans.
Q:—-Concernant la Turquie, êtes-vous toujours partisan de son entrée dans lUnion européenne, à moyen terme ?
(résumé: Bla bla bla mais Non)
Q:—-Vous avez donc changé davis sur la Turquie !
(résumé: Bla bla bla mais Oui)
Q:—-Avez-vous aussi changé davis au sujet de la guerre dIrak ?
On a caricaturé ma position, comme celle de Bernard Kouchner, dailleurs. Je nétais pas pour la guerre en Irak, jétais contre la guerre avec les Etats-Unis à propos de lIrak.
Q:—-Il est vrai que vous êtes réputé atlantiste…
Quest-ce que cela veut dire ? A lheure où la France a pleinement réintégré lOtan ! Que je serais un agent de la CIA ? Que je suis payé par les Etats-Unis ? Que je ne suis pas assez français pour être au gouvernement ? Que je ne suis pas né au bon endroit ? Que mon nom na pas la bonne consonance ? Cette caricature permanente est insupportable et nauséabonde.
Q:—-A quand le fauteuil de ministre des Affaires étrangères ?
Pour lheure, je suis totalement concentré sur ma mission et, croyez-moi, elle nest pas de tout repos ;
LEXPRESS, Par Jean-Michel Demetz, Christian Makarian, le 17/07/2009
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