jc
04/09/2023
PhG : "On s’attardera également à la très intéressante dernière question sur les capacités de la Russie et de la Chine d’adapter la modernité dont il se sont saisis à leurs traditions, de façon à ne compromettre en aucune façon les seconds. Pour l’Occident, le problème n’existe quasiment plus, ayant disparu avec les traditions. Bien qu’on ne s’y attarde pas, car l’on a très peu d’éléments pour le traiter, c’est de loin le principal problème de cette gigantesque tragédie."
En ce qui concerne la Chine PhG a posé le problème dans https://www.dedefensa.org/article/glossairedde-crisis-la-crise-de-la-raison-subvertie (fin 2014):
"Nous avons cité l’intervention de l’officiel chinois avec une intention à l’esprit, ne doutant pas un instant de la sincérité de son propos, et de la véracité de sa propre conviction, dans l’exposé qu’il fit des intentions de la Chine, de l’Asie, et de l’antique sagesse de cette partie du monde. Nous reconnaissons d’autant plus tout cela que nous pouvons dire notre conviction que l’intervenant se trompait, qu’il se trompe en croyant qu’un modèle de civilisation asiatique rénové s’imposera rapidement, à côté du modèle occidentaliste, éventuellement pour le concurrencer et le remplacer.
Ce n’est nullement que ses arguments de fond ne soient pas justifiés et excellents; ils le sont, ceci et cela, et plus qu’à leur tour. Mais l’intervenant ignore deux choses: combien le modèle occidentaliste est, à la fois, plus puissant qu’il ne croit et plus proche de l’effondrement catastrophique qu’il ne croit.".
Il me semble que, "grâce" à la quincaillerie électronique, la Chine a plutôt de l'avance sur l'Occident en ce qui concerne le contrôle social de sa population. Quid de la Russie ? Pour moi la question est : la Tradition arrivera-t-elle à s'imposer à ce dernier -mais pas le moindre- rejeton de la modernité ? Toujours pour moi je vois l'organisation sociale traditionnelle comme un inconvénient plus que comme un avantage ; car l'organisation traditionnelle du pouvoir temporel est top-down (le pouvoir vient d'en haut), avec un pouvoir rigidifiant actuellement décuplé -voire centuplé- par "notre" dernier rejeton qui nous emmène dans une cavalcade de plus en plus folle vers la rigidification cadavérique de l'humanité (cf."les signes des temps" de Guénon).
C'est peut-être la Russie qui tirera le mieux de ce conflit tradition/modernité car la chrétienté d'Orient a -ou a eu- une tradition d'un pouvoir spirituel moins top-down (églises orthodoxes auto-céphales) que l'Occident (église catholique "universelle").
Comment inverser cette tendance à la rigidification de la société ? Alain de Benoist examine la question dans "Jacobinisme ou fédéralisme ?" :
"Avec Hobbes, en revanche, l’Etat devient la seule forme d’organisation sociale légitime. Quant au souverain, il détient plus que jamais le monopole de la représentation. « Une multitude devient une seule personne, écrit Hobbes, quand ces hommes sont représentés par un seul homme ou une seule personne [...] Car c’est l’unité de celui qui représente, non l’unité du représenté, qui rend une la personne ». Précurseur du libéralisme, Hobbes affirme par ailleurs que l’individu doit être regardé comme un être complet et autosuffisant. Le seul mode d’association qu’il puisse reconnaître est donc le contrat passé volontairement entre individus autonomes. Les corps intermédiaires sont du même coup appelés à s’effacer devant les prérogatives de l’individu ou l’omnipotence du Léviathan.".
Alain de Benoist et Carlos Blanco ( http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2023/09/01/9-11-origines-et-developpement-du-neoliberalisme.html ) : même combat.
Remarque finale.
La citation de Hobbes ( « Une multitude devient une seule personne quand ces hommes sont représentés par un seul homme ou une seule personne [...] Car c’est l’unité de celui qui représente, non l’unité du représenté, qui rend une la personne » ) indique pour moi clairement que la démocratie représentative est rigidifiante (et n'est pas -et de très loin- la véritable démocratie). Je la rapproche des citations faites par les philosophes belges Dominique Lambert et Bertrand Hespel dans leur article "De la topologie de la conciliation à la logique de la contradiction" que j'ai souvent cité ici en commentaires:
- "« Pour ce qui est de savoir absolument en quelle manière les choses se lient les unes aux autres, et s’accordent avec leur tout, je n’ai pas cette science; elle requerrait la connaissance de la Nature toute entière et de toutes ses parties. Je m’applique en conséquence à montrer quelle raison m’oblige à affirmer que cet accord et cette liaison existent » (Spinoza)
- « Ce qui n’est pas véritablement "un" être n’est pas non plus véritablement un "être" » (Leibniz)
- "On peut bien rassembler différents objets, on ne formera pas pour autant un être, mais tout au plus un « être de raison » [ce que font les faisceaux de Grothendieck]. Rendre compte de quoi que ce soit qui est exige donc de rendre compte de son unité [ce que font les conciliations de L&H]." (Lambert et Hespel)
Et, pour moi, cette dernière citation vaut encore quand on remplace "objets" par "êtres".
Pour Baudelaire et Maistre le seul progrès qui vaille est la recherche de l'unité perdue. (cf. "La Grâce de l'Histoire").
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